La Commission européenne examine s’il y a lieu de lancer une enquête sur les pratiques fiscales du géant américain de la restauration rapide. Selon des syndicats, McDonald’s n’a payé que 16 millions d’impôts au Luxembourg entre 2009 et 2013, grâce au transfert de ses bénéfices, alors que la multinationale aurait dû s’acquitter de plus d’un milliard d’euros si ses revenus avaient été taxés dans leurs pays d’origine.
« Nous regardons si nous devons ouvrir une enquête sur McDonald’s », sur la base des informations révélées par les syndicats, a affirmé Margrethe Vestager, commissaire à la Concurrence, lors d’une audition devant le Parlement européen.
Elle s’exprimait devant la commission spéciale mise en place en février par le Parlement européen pour mettre au jour les pratiques fiscales décriées de certains États membres, révélées par le scandale LuxLeaks fin 2014.
Trois fédérations syndicales internationales ont accusé en février McDonald’s d’avoir soustrait plus d’un milliard de recettes fiscales aux États européens entre 2009 et 2013.
Seulement 16 millions d’impôts au Luxembourg entre 2009 et 2013
Selon ces fédérations, cette évasion fiscale a été rendue possible par un schéma d’optimisation fiscale ayant permis à la multinationale de faire remonter plus de 3,7 milliards d’euros de ses établissements européens vers sa holding luxembourgeoise McD Europe Franchising, qui s’est acquittée de seulement 16 millions d’euros d’impôts dans le Grand Duché entre 2009 et 2013.
Si ces revenus avaient été imposés dans leurs pays d’origine, McDonald’s aurait dû verser 1,05 milliard d’euros supplémentaires, ont calculé les syndicats.
McDonald’s Europe affirme « respecter les lois en vigueur, y compris le paiement des taxes dues dans chaque pays ».
La Commission européenne mène déjà quatre enquêtes sur des accords de rescrits fiscaux –« tax rulings »– concernant Apple en Irlande, Starbucks aux Pays-Bas, Fiat et Amazon au Luxembourg.
La Commission s’était dans un premier temps engagé à conclure ces procédures, pouvant à terme conduire à des sanctions contre les États mis en cause, à la fin du deuxième trimestre 2015.
« Ce délai ne sera pas tenu », a prévenu Mme Vestager, se refusant à fixer un nouveau calendrier. Elle a invoqué la complexité des vérifications à mener, et la nécessité pour la Commission de ne pas prêter flanc à des contestations.
La Commission a ouvert une nouvelle procédure début février à l’encontre de la Belgique, au sujet d’une disposition fiscale suspectée de profiter uniquement aux multinationales.
L’exécutif européen doute que ces dispositions soient conformes aux règles de l’UE en matière d’aides d’État, qui interdisent l’octroi d’avantages sélectifs à certaines entreprises.
Mme Vestager a par ailleurs indiqué que trois États membres sur 15 sollicités –Pologne, Estonie et République tchèque– n’avaient pas encore fourni à la Commission les informations demandées sur les rescrits fiscaux en vigueur depuis 1991.
Les révélations sur des centaines de « tax rulings » conclus au Luxembourg lorsque Jean-Claude Juncker, l’actuel président de la Commission européenne, était Premier ministre, ont provoqué un sursaut dans l’UE contre l’évasion fiscale organisée en faveur des grandes sociétés.
Parallèlement à ses enquêtes, la Commission a proposé en mars d’introduire l’échange automatique d’informations sur les rescrits fiscaux, un projet qui a reçu le soutien des ministres européens des Finances.
AFP