Le Brésil, en poursuivant sa rhétorique anti-Macron, a opposé dans la nuit de lundi à mardi une fin de non-recevoir à l’aide d’urgence proposée par les pays du G7, et affirmé que les incendies en Amazonie, qui ont encore progressé en ce début de semaine, étaient « sous contrôle ».
Onyx Lorenzoni, le chef de cabinet du président brésilien Jair Bolsonaro (exerçant des fonctions équivalentes à celles d’un chef de gouvernement), a formalisé le rejet de l’aide par Brasilia en lançant : « Nous remercions (le G7), mais ces moyens seront peut-être plus pertinents pour la reforestation de l’Europe ». « Macron n’arrive même pas à éviter un incendie prévisible dans une église qui fait partie du patrimoine mondial de l’humanité, et il veut nous donner des leçons pour notre pays ? », a également lancé Onyx Lorenzoni dans une allusion à l’incendie qui a touché la cathédrale Notre Dame de Paris le 15 avril dernier.
Tout en priant le président français de s’occuper de ses « colonies », dans le droit-fil des précédentes attaques du président Bolsonaro à l’encontre de son homologue.
Le dirigeant d’extrême droite avait amorcé le rejet de l’aide en tweetant : « Nous ne pouvons accepter qu’un président, Macron, lance des attaques déplacées et gratuites contre l’Amazonie, ni qu’il déguise ses intentions derrière l’idée d’une ‘alliance’ de pays du G7 pour ‘sauver’ l’Amazonie, comme si c’était une colonie ». « Le respect de la souveraineté de quelque pays que ce soit est le minimum qu’on puisse attendre dans un monde civilisé », avait-il ajouté, après plusieurs jours d’échanges musclés entre les deux dirigeants.
Les sept pays les plus industrialisés, réunis à Biarritz, avaient promis de débloquer d’urgence 20 millions de dollars pour envoyer des avions bombardiers d’eau supplémentaires. Le G7 est tombé d’accord pour un plan d’aide « d’au moins 30 millions » de dollars, a ensuite précisé Emmanuel Macron, destiné à la reforestation, au niveau de l’ONU, qui doit être finalisé au cours de l’Assemblée générale des Nations unies fin septembre.
Dimanche, Macron avait par ailleurs déploré les propos « extraordinairement irrespectueux » du chef de l’État brésilien à l’encontre de son épouse, disant espérer « très rapidement » que les Brésiliens « auront un président qui se comporte à la hauteur ». A la veille du G7, Macron avait accusé Bolsonaro de lui avoir « menti » sur ses engagements en matière d’écologie et annoncé que la France s’opposait désormais à l’accord controversé de libre-échange entre l’UE et le Mercosur, un groupe de pays sud-américains, dont le Brésil.
Situation « un peu exagérée »
Qu’en est-il des feux ? Lundi, le ministre brésilien de la Défense a assuré que les incendies en Amazonie étaient « sous contrôle », après le déploiement de plus de 2 500 militaires et des pluies signalées dans plusieurs des régions concernées. La situation « a été un peu exagérée », a ajouté Fernando Azevedo e Silva, qui a affirmé devant des journalistes à la sortie d’une réunion avec Jair Bolsonaro que le Brésil avait connu certaines années des « pics d’incendies beaucoup plus graves ».
Quelque 1 113 nouveaux départs de feu ont été recensés dimanche au Brésil par l’Institut national de recherche spatiale (INPE). Au total, près de 80 000 feux de forêt ont été répertoriés au Brésil depuis le début de l’année – un plus haut depuis 2013 – dont plus de la moitié en Amazonie. Dans l’État de Rondônia, frontalier de la Bolivie, la ville de Porto Velho restait couverte de larges nuées de fumées lundi, malgré la mobilisation depuis dimanche par l’armée de deux avions C-130 Hercules.
A l’hôpital pour enfants Cosme e Damião, plusieurs familles attendaient de voir un médecin. Dans cette ville d’un demi-million d’habitants, les pathologies vont de la toux sèche aux irritations oculaires, en passant par des troubles respiratoires ou des fièvres pouvant dégénérer en pneumonie. « La fumée peut être très agressive. Les plus affectés sont les enfants et les personnes âgées », explique Sergio Pereira, le directeur de cet établissement qui a vu sa fréquentation augmenter.
Jair Bolsonaro, sous une intense pression internationale, a ordonné une enquête sur des producteurs ruraux de l’État de Para accusés d’avoir organisé une « journée du feu » le 10 août en soutien aux efforts du président d’extrême droite pour affaiblir la surveillance de la protection environnementale. Une majorité de Brésiliens (53,7%) désapprouvent la politique menée par Bolsonaro, qui enregistre une forte baisse de sa popularité durant ces six derniers mois, selon un sondage publié lundi. L’Amazonie, dont 60% de la surface se trouve au Brésil, s’étend aussi en Bolivie, Colombie, Équateur, Guyane française, Guyana, Pérou, Surinam et Venezuela.
LQ/AFP