Maxime Jacques, 25 ans, est le préparateur physique d’une sélection masculine de volley au sein de laquelle il a su, en quelques mois, trouver sa place. Et ce grâce à son travail.
Le Quotidien : L’équipe nationale a trois échéances en mai avec les qualifications du championnat d’Europe et du monde. Quelle est votre mission en tant que préparateur physique?
Maxime Jacques : Des joueurs ne pouvaient pas être présents en raison de la finale du championnat (NDLR : Strassen – Walferdange) qui s’est déroulée sur trois semaines. Malgré tout, on en a profité pour effectuer un travail de proprioception, d’équilibre et de vitesse d’exécution. Auparavant, on avait mis l’accent sur la force.
À cette période de la saison, les organismes sont plutôt fatigués. Cela complique-t-il votre travail?
Non justement, car lors des quatre derniers mois, on avait fait énormément d’intensité. Après la Novotel Cup, on a attaqué un cycle de force pure pour enchaîner ensuite force/explosive, force/endurance et maintenant force/vitesse.
Quel est l’état de fraîcheur des internationaux?
Par rapport à la période où je suis arrivé, c’est-à-dire avant la Novotel Cup, je les trouve beaucoup plus frais. Après, il y a eu beaucoup de stages et d’entraînements intensifs ces derniers temps et aussi quelques petites blessures, d’où le travail, ce soir (hier), de renforcement des genoux en vue des compétitions à venir qui sont proches. Mais sinon, que ce soit au niveau psychologique ou musculaire, ils sont assez frais.
Quelles sont les particularités physiques d’un volleyeur?
Il doit être fort, explosif, puissant, rapide et, surtout, endurant. Toutes les qualités physiques sont mises en jeu. Un vrai athlète. Le travail de musculation doit cibler la ceinture scapulaire, très utilisée lors des réceptions et des attaques, et la ceinture abdominale qui permet d’avoir une bonne musculature au niveau des hanches, pour un bon équilibre, une bonne proprioception et un bon rapport au niveau du champ environnemental.
Ce profil complet du volleyeur, complique-t-il votre travail?
C’est très complexe, car lorsqu’on travaille une qualité physique, c’est toujours au détriment d’une autre. C’est comme ça. On travaille donc toujours d’abord la force pour amener petit à petit vers la compétence plus spécifique de la vitesse et de l’endurance.
Y a-t-il des besoins spécifiques en fonction des postes?
Bien sûr! Par exemple, le libéro est souvent à la réception et, donc, en position isométrique et doit avoir une endurance musculaire un peu plus importante. Le travail d’appui est super important. Les réflexes aussi, car sur un smash adverse, le ballon arrive en une fraction de seconde. C’est pour cette raison que je compare beaucoup la préparation physique d’un volleyeur à celle d’un boxeur au niveau scapulaire et pelvienne. Mais aussi au niveau des réflexes.
Vous n’avez pas le physique d’un volleyeur…
Non, j’ai plus le physique d’un boxeur, ce qui est normal puisque j’en ai fait de 19 à 23 ans. C’est-à-dire carré en haut avec des jambes fines et explosives (Charel Hoffmann se met à rire) C’est vrai que j’ai les jambes assez fines. Mais quand j’étais compétiteur en boxe, j’avais interdiction de travailler les jambes autrement qu’en explosivité. Du coup, elles sont très striées, très définies, mais pas très volumineuses. À l’époque où je faisais de la boxe, c’était une qualité…
Comment s’est construit ce physique?
J’ai toujours été passionné de sport et à l’université où j’ai suivi des études de Staps, je fréquentais la salle de musculation. J’ai essayé et ça a commencé à me plaire. Je suivais des cours de biologie et j’ai toujours été passionné par la relation entre l’anatomie et la psychologie. Et, avec le temps, je me suis rendu compte que plus j’arrivais à maîtriser mon propre corps, plus je parvenais à contrôler mon stress, ma nervosité ou mes états d’âme.
Ce physique vous a permis de faire des concours de fitness et du mannequinat…
Ce corps m’a permis d’avoir une petite notoriété dans le monde du model-fitness. Là, j’étais qualifié pour la finale de Men Universe Europe qui se déroule ce samedi, mais je n’y vais pas. Je préfère privilégier l’équipe plutôt que quelque chose qui ne m’apportera rien à l’avenir.
Vous êtes membre du Team Tribu Muscu…
C’est une agence qui me permet d’avoir des petits sponsors. C’est intéressant, mais il faut rester la tête sur les épaules et les pieds sur terre. Ça reste assez aléatoire.
Comment avez-vous connu cet univers?
J’étais coach polyvalent dans une salle de sport à Hesperange et un agent m’a contacté. Il trouvait que j’avais du potentiel. Je suis allé à Lyon pour un shooting test. De fil en aiguille, je suis parti aux États-Unis, à Miami et New York, pour des shootings et je me suis retrouvé dans des revues américaines spécialisées en fitness…
Quelle fut la réaction de la FLVB lorsqu’elle a appris que vous participiez à ce genre d’événement?
Au départ, je n’en ai pas parlé. Ça relève du domaine privé et, un jour, le directeur sportif (NDLR : Burkhard Disch) est allé dire à l’entraîneur : « Tu as vu les photos de Maxime sur son profil Facebook, ouah c’est impressionnant! » Et ça a eu un impact positif car ils ont vu ça comme un atout. Dans leur esprit, quelqu’un qui sait gérer son corps peut gérer celui des autres.
Que ressentez-vous en tant que membre de cette sélection?
Ça fait six mois que je suis là, je suis bien intégré dans l’équipe et je les en remercie, car c’est grâce à eux que je vis des moments extraordinaires au niveau professionnel.
Par quel biais avez-vous intégré la FLVB?
Dieter Scholl connaissait Thomas Nielsen qui gère Coach at Home. Il m’a recommandé et comme je suis titulaire d’une licence de préparation physique et sportive pour sportifs de haut niveau, il m’a choisi.
Il paraît que ce sont les joueurs qui vous ont choisi…
J’ai intégré l’équipe deux semaines avant la Novotel Cup. On a fait trois stages ensemble où j’ai beaucoup insisté sur la sécurité au niveau des mouvements. Ça s’est vraiment très bien passé. Alors, pour répondre à la question, avant de me faire accepter du staff, je devais d’abord l’être de l’équipe. Et je pense que c’est le cas puisqu’après la victoire à la Novotel Cup, je me suis retrouvé tout habillé sous la douche…
Comment avez-vous vécu cette Novotel Cup?
J’étais comme un lion en cage. Le plus gros de mon travail était fait et c’est en compétition qu’on voit s’il a été adéquat ou non.
Votre jeune âge est-il un avantage pour vous intégrer dans la vie du groupe?
Je dois être professionnel tout en étant cool quand il le faut. Mais ça se passe très bien.
Vous travaillez en tant qu’indépendant, mais il semblerait que la FLVB réfléchisse à la possibilité d’une collaboration durable…
C’est ce que j’avais dit à Dieter lors de notre premier rendez-vous : si je venais, ce n’était pas pour rester trois mois, mais apporter une évolution à l’équipe sur le long terme. J’entraîne aussi les juniors et j’ai envie de les voir grandir et prendre la place des anciens. Depuis deux ans, le volley-ball explose et j’ai la chance d’arriver au bon moment et je veux apporter cette dimension psychologique.
Tim Laevaert dit que « c’est facile de suivre les conseils de quelqu’un d’aussi déterminé »…
Ça me touche car Tim est très professionnel. Lui et les autres jouent pour le prestige. Pour le Luxembourg. Ils transpirent le Luxembourg. Alors, entendre ça, forcément, ça me fait très plaisir. Et ce d’autant qu’ils sont de plus en plus dans la compréhension par rapport aux séances qu’on effectue. Et ça, c’est intéressant, car au-delà de l’exercice physique vient s’ajouter une dimension intellectuelle.
On a cru comprendre que vous vouliez leur apporter un peu de muscles…
Il y a le muscle esthétique et le muscle dense. Eux, il leur faut de la densité car un jour ou l’autre, comme on évolue, ils vont tomber sur des équipes extrêmement fortes. Et à ce niveau-là, même si on a la même technique, ce qui va faire la différence, c’est l’aspect physique. Donc prendre du muscle pour gagner en explosivité et gagner en réactivité neuronale. Je leur répète fréquemment cette petite phrase : « Les grandes montagnes sont faites de petites pierres. »
Charles Michel