PRÉPARATION DE LA SAISON Une grande partie de l’équipe nationale s’est retrouvée pour son traditionnel stage de Pâques à Majorque. Où on est passé par toutes les émotions.
C’est devenu une tradition. Un rendez-vous immuable : les triathlètes luxembourgeois commencent toujours leur année par deux stages. En février, c’est à Playitas, du côté de Fuerteventura. Et en avril, on mélange les très jeunes avec les élites et tout ce petit monde se retrouve sur l’île de Majorque, à Colonia de Sant Jordi : «Cela fait des années que je viens ici», explique l’entraîneur national Cyrille Eple. «Il y a un hôtel avec de la bonne bouffe. On est à cinq minutes d’une piscine découverte de 50 m, on a le vélodrome à trente minutes, une piste d’athlétisme. On peut nager en mer. J’aimerais bien trouver un autre endroit. Mais pour les athlètes, il n’y a pas mieux. En février, Playitas, c’est plus cher, car plus loin, mais si on veut de bonnes conditions, il faut aller plus loin. Et en avril, c’est ici, car c’est moins cher et il y a tout», résume-t-il.
C’est donc aux Baléares que le groupe très fourni s’est retrouvé pendant les deux semaines de vacances scolaires. On retrouvait ainsi des élèves du Sportlycée, des jeunes avec déjà une belle expérience internationale et appelés à de grandes choses à l’avenir (les sœurs Krombach, David Lang pour ne citer qu’eux), une Eva Daniëls qui reprend petit à petit l’entraînement ou encore un Gregor Payet venu peaufiner les derniers détails de sa préparation olympique : «L’objectif est de préparer la saison. On a des jeunes de 13-14 ans. Les plus vieux ont une trentaine d’années. L’idée est de transmettre le professionnalisme des grands vers les petits. En avril, on fait un stage où on mélange tout le monde. Ça permet aux petits de voir vers quoi il faut tendre pour atteindre le haut niveau.»
Un drame évité de justesse
C’est donc avec ce casting de colonie de vacances que Cyrille Eple et sa troupe ont pu assister à de belles explications, notamment entre un ancien et un jeune prometteur : «Un matin, Gregor se fait titiller par David en natation. En course à pied, on a fait une séance de 10×1000 et il finit en 2’51″ avec David avec lui. Pour David, on vise à passer rapidement sous les 30 minutes ! On a Mara (Krombach) qui revient, Linda (Krombach) qui confirme. Je suis super content du groupe. Ils font un super boulot», se réjouit le technicien français. «On prépare la saison sereinement. Tout se met en place.»
Mais ce stage idyllique aurait bien pu se terminer en drame. En effet, quelques jours après leur arrivée sur place, Poli Stoffel, parti faire une sortie à vélo, s’est fait renverser par une voiture : «Heureusement, la personne ne roulait pas trop vite. Il a des contusions, des brûlures, il a tapé la tête et le dos et a des apophyses cassées. Il a été très bien pris en charge par les services médicaux ici à Majorque. Il a passé trois jours à l’hôpital et doit porter un corset. Il faut trois semaines pour que ça se reconstruise.»
Mais ce qui fait enrager Cyrille Eple, c’est que le cas de Poli Stoffel est un peu particulier : «Cela fait des mois qu’il a une douleur au pied. On ne sait pas si c’est une fracture de fatigue ou autre chose. Il a passé une IRM à Wiltz. Et le problème, c’est qu’on n’a toujours pas le compte rendu. On n’avait pas de rendez-vous avant le mois de juin. Du coup, on naviguait un peu à vue. Avec ses sensations. Si, dès le début, on nous explique que c’est une fracture de fatigue, on adapte son programme en conséquence. Il ne court pas et on a fait des séances à vélo en l’accompagnant.» Bien sûr, le garçon est majeur et pouvait donc tout à fait faire une sortie à vélo seul. Il n’empêche que cela n’atténue pas l’émotion de Cyrille Eple : «Vous imaginez si on rentre du stage avec un gamin paraplégique…»
Heureusement, plus de peur que de mal. Et d’ici trois semaines, Poli Stoffel pourra reprendre doucement le chemin de l’entraînement. Mais ce cas met en exergue un problème : comme il n’est «que» cadre fédéral et pas cadre du COSL, l’athlète n’est pas prioritaire. C’est pour cette raison que l’IRM a eu lieu à Wiltz et non à Luxembourg, où il n’y avait pas de place avant longtemps. Et que les résultats, eux non plus pas prioritaires, ne peuvent être donnés que plusieurs mois après, vu qu’il y a une forme de centralisation de toutes les données qui concernent la traumatologie.
Un épisode qui conforte Cyrille Eple dans son choix de mettre en place sa propre structure : «On préfère prendre des gens pour leurs compétences plutôt que pour leur nom. À Majorque, on a avec nous Arnaud Vanden Berghe. Un kiné belge qui a fait son stage avec moi. J’ai vu qu’il était bon. Alors je l’ai recruté. Et il est devenu le kiné perso de David, Mara, Linda, Eva et Eléonore (NDLR : Hiller, une Franco-Belge qui s’entraîne avec le groupe depuis deux ans et qui vient d’être sacrée championne de France du duathlon U23 et 4e en élite). Si on doit mettre en place notre propre staff médical, si c’est ce qu’il y a de mieux pour les athlètes, on le fera.»
Objectif créer un groupe international au Luxembourg
Cyrille Eple a de grandes ambitions pour son groupe. Conforté par les discussions qu’il a avec les entraîneurs d’autres nations : «Une fois, je discutais avec un coach au bord du bassin. Il me demande quel est le niveau de mes gamins. Je lui réponds : « ils ne sont pas mauvais ». Et je commence à lui expliquer : David, 5e aux Europe, 6e aux Monde, Mara, championne d’Europe, Linda, 5e aux Europe, Eva, vainqueure d’une Coupe d’Europe, 4e d’une Coupe du monde… Et c’est là où tu te dis que tu as clairement un groupe de ouf. Il faut s’en rendre compte.»
Et c’est toujours avec l’objectif de faire progresser ce groupe, de l’étoffer, que Cyrille Eple nourrit un petit rêve : créer sa propre structure internationale. En clair, au lieu d’envoyer les Luxembourgeois rejoindre des groupes d’entraînement de par le monde, comme ce fut le cas, par exemple, de Bob Haller en Australie ou au Portugal, l’idée est d’attirer des triathlètes d’autres nations pour profiter des conditions d’entraînement au Luxembourg : «On en a parlé avec Gregor. Et avec Raymond (NDLR : Conzemius, le DNT du COSL). Il y a des athlètes qui veulent venir s’entraîner avec nous. On a des Suisses, des Slovaques, des Belges qui m’ont contacté. Ils voient qu’il y a des trucs qui ne marchent pas trop mal au Luxembourg et ils ont envie de nous rejoindre. Le but est que les meilleurs Luxembourgeois puissent avoir des partenaires internationaux de très haut niveau. Pour aller faire un truc. Et le truc, c’est aller chercher des médailles!»
Et de conclure : «Être bon, c’est bien. Mais être très bon, c’est encore mieux. Et pour être très bon, j’ai besoin d’aide. Je suis capable de préparer les athlètes pour être performants. Mais je ne suis ni médecin, ni kiné, ni mécanicien, ni diététicien, ni préparateur mental.»
Jeudi, alors qu’on approche de la fin du stage, le président et le trésorier de la FLTri sont venus rendre visite à toute la petite troupe : «Il faut souligner que si ça marche bien avec Thomas (Andreos) et moi en ce moment, c’est parce qu’on a un conseil d’administration qui nous soutient et qui a confiance en nous. C’est quelque chose de très important de se sentir soutenu.»
En résumé, c’est sereinement que l’équipe se prépare pour les prochaines échéances. Avec, dès ce week-end, une Coupe d’Europe du côté de Melilla, enclave espagnole située au Maroc, où Cyrille Eple verrait bien l’un de ses poulains se mettre en évidence : «Il faudra suivre Théo Marti. Il a terminé au sprint juste derrière David à l’aquathlon, je suis curieux de voir ce qu’il va faire là-bas.»