Jeff Henckels, 37 ans bien sonnés, a renoncé à arrêter. Visiblement, il a bien fait vu sa 2e place au Grand Prix européen de Plovdiv.
L’année 2021 a été celle de la renaissance pour Jeff Henckels. Après une longue période de traitement pour soigner une vilaine blessure à la suite d’une chute à vélo qui lui avait laissé le coude en vrac en 2020, en plein covid, l’archer luxembourgeois avait progressivement repris son arc.
Au fil des séances d’entraînement, les choses allaient de mieux en mieux et il a finalement pu reprendre la compétition en début de saison. Une saison extraordinaire qui lui permettra de décrocher une place pour les JO de Tokyo. Au Japon, ça se passera moyennement bien avec des qualifications en demi-teinte et une élimination sèche au premier tour face au prodige turc Mete Gazoz, futur vainqueur.
Dès lors, la question se posait. À 37 ans, qu’allait faire le désormais triple olympien? Au départ, la tendance était clairement à un arrêt : «J’avais plus ou moins décidé d’arrêter.»
«Regarder année après année»
Seulement c’était compter sans sa compagne, ancienne membre de l’équipe nationale chilienne, qui dirige depuis la rentrée 2021 les entraînements au sein du Guillaume-Tell Strassen : «Je n’allais pas rentrer à la maison me mettre devant la télé. Je ne vais pas rentrer sans elle. Du coup, comme je suis là, je peux tirer.» Et chassez le naturel, le compétiteur revient au galop : «Et si je peux tirer, je peux faire des compétitions.»
Alors qu’il s’imaginait à la retraite, Jeff Henckels pense désormais ouvertement aux plus grandes échéances. À commencer, bien sûr, par Paris, qui arrive dans à peine deux ans : «Je n’ai plus vingt ans. Donc, je ne vais pas dire que je vais continuer trois, cinq ou huit ans. Je dois regarder année après année. Maintenant mon niveau est le même que l’année dernière et si ça marche comme ça semble être le cas cette année, pourquoi ne pas viser Paris», rêve-t-il à voix haute.
Mais avant Paris, dont la qualification devrait commencer aux championnats du monde à Berlin l’an prochain, il y a quelques rendez-vous. À commencer par les championnats d’Europe, qui se tiendront à Munich du 6 au 12 juin prochain. Une compétition qui délivrera des tickets pour les prochains Jeux européens, à Cracovie, en Pologne, en 2023 : «Ce serait sympa d’y aller», savoure d’avance le compétiteur.
À Plovdiv, la hantise de la 4e place
Si Jeff Henckels se montre aussi enthousiaste, c’est parce qu’il se connaît. Et il sait que son niveau peut lui permettre d’atteindre cet objectif. Il a pu le démontrer en Bulgarie la semaine dernière, après une première compétition décevante quelques semaines plus tôt à Antalya : «Avant la compétition en Turquie, je n’avais pas de super sensations et le résultat n’était pas surprenant. Mais après, c’est progressivement revenu. Et hormis un petit souci à l’épaule, c’était bon.»
Effectivement, la semaine à Plovdiv s’est bien mieux passée. Septième des qualifs, il avait franchi sans encombre les obstacles qui se dressaient devant lui jusqu’à atteindre le dernier carré, qui s’est disputé samedi. Face à lui, le ressortissant des îles Vierges, Nicholas D’Amour, ancien n° 4 mondial qui pointe actuellement au 10e rang de la hiérarchie internationale.
Le moins que l’on puisse dire, c’est que Jeff Henckels ne partait pas hyper confiant : «Le matin, j’avais les pulsations à presque 160. En fait, je ne voulais surtout pas terminer quatrième, ça aurait été moche. Comme je me doutais que j’allais perdre contre Nicholas, j’étais déjà en train de me dire qu’il allait falloir que je me donne à fond pour éviter cette quatrième place.»
Pourtant, c’est bien le Luxembourgeois qui prendra le meilleur sur un adversaire qu’il estime «plus fort que (lui)». Retour à l’hôtel, repas, repos. Et ensuite, la finale face au jeune Néerlandais Willem Bakker, en fin d’après-midi.
Munich, Paris, Medellin, une saison très courte
Sur le papier, Jeff Henckels paraissait avoir les faveurs du pronostic, même si son rival s’était offert le scalp du champion olympique Mete Gazoz plus tôt dans la semaine. Et l’archer grand-ducal ne va jamais trouver son rythme : «Honnêtement, c’était mon pire match de toute la semaine. Le niveau n’était vraiment pas bon, de part et d’autre. Sur 16 flèches, je dois en tirer 10 super mauvaises. Et malgré tout, ça se termine en shoot-off.»
En clair, malgré une piètre prestation, il parvient à faire jeu égal avec son adversaire et tout le monde s’explique en barrage, sur une flèche. Henckels fait un 9, le Néerlandais un 10, c’est lui qui prend l’or : «Forcément je suis un peu déçu car c’était vraiment faisable. Mais en finale j’ai vraiment tiré de la m…», avoue-t-il avec son franc-parler habituel. Son résultat lui permet en tout cas de faire une progression spectaculaire au ranking mondial : «Je suis passé de la 60e à la 28e place», se réjouit-il.
Contrairement à Pit Klein, Mariya Shkolna et Arnaud Hocevar, on ne le retrouvera pas la semaine prochaine en Corée du Sud. Il préfère en effet se préparer tranquillement pour les championnats d’Europe de Munich, qui se profilent rapidement à l’horizon.
Ensuite, il se rendra sur la Coupe du monde de Paris (21-26 juin) puis celle de Medellin (18-24 juillet). Et après, la saison sera presque déjà terminée. Il sera temps pour lui de se projeter vers la suite. Et le début de la qualification pour Paris!