L’Open d’Australie, un des quatre tournois du grand chelem, est censé débuter lundi à Melbourne en pleine crise des feux de forêts en Australie qui ont provoqué la mort d’au moins 27 personnes et un milliard d’animaux. La pollution atmosphérique toxique a assombri la ville mardi, interrompant les séances d’entraînement et retardant légèrement les qualifications. Quels dangers planent sur le tournoi et la santé des joueurs ?
Quels sont les dangers ?
La pollution de l’air est la principale menace pesant sur le premier tournoi majeur de la saison. La fumée dégagée par les incendies monstres, couplée aux très fortes températures de l’été australien, pourraient avoir un impact sur la santé des joueurs et des spectateurs.
Les autorités de Melbourne ont qualifié le niveau de pollution de l’air de « dangereux » et ont demandé aux habitants de rester cloitrés chez eux, vitres fermées, avec leurs animaux domestiques.
La Slovène Dalila Jakupovic a dû abandonner mardi au premier tour des qualifications, souffrant de quintes de toux sur le court.
«J’ai vraiment eu peur de m’évanouir (…) Ce n’est pas sain pour nous» de jouer dans ces conditions, a déclaré la 180e joueuse mondiale.
Le directeur de l’Open d’Australie, Craig Tiley, a jusqu’aujourd’hui toujours répété qu’il s’attendait à ce que le tournoi se déroule comme prévu.
La situation peut-elle empirer ?
Les feux à l’est de Melbourne risquent de brûler tout au long du tournoi en dégageant toujours plus d’épaisses fumées. «Tout va dépendre des vents, a déclaré Christine Jenkins, professeur en médecine respiratoire à l’Université de Nouvelle-Galles du sud à Sydney. Allons-nous avoir de nouvelles périodes de forte pollution ? La question reste ouverte».
Mardi, les contrôleurs de la qualité de l’air ont enregistré une pollution 20 fois supérieure aux niveaux de sécurité dans certaines parties de Melbourne. Mandy Minella a de son côté posté sur twitter les résultats d’une application mesurant la qualité de l’air mais aussi une photo de Melbourne vue depuis sa chambre d’hôtel.
Shocked to see that qualifying matches have started @AustralianOpen
What about the health of all the people that have to work out there, especially the ballkids? #wherearethelimits? pic.twitter.com/2oldEptT2g— mandy minella (@mandyminella) January 14, 2020
Quels sont les risques pour la santé ?
La pollution «augmente les risques de symptômes respiratoires mais aussi de problèmes cardiovasculaires, d’irritations oculaires et de troubles mentaux», a prévenu le professeur Yuming Guo, chef du service de recherches sur le climat et la qualité de l’air à l’université Monash de Melbourne. «Cela peut avoir une influence sur la performance des joueurs».
«Une bonne hydratation permet d’éviter un dessèchement des membranes respiratoires et de ralentir des irritations», rappelle aussi le professeur Jenkins. Ce genre de réaction suscite le sarcasme de Gilles Simon sur Twitter.
Quand on trouve des médecins qui affirment que jouer par 45 degrés n’est pas dangereux à l’AO et des juges arbitres qui affirment que l’herbe mouillée n’est pas glissante à Wimbledon, on doit bien pouvoir trouver un expert qui certifie que la qualité de l’air est suffisante non ?
— Gilles SIMON (@GillesSimon84) January 14, 2020
Comment les joueurs sont-ils protégés ?
Des experts en météorologie et en qualité de l’air seront sur place au Melbourne Park pour surveiller la pollution. A la moindre alerte sera mis en application le même système que pour les très fortes chaleurs, avec la suspension immédiate des matchs.
En outre, le complexe où se déroule l’Open d’Australie dispose de trois courts dotés d’un toit rétractable ainsi que de huit courts en indoor qui seraient de fait moins touchés par une pollution atmosphérique.
L’Open d’Australie risque-t-il d’être annulé ?
Très peu probable. Même si la pollution de l’air augmente fortement, les organisateurs auront du mal à se résoudre à annuler l’un des principaux événements sportifs de l’année en Australie, un des quatre tournois majeurs de la saison avec l’US Open, Roland Garros et Wimbledon.
S’ils devaient néanmoins s’y résoudre, il n’y aurait pas de problème financier, le tournoi étant protégé par des compagnies d’assurance, selon la presse australienne.
Le professeur Guo estime cependant que les organisateurs devraient prendre la décision «de reporter ou d’annuler le tournoi si la pollution de l’air reste élevée».
«Les gens qui jouent ou qui s’entraînent sont plus affectés que les autres par la pollution de l’air parce qu’ils inhalent profondément et forcent ainsi l’air à entrer au plus profond de leur système respiratoire où les pollutions s’accumulent et demeurent plus longtemps», a-t-il expliqué.
D’autres événements ont-ils été impactés ?
Le mois dernier, la pollution de l’air a empêché la tenue de deux compétitions sportives, également par manque de visibilité: une course à la voile dans la baie de Sydney et un match de cricket à Canberra.
En novembre, le Rallye d’Australie, dernière étape du Championnat du Monde des Rallyes de la FIA, a été annulé. Lors de l’Open de golf d’Australie à Sydney le mois dernier, les joueurs se sont plaints d’avoir les yeux qui piquent et le champion 2015 Matt Jones a déclaré que les conditions étaient parmi les pires qu’il ait jamais rencontrées.
Mais la plupart des rencontres sportives ont eu lieu. L’Australie a joué des matchs de cricket contre la Nouvelle-Zélande à Melbourne et à Sydney. Et durant 10 jours s’est tenu l’ATP Cup à Sydney, Brisbane et Perth sans problèmes sérieux.
Et cette semaine, en cyclisme, Le Tour Down Under féminin va débuter (16-19 janvier) avant que les hommes ne prennent le relais la semaine suivante (21-26 janvier). Ces épreuves étant disputées autour d’Adélaïde, elles ne seraient pas impactées. D’ailleurs, sur place depuis une quinzaine de jours (le Luxembourgeois Ben Gastauer les a rejoint depuis samedi), le Français Romain Bardet et ses deux coéquipiers, Clément Chevrier et Axel Domont, n’ont pas été vraiment gênés par les incendies et la fumée dégagée par les gigantesques brasiers: «Les conséquences des incendies sont très modérées par rapport à d’autres territoires notamment à l’est. Les feux ont été complètement maîtrisés. Il n’y a aucune contre-indication dans la région où l’on roule, contrairement à ce qui a pu se passer à Sydney ou à Melbourne.»