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[Tennis de table] Luka Mladenovic : « Mon titre ? Mes parents ne l’ont pas vu, ils étaient au ski »


En pleine confiance, Luka Mladenovic n'a perdu que six manches au cours des six matches disputés lors du tableau en simple. (photo JJ Patricola)

Du haut de ses 19 ans, Luka Mladenovic a remporté, dimanche, contre toute attente le titre de champion national individuel. Pas de quoi lui faire perdre la tête pour autant.

Non, le tennis de table luxembourgeois ne se résume plus simplement au duel entre Gilles Michely et Traian Ciociu, douze titres à eux deux.Dimanche, en voyant le second faire chuter le tenant du titre en demi-finale, Luka Mladenovic s’est dit que c’était peut-être le jour d’apporter un peu de sang neuf au palmarès national.

Le Quotidien : Dans notre édition de vendredi, Gilles Michely dressait les forces et les faiblesses de ses cinq principaux concurrents dans la course au titre de champion national. Et vous n’en faisiez pas partie…

Luka Mladenovic : Oui, j’ai vu l’article…

Ça vous a énervé?

(Il rit) Non, pas du tout. De toute façon, je ne pensais pas avoir de chance de gagner. Mon objectif, c’était peut-être d’aller en demi-finale, de gagner une médaille. Mais je savais que si je rencontrais Eric (Glod), normalement, je n’avais aucune chance. Le grand objectif était donc de battre Christian (Kill) en quarts.

Vous aviez analysé le tableau…

Oui et non. Mais bon, au 1 er  tour contre Ademir (Balaban), j’étais mené 3-2 et l’aventure aurait pu s’arrêter là.

Comment qualifieriez-vous ce week-end?

Samedi matin, je me suis levé à 7  h car je jouais le double mixte avec ma copine (Jil Reimen). J’ai passé ma journée dans la salle, j’en ressortais uniquement avant chacun de mes matches pour prendre un peu d’air frais… Ce fut une journée très longue qui s’est terminée à 21  h après la victoire en demi-finale du double aux côtés d’Eric (Thillen) face à (Gilles) Michely et (Mike) Bast. Je suis rentré à la maison à 22  h, j’ai mangé, pris une douche et je me suis couché.

Dimanche matin, je suis arrivé le premier à la Coque. Je me suis échauffé avec Eric Glod. Je me sentais bien et, contre Kill, je ne dis pas que j’ai fait mon plus mauvais match, mais je ne bougeais pas très bien. Il menait 3-2 et je pensais qu’il savait quelle tactique adopter… Je me voyais perdre ce match. Mais, finalement, je l’emporte et là toute la pression est retombée. J’avais atteint mon but. Dans la foulée, contre Eric et Traian, je sentais bien la balle, j’anticipais le jeu adverse, j’étais agressif. J’ai joué les deux meilleurs matches de ma vie.

Contre Eric Glod, vous aviez jusqu’ici perdu lors de votre unique confrontation…

Oh oui! C’était lors du Grand Prix. Je crois que je n’avais pas inscrit onze points sur l’ensemble des quatre sets! Mais là, je n’avais rien à perdre : je savais que si je jouais trop facile, il allait me détruire… Il me fallait faire mon match. Être agressif. Et ça a très bien marché. Faut dire aussi que j’ai eu un peu de chance. Dans le deuxième ou le troisième set, j’ai eu quelques balles let en ma faveur…

À quel moment vous êtes-vous dit que vous pouviez remporter ce titre de champion?

(Il rit) Lorsque Traian (Ciociu) a battu Michely. Contre Traian, que j’avais battu l’an dernier en quart de finale du Grand Prix, je savais que ce serait très difficile car c’est toujours spécial. Il est concentré sur chaque balle et puis, il était là pour gagner son neuvième titre. Mais je savais que c’était plus ouvert même si les trois premiers sets, je les gagne sur le plus petit écart. Je ne pensais à rien, je lâchais mes coups.

Qu’avez-vous ressenti au moment de votre succès?

Je ne contrôlais plus mes émotions. Je pleurais de joie. Ce succès, obtenu avec mon pote Eric Thillen qui faisait mon entraîneur, je ne risque pas de l’oublier. Avec Eric, on se connaît très bien et, à chaque fois que je me tournais vers lui, il me donnait de cette confiance dont j’avais besoin. Il me répétait  : « Tu peux le faire! »

Que vous a dit Traian?

C’est un gentleman. Il est venu, m’a embrassé en me disant que j’avais très bien joué et que je méritais cette victoire.

Ça a dû vous toucher…

Oui, parce qu’on se connaît très bien. Parfois, le jeudi, on s’entraîne ensemble à la Coque. Lors des Mondiaux, l’an passé, il me donnait des conseils. Plus Gilles (Michely) que Traian, mais quand même.

Gilles vous a-t-il donné des conseils avant cette finale contre Ciociu?

Non. Par contre, il m’a félicité après en me disant que j’avais très bien joué, mais que j’avais eu de la chance qu’il se fasse sortir en demi-finale…

C’est aussi votre avis?

Oui. Contre lui, je pense que le résultat aurait été inversé…

On sent beaucoup d’admiration pour Michely. Que représente-t-il à vos yeux?

Gilles est une légende du tennis de table. Ce n’est pas mon idole, mais quand même. C’est un mec léger, cool, très ouvert avec qui tu peux vraiment rire.

Sur Facebook, il a écrit que votre succès lui faisait penser au sien, en 2006, alors qu’il n’était âgé que de 16 ans…

J’étais très content de lire ça, mais je ne vais pas commencer à me comparer à Gilles Michely, lui, c’est une légende. Plus jeune, il faisait quand même partie du top 10 européen de sa catégorie d’âge.

Quelle a été la réaction de vos parents?

Ils n’ont pas vu la compétition, ils étaient au ski, en France. Mais, très vite, ils ont appris la nouvelle. Et quand je les ai eus au téléphone, ma mère pleurait de joie.

Partagent-ils également votre passion pour le tennis de table?

Non, pas du tout. Ma mère est plutôt antisport tandis que mon père, lui, est violoniste. Ma sœur et moi, on a essayé, mais ce n’est pas notre truc.

Cette saison, après la Coupe de Luxembourg gagnée contre Dudelange, vous venez donc de décrocher le titre de champion individuel. Quel est le prochain objectif, le titre de champion par équipe?

La saison prochaine, je vais peut-être jouer en Allemagne (NDLR  : il pourrait prendre la direction de Grenzau ou de Mayence) et je voulais quitter Ettelbruck sur un succès.

Aimeriez-vous rencontrer Michely lors de la finale du championnat?

Je pourrais le rencontrer si on décide de changer l’ordre des joueurs, mais je ne suis pas sûr que ce soit une option. Et puis, je ne suis pas certain d’en avoir vraiment envie (il rit)

Comment voyez-vous votre avenir?

Il me reste encore deux années d’études avant de passer mon bac. Après ça, j’aimerais intégrer le cadre des sportifs d’élite de l’armée et m’orienter vers une carrière de joueur professionnel. Suivre un peu l’exemple de Sarah De Nutte. À ce moment-là, j’aurai donc plus de temps pour disputer des tournois internationaux.

Au fait, à en croire votre profil Facebook, vous résidez en Jamaïque et êtes originaire de New York…

(Il rit) C’est à cause de ma mère! Mon compte, je l’ai ouvert quand j’avais 10 ou 11  ans et elle ne voulait pas absolument pas que je mette le lieu où j’habite. Du coup, j’ai mis n’importe quoi…

Charles Michel