Titulaire du diplôme UEFA Pro, l’ancien coach de Virton, de la Jeunesse d’Esch et du F91 Dudelange, notamment, nous apporte son éclairage technique sur les matches qui comptent.
«Ce que tout le monde a pu voir contre le Portugal, c’est une première mi-temps homogène, avec de l’agressivité faite de pressing, de récupérations de balle, de belles projections qui ont fait mal au Portugal. Les Lusitaniens, d’ailleurs, ils ont débarqué avec un coach bien plus conscient que ses joueurs de la force de l’adversaire.
Mais ses garçons, dans la concentration défensive – et offensive aussi d’ailleurs -, ont été très mauvais. Ils peuvent s’estimer heureux de revenir à 1-1 juste avant la pause. Cela leur a permis de revenir en mettant un peu plus de pression et surtout, en profitant de la débauche d’efforts réalisés en Irlande quelques jours plus tôt. Cela a eu un impact énorme.
On a bien vu qu’avoir deux matches comme ça, à très haute intensité en aussi peu de temps, c’est dur à suivre pour des garçons qui n’ont pas cette habitude, alors que pour les Portugais, c’est leur pain quotidien. L’entrejeu, Leandro Barreiro et Christopher Martins, ont proposé un volume de courses énorme à Dublin et ils n’ont pas pu faire tout le match face au Portugal sur cette débauche d’efforts. Et c’est normal.
Un Gerson hyper-motivé et plus humble
Mais c’est important de le signaler : le Portugal n’a pas fait une différence ni collective ni en termes d’individualités. Il l’a faite physiquement et exclusivement physiquement.
Parlons de l’organisation offensive. Quand on excentre un Olivier Thill (NDLR : il a joué dans le couloir gauche), son rendement baisse de 50 %. C’est un vrai 8, un box-to-box qui aime courir entre les lignes. Et c’est un peu la même chose qui s’est reproduite avec son remplacement en deuxième période par Maurice Deville, qui ne sera à mon avis jamais un ailier. Ni droit ni gauche.
Ce que j’aurais aimé, personnellement, et ce n’est pas une critique, mais juste une interrogation, c’est de le voir en pointe, peser sur les centraux portugais avec un Gerson Rodrigues qui aurait pu venir de la deuxième ligne, en tournant autour de lui, en perforation. Puisqu’on parle de Gerson, je l’ai trouvé hyper-motivé et plus humble que sur ses prestations de la fin d’année 2020. Je suis content de le voir dans cet état d’esprit. Là, il s’est mis au service du collectif et il en est récompensé.
Avec Sinani, la pression retombe sur Barreiro
Mais revenons à l’organisation offensive. Puisqu’il y a eu le choix d’un Sinani en faux neuf, ou en faux dix, comme on veut. Quand cela a commencé à être plus dur pour les Roud Léiwen, alors Sinani est un peu trop absent et toute la pression retombe sur Barreiro, qui est seul au pressing. C’est un peu cela aussi, qui a coulé l’entrejeu.
J’aurais peut-être préféré voir plus tôt un Sébastien Thill, quitte à laisser la pointe un peu plus seule. Parce que «Séba», on a vu à son entrée en jeu qu’il est en forme. Il demande le ballon, il a de la vista dans le jeu court, dans le jeu long, propose beaucoup de mouvement. Physiquement et mentalement, il est au top. J’ai vraiment très envie de voir les trois Thill ensemble à l’occasion, même si Vincent me semble encore, lui, un peu court physiquement.
Je voudrais terminer avec Anthony Moris. C’est une évidence, ce garçon est un gardien de D1/A belge! Il vient d’être champion avec Virton puis avec l’Union et on ne devient pas champion sans un grand gardien.
S’il n’est pas là contre le Qatar, la défaite se fait sur un score plus élevé, s’il n’est pas là en Irlande, je ne pense pas qu’on parle de victoire et je pense qu’il gardera longtemps en tête son un contre un remporté contre Cristiano Ronaldo, en deux temps qui plus est. Combien de gardiens au monde sont actuellement capables de sortir gagnant d’un duel contre CR7?»
Sébastien Grandjean