Le milieu de terrain a couru 75,3 kilomètres en six matches, dans la phase de groupes de Ligue des champions. C’est de très loin le plus gros total de toute l’Europe.
«Cela va faire du bien de couper un mois. Le corps sera content de se reposer.» Encore un match de championnat à honorer de sa présence, contre le Zimbru Chisinau et Sébastien Thill en aura fini de son année 2021.
Il aura alors pris part à la bagatelle de… 62 matches en dix mois de compétition(s), avec une minuscule coupure de trois jours de vacances durant l’été et la bagatelle de 37 matches joués depuis début juillet. Et surtout, il abordera Noël avec le sentiment du devoir accompli en Ligue des champions.
L’UEFA publie ainsi cette statistique hallucinante : l’ancien capitaine niederkornois est l’homme qui, en C1, a le plus couru avec 75,3 kilomètres parcourus sur les six matches du groupe D, soit 12,55 km en moyenne par rencontre.
L’information n’a pas l’air de le bouleverser. «Séba» en avait déjà pris conscience plus tôt dans la campagne. «À un moment, Joshua Kimmich n’était pas loin, mais il a raté un match. En même temps, on n’avait pas souvent le ballon dans ce groupe alors il était normal qu’on court après.»
Après tout, cette statistique folle ne dit pas autre chose que son investissement à boucher des trous (plus qu’à récupérer des ballons puisque dans ce domaine, seuls ses défenseurs apparaissent dans le top 150) et à se porter vers l’avant pour être décisif.
D’ailleurs mardi soir, à Kiev, Thill est à l’avant-dernière passe – un centre court intelligent par-dessus la défense du Shakhtar – sur l’égalisation des arrêts de jeu. Il termine avec deux buts et une passe décisive, soit un investissement de 43 % dans les sept buts de son équipe.
6,6 km de plus que Vanaken, le deuxième
Efficace jusqu’au bout, donc, Sébastien Thill faisait aussi partie d’une caste très fermée avant que ne se jouent les huit derniers matches de la phase de groupes, disputés mardi : seuls treize joueurs de champ – dont cinq du Sheriff – avaient disputé l’intégralité des six rencontres. Soit 540 minutes.
Mais c’est bien son kilométrage qui bouleverse les critères de l’engagement. Avant le coup d’envoi des dernières rencontres, mardi, il avait couru 6,6 kilomètres de plus que son plus proche concurrent, le milieu de terrain de Bruges Hans Vanaken, qui lui non plus n’évoluait pourtant pas dans une équipe basée sur la possession de balle.
Dans un groupe comprenant Manchester City, le Paris Saint-Germain et Leipzig, forcément, c’était difficile. 6,6 km, c’est comme si «Séba» avait joué une mi-temps de plus que son homologue belge. Et il était peu probable que De Jong (FC Barcelone, 56,8 km), Arnold (Wolfsbourg, 56,7) ou David (Lille, 53,2), mardi soir, aient pu s’approcher beaucoup plus près. Ou alors de très peu.
Le Roude Léiw est donc une anomalie. À titre d’exemple, Leandro Barreiro, souvent cité à titre d’exemple en sélection nationale, émarge en Bundesliga à 11,97 kilomètres parcourus en moyenne. La perte de ces fameux sept kilos dont Sébastien parlait en début de campagne, n’explique pas tout. Il y a, derrière tout ça, un boulot dingue.
Et c’est ce qu’il va falloir continuer à faire cet hiver. Ce mois de vacances, qui sera rythmé par le tirage au sort de la C3, le 13 décembre, Thill a promis de ne pas l’utiliser que pour se retaper, mais bien pour préparer la suite et notamment les barrages de l’Europa League, fin février.
«Déjà, je ne pense pas que la période des fêtes sera trop dangereuse, sourit-il, car je ne vais pas rester trop longtemps au Luxembourg. Je vais plutôt bouger pas mal. Et puis j’aime faire du sport, même au-delà du programme qu’on nous donnera en club.»
Puis en janvier, après une dizaine de jours à Tiraspol, le club devrait s’envoler pour deux semaines en Espagne et commencer à enchaîner des amicaux à haut niveau «ou ce sera compliqué d’aborder les matches d’Europa League sans rythme».
«Tu te dis que tu es à ta place»
Reste qu’outre ce record hallucinant et son exposition médiatique planétaire après son magnifique but victorieux au Bernabeu contre le Real Madrid (1-2), le Rodangeois s’est acheté des souvenirs qui vont au-delà de ses accomplissements personnels et qui vont forcément bientôt accoucher d’une réflexion très personnelle sur l’avenir :
«On est tous tristes que ce soit fini, la Ligue des champions. J’ai très envie de la rejouer très vite. Pour le Sheriff, c’est dur de s’installer à un tel niveau parce qu’il faut passer quatre tours pour y parvenir et ce club fait partie de ceux qui ne savent jamais quelle équipe ils pourront aligner tant il y a de départs et d’arrivées d’une saison sur l’autre. Mais quand tu vois qu’on fait plus de points que Porto, Milan ou le Besiktas, tu te dis que tu es à ta place.»
La question de la place de Sébastien Thill, cet hiver ou l’été prochain, se posera forcément. Si le Sheriff ne peut pas lui garantir chaque année ce genre de grand-messe, il faudra sans doute envisager, comme Gerson Rodrigues l’avait fait avant lui, d’explorer d’autres horizons. Et ce ne sont pas les kilomètres à parcourir qui l’effraient.
Julien Mollereau
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