Les Roud Léiwen affrontent, ce samedi (18 h) au stade de Luxembourg, la République tchèque pour leur deuxième match en Conférence 1 Nord. Le premier avec Michel Frachat, leur sélectionneur, sur le banc.
La route est longue. Au propre comme au figuré. Quelque huit cents bornes séparent Aurillac du Grand-Duché. C’est là-bas, dans le Cantal, que la fédération luxembourgeoise est allée chercher le remplaçant de Jonathan Flynn, dont le contrat n’a pas été reconduit par une fédération présidée, depuis juillet dernier, par Jean-François Boulot, successeur de Steve Karier. Le nom du nouveau patron du XV du Luxembourg? Michel Frachat.
Âgé de 55 ans, cet ancien troisième ligne dont la carrière l’aura mené jusqu’en Fédérale 2, a rejoint en juillet 2020 l’équipe Espoirs du Stade Aurillacois où il est chargé de l’entraînement des arrières. Ancien joueur de Nice, Aix-en-Provence et Suresnes, il a occupé ensuite différents postes (manager de groupe espoirs et de centre de formation, analyste vidéo ou encore directeur sportif) du côté de Provence Rugby, Annecy et Soyaux Angoulême. L’homme ne craint pas les voyages. «Je suis vorace et gourmand dans le travail», déclare-t-il. Le technicien, qui n’est pas salarié de la FLR, mais perçoit, dit-il, des «indemnités», verra son contrat avec Aurillac arriver à son terme en juin prochain. Le 21 octobre dernier, il publie sur sa page Facebook un post. Il s’y félicite tout d’abord du très bon début de saison «à tout point de vue» des Espoirs d’Aurillac (NDLR : deuxième à un point de Bègles-Bordeaux, le leader), puis celui qui nous précise vouloir «vivre de (son) métier le plus longtemps possible» y envoie une bouteille à la mer : «Je suis déjà à l’écoute et aimerais fixer mon avenir en début d’année prochaine max. En recherche d’un projet solide, en tant que manager et/ou entraîneur. Avec responsabilités. Donc n’hésitez pas à partager, faire passer le mot.» C’est fait.
Les mots, justement, doivent servir à fluidifier la communication d’une fédération désireuse de gagner en visibilité, mais aussi, sur le terrain, le jeu d’une équipe en quête de repères. Pour remédier à cela et avec son âme de formateur, Michel Frachat a constitué un lexique. «Une dizaine de mots qui permettent aux joueurs de se comprendre entre eux dans le feu de l’action, en phase tant défensive qu’offensive. À cela s’ajoute encore des codes stratégiques.» Histoire de permettre à des gaillards venus d’horizons différents de parler la même langue et, in fine, de s’approprier une culture amenée par un staff francophone dont la vision du jeu diffère quelque peu de celle prodiguée sous l’ère du Britannique Jonathan Flynn, parti depuis au RC Metz.
Le 23 octobre, en match d’ouverture de la Conférence 1 Nord, le Luxembourg s’incline en Suède (51-5) face à une équipe «revancharde», comme le jugera après coup Alexandre Benedetti, le DTN, témoin le 2 novembre 2019 du succès des Roud Léiwen à Malmö (0-13). Ce jour-là, Michel Frachat n’est pas sur le banc du XV du Luxembourg, dont il a laissé les rênes à son adjoint, Fabien Guillot. En raison de sa double casquette, il a l’esprit – et le corps – ailleurs. À Toulon où il mène ses Espoirs au succès (5-40). Frachat fera donc officiellement ses débuts à la tête de l’équipe nationale ce samedi face à la République tchèque. Au détriment cette fois d’Aurillac, en déplacement à Castres. «La situation, constate-t-il, nécessite des compromis des deux côtés.»
Multiplier le plus possible les passes, car c’est se donner une chance d’exister
Avec perte, mais sans Frachat donc. La gifle reçue en Suède ne fait pas perdre l’esprit à un sélectionneur désireux de remettre les choses dans leur contexte : «Après deux ans sans match international, il ne fallait pas s’attendre à un miracle. Maintenant, sans quelques erreurs, le score aurait pu être moins lourd. Cela étant, au vu de leur attitude, je vois que les joueurs ont adhéré au projet. Et ça, ça fait vraiment plaisir, car ça reste l’essentiel.» La base de ce «projet» réside, assure-t-il, dans le plaisir.
Invité par Rugby Europe quelques minutes avant le coup d’envoi à Norköpping à s’exprimer sur cette sélection du Luxembourg, Alexandre Benedetti ne disait pas le contraire : «L’équipe n’est pas très forte, les joueurs ne sont pas très forts, mais on veut prendre du plaisir.» Au béotien qui peut s’interroger sur le plaisir pris lors d’une telle défaite, Michel Frachat apporte une réponse de puriste et prône la libre circulation du ballon : «On ne veut pas vendre du rêve. C’est un chantier énorme et de longue haleine. Ce que je demande aux garçons, déjà, c’est de multiplier le plus possible les passes, car c’est se donner des chances d’exister.» Ce samedi, face aux Tchèques, Guillaume Kimmel et les siens devront se montrer particulièrement habiles de leurs pognes si la neige venait, comme c’est attendu, à s’inviter pour leur baptême du feu au stade de Luxembourg.
Charles Michel