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Philipp : «le football luxembourgeois a grandi»


Le président de la FLF met beaucoup d'espoir dans la génération de footballeurs actuels (Photo : Didier Sylvestre)

Paul Philipp, le président de la Fédération luxembourgeoise de football (FLF) espère que les Roud Léiwen commenceront 2018 en force, avec le match amical contre Malte jeudi soir, et les persectives de la Nations League dans  six mois.

2018 une année aussi belle que 2017?
Paul Philipp : C’est vrai que l’année 2017 restera exceptionnelle et pas que pour le match nul de Toulouse et même s’il y a une tache noire (NDLR : la défaite 8-0 en Suède) dont on ne reparlera plus. Mais l’année 2018 reste à confirmer. Parce qu’elle a beau avoir été fantastique, elle reste aussi pleine de promesses quand on regarde la moyenne d’âge des garçons qui l’ont disputée. 2017, ce n’est pas la fin d’une histoire. Plutôt le début. Le Luxembourg a grandi et il est en route pour prouver que ce n’est pas un hasard. En plus, 2018, c’est une année spéciale avec cette nouvelle compétition que tout le monde va découvrir.
Vous donnez l’impression, depuis quelques mois, de vous être déjà bien projeté dans cette compétition…
Tout le problème, c’est de savoir comment nous allons la gérer. Contre Saint-Marin, nous devons prendre tous les points, mais c’est sûrement la Moldavie, en ouverture, qui sera le match le plus important. Sans mettre trop la pression, c’est LE match à ne pas rater. On n’est pas trop habitués à aborder une compétition comme ça et heureusement, aucun de nos adversaires ne l’est vraiment non plus. C’est une approche nouvelle pour tout le monde.
Tout le pays imagine vaguement les Roud Léiwen se battre pour la première place. Vous vous étiez déjà imaginé, dans le passé, à quoi ressemblerait une sélection luxembourgeoise dans ce cas de figure?
Non, parce que c’est déjà assez difficile d’y croire aujourd’hui. On a un bon groupe, il ne faut pas le nier. Qualitativement et quantitativement, l’un des meilleurs qui aient jamais existé dans ce pays. Pourtant, dans cette Nations League, il n’y a qu’une place à l’Euro pour 16 équipes. Alors ce n’est pas dur de penser à l’enjeu, mais c’est plus dur de se dire que cette possibilité existe. On ne parle même pas de la qualification : se battre pour la première place d’un groupe, le Grand-Duché n’a jamais eu à gérer ça. Il faudra que les joueurs et le coach soient solides.
Pas le conseil d’administration de la FLF? N’avez-vous pas le devoir d’impulser un mot d’ordre qui serait d’y croire et même d’avoir les demi-finales de la compétition comme objectif?
Notre devoir à nous, ce sera effectivement de les mettre dans les meilleures conditions possibles. On a déjà trouvé quatre dates de matches amicaux, dont la Géorgie, qui pourrait bien ressembler à la Moldavie, notre premier adversaire. Après, dans cette compétition ramassée sur deux mois seulement, cela va être très intense et j’espère que ça le restera jusqu’au bout : ça voudra dire qu’on n’a pas raté les grands débuts.

«Quand je passe dans le bureau de Luc Holtz, il a tout sur son ordinateur...» (Photo Jeff Lahr)

«Quand je passe dans le bureau de Luc Holtz, il a tout sur son ordinateur…» (Photo Jeff Lahr)

 
Les Roud Léiwen se déplacent à Malte avec l’impérieuse nécessité de commencer à prendre leurs responsabilités dans le jeu et les résultats. La fameuse génération 95 aurait-elle pu le faire si elle avait été placée dans ces conditions?
Difficile à dire. Il aurait fallu changer de mentalité. Et cela lui aurait peut-être été moins facile que cette génération. En 1995, on dépendait quand même beaucoup de deux ou trois individualités : Guy Hellers, Roby Langers… Pourtant, c’était des gagnants sur le terrain. L’appétit, en 1995, était venu en mangeant. Et d’ailleurs, c’était à Malte que tout était parti (lire ci-dessous)…
Comment prépareriez-vous, personnellement, une telle campagne en tant que sélectionneur?
Je regarde encore nos adversaires avant chaque match. Oh, moins qu’avant et surtout, je ne communique jamais avec le staff. Je me refuse à faire quelque chose que je n’aurais jamais voulu qu’on fasse avec moi dans le temps. Mais je regarde par exemple les pedigrees de chaque joueur adverse. Des infos faciles à trouver maintenant grâce à internet, alors qu’avant, il fallait reconstituer le puzzle morceau par morceau. Après, si trouver les informations est facile, encore faut-il réussir à en faire quelque chose. C’est ce que me disait mon guide spirituel, le Belge Guy Thys, avec qui je faisais beaucoup de kilomètres et supervisais beaucoup d’adversaires puisque nous étions souvent dans le même groupe de qualifications, dans le temps : « Voilà Paul, maintenant, on sait comment ils jouent! ». Oui, et nous? Maintenant, quand je passe dans le bureau de Luc Holtz, il a tout sur son ordinateur, les matches, les statistiques… Ça aide pour s’adapter. Même si moi, on m’a toujours reproché de trop m’adapter à l’adversaire. Holtz moins.
Ça ne le rend pas plus apte à se plier à l’exercice de la Nations League que vous ne l’auriez été?

Si, parfaitement! Je crois qu’il est plus apte, ne serait-ce que par son approche. Il est plus risque-tout. En plus, la philosophie a changé. Aujourd’hui, les jeunes footballeurs du pays ne se laissent plus enfermer dans un carcan comme ceux qu’on leur imposait dans le temps. Maintenant, ils ont même plusieurs animations, en fonction de la possession ou non de la balle…

«Je suis fan de Laurent Jans, du personnage comme du joueur» (Photo : Jeff Lahr).

«Je suis fan de Laurent Jans, du personnage comme du joueur» (Photo : Jeff Lahr).

Quel joueur vous excite le plus en ce moment, en sélection?
Indiscutablement Laurent Jans. Je suis un fan du personnage et du joueur. Alors attention, je n’ai rien contre Beveren, mais quand j’ai vu la finale de la Coupe de Belgique entre Genk et le Standard, c’était d’un tel niveau que je me demandais « mais comment peut-il encore être, lui, dans un tel club? ». Même au Standard ou à Genk, il aurait été au-dessus du lot. Voilà un garçon qui, hormis une tête bien faite, n’avait pas tout entre les mains au départ et aujourd’hui la question est : mais pourquoi diable n’a-t-il pas encore été transféré? Beveren, ce n’est sûrement pas la fin de sa carrière. Mais en règle générale, ce qui me sidère à l’heure actuelle, c’est cette volonté de partir qu’ont nos jeunes. Dans le temps, il fallait bien peser le pour et le contre et curieusement, on trouvait toujours que le contre devait l’emporter (il rit). Maintenant, alors même qu’on sait que la plupart ne réussiront pas parce que c’est la loi du métier, ils risquent tout. C’est comme un Chris Philipps, qui a bien fait de sortir de sa zone de confort, son cocon. Le voilà parti à Varsovie. À mon époque, ç’aurait été regardé comme une aventure. De nos jours, c’est presque normal.

Entretien avec Julien Mollereau