Le Luxembourg joue samedi à 18 h contre l’Azerbaïdjan, à l’extérieur, en premier match de Nations League. C’est la rentrée !
Cela fait facilement cinq ans qu’on se pose la question alors même qu’Aurélien Joachim, meilleur buteur de l’histoire de la sélection, pétait le feu et n’avait pas encore pris sa retraite internationale : cela vaut-il la peine pour les Roud Léiwen de jouer un football de plus en plus convaincant en l’absence de vrais grands buteurs ?
C’était une question de pur formalisme, teintée du pessimisme des petites nations, mais depuis un mois que l’on sait que s’arrête pour de bon l’homme aux 14 réalisations (plus que Dan Da Mota et Dave Turpel mis bout à bout, et… absents tous les deux), la question qui se pose est de savoir comment relancer la machine après dix mois qui ont forcément ébranlé les bases offensives de cette équipe et sans homme providentiel pour guider la reconstruction.
Nouvelle orgie ou grosse frustration ?
Car ce week-end, tout reprend frontalement, sans période d’essai, sans remise à niveau, avec une obligation de performance immédiate. Revoilà la Nations League, des matches abordables, la nécessité au moins de se maintenir dans cette Ligue C pour éviter de retomber chez les nains du continent où le Grand-Duché n’a plus sa place. Et pour ça, bien défendre ne suffira pas. Marquer sera une nécessité.
Allons, pas de mauvais esprit : même revenu dans le groupe, Joachim, un peu usé par le haut niveau, n’était plus au mieux qu’abonné au banc en 2019. C’est donc que le staff s’attaque au problème de la succession depuis un moment déjà.
Dave Turpel (qui pèse quatre des quatorze buts inscrits par le pays sur les quinze dernières rencontres, personne n’a fait mieux) est logiquement passé en pôle et il était encore titulaire au Portugal (3-0), en octobre 2019. Puis Gerson Rodrigues (trois buts sur les quinze derniers matches), que le sélectionneur n’en finit plus de nous vendre comme un homme de couloir gauche «pour qu’il puisse rentrer sur son pied droit», a été testé en pointe sans succès dans un match de toute façon ardu au Danemark (4-0). Pour les deux dernières levées de l’année dernière, avant que le coronavirus ne mette le monde du football à l’arrêt, c’est Maurice Deville qui a pris les commandes en Serbie (3-2) et contre le Portugal (0-2). C’était loin d’être inintéressant mais pour le coup, on aurait un peu cru voir Olivier Giroud avec l’équipe de France : très utile à l’équipe mais finalement rarement en position de marquer, œuvrant pour que s’expriment ses joueurs de couloir ou les joueurs venant du deuxième rideau.
Miser sur les ailes
Cela fait un bout de temps que le centre de gravité offensif s’est, de toute façon, déplacé sur les ailes, en sélection luxembourgeoise. Mais Holtz, qui se fait un devoir de chercher à surprendre ses adversaires, explore désormais des formules qui vont faire appel à l’intelligence d’adaptation de ses garçons. Un exemple : Vincent Thill dans l’axe contre le Portugal, mais à droite en Serbie et à gauche au Danemark a, on le sait, un quotient footballistique peu commun. Mais au moment de reprendre la compétition (s’il peut reprendre, lire ci-dessous), ne faudra-t-il pas retrouver une forme de stabilité dans les compositions? Histoire de retisser le lien.
La Nations League, dans sa toute première mouture, avait été une orgie assez logique de buts pour le Grand-Duché. Onze en six matches, jamais le Luxembourg ne s’était offert un tel ratio de quasiment deux réalisations en moyenne par rencontre sur une seule et même campagne mais quand on ne rencontre «que» le Bélarus, Saint-Marin et la Moldavie, c’est presque une obligation contractuelle. Samedi, nos internationaux reprendront à l’étage du dessus, contre des nations d’un standing supérieur mais avec l’obligation de hisser leur niveau pour se dire qu’ils jouent dans la même cour.
Ça tombe bien, même avec un Joachim retraité, même avec un Da Mota écarté par le RFCU et donc in-sélectionnable, même avec un Turpel qui ratera toute la campagne en raison d’une blessure au ménisque et même avec un Bensi qui va revenir d’une blessure musculaire (et joue désormais souvent les jokers de luxe sous cette tunique), la nouvelle génération n’est frappée que par des bobos modérément inquiétants et des disparités de préparation. Cela n’empêche pas Holtz de gamberger, puisqu’il manque de profils crédibles pour avoir une vraie profondeur de banc : «On se tracasse pour trouver un plan B, et même un plan C. Peut-être va-t-il falloir revoir toute la philosophie. Avec quels joueurs? Avec quelle animation? Et on a très peu de temps pour penser.»
Les constats vont guider cette réflexion. Si Olivier Thill était devant la défense contre Sarrebruck en l’absence de Christopher Martins, c’est le plus souvent derrière les attaquants qu’on l’a aperçu en 2019. Et Danel Sinani, désormais professionnel en Angleterre, se verra sûrement demander de passer un cap ces prochaines semaines, et de devenir aussi moteur que ses petits copains. On l’avait aperçu à droite au Danemark? Il était central, derrière Deville, mardi contre Sarrebruck.
Ce chantier pharaonique, ce jeu de chaises musicales qui varie au gré des blessures, des états de forme et des positions préférentielles sera-t-il achevé au stade olympique de Bakou, samedi? On aimerait : le Luxembourg a perdu ses sept derniers matches. Il lui faut des victoires et des buts.
Julien Mollereau