L’Irlande est le dernier obstacle entre les Roud Léiwen et une campagne historique à bien des égards. Le bras de fer sera terrible.
Les sites de paris en ligne sont formels : le Luxembourg a beau être en position d’accomplir un exploit historique dans bien des sens du terme, il ne mérite pas encore de bénéficier d’une cote supérieure à celle de l’Irlande, qui vient le visiter dimanche (20h45) dans son nouvel antre, à Kockelscheuer. La victoire des Roud Léiwen n’est toujours qu’à 3,5 contre 1 en moyenne. La cote des Britanniques approche les 2 contre 1. Les neuf points déjà glanés sur la campagne, le succès arraché à Dublin en mars (0-1), les hommages appuyés sur le niveau de jeu grand-ducal sortis de la bouche de monstres sacrés tels que Dragan Stojkovic (coach de la Serbie) ou Fernando Santos (Portugal), ne pèsent finalement pas aussi lourd qu’on veut bien le penser dans l’inconscient collectif. Pour exister, dans le monde impitoyable du football, le romantisme ne suffit plus, il faut du concret.
Or le concret de la sélection luxembourgeoise ne pèse encore rien à l’échelle des exigences internationales. Dimanche, les hommes de Luc Holtz pourraient pourtant faire sauter plusieurs verrous. Les dix points de la génération 1995, référence absolue de l’histoire locale, mais aussi la conquête d’une troisième place de groupe pour la première fois dans l’histoire du pays. Vu de l’étranger, ces accomplissements ne susciteront qu’un haussement d’épaules poli. Vu d’ici, ils font rêver.
Un stade qui monte en puissance
Ils vont d’ailleurs conduire tout le pays au stade. Les fans sont sûrement autant attirés par l’intérêt sportif de ce choc que par cette grande première à guichets fermés, promesse d’une ambiance diabolique puisqu’elle était déjà plus impressionnante avec une jauge de 2 000 spectateurs contre l’Azerbaïdjan ou la Serbie qu’avec un Josy-Barthel plein. Et si les gens venaient autant pour s’écouter chanter que pour regarder leur sélection ? Après tout, ce n’est pas plus mal : le Grand-Duché ne fera pas peur au reste de l’Europe sur la seule base de ses résultats, mais s’il est poussé à chaque campagne par ce qu’on devine être un petit chaudron, l’affaire prendra une tournure bien plus inquiétante pour ses adversaires.
Première à se frotter à ce combo «équipe qui monte en puissance – stade qui monte en puissance», l’Irlande, donc. En matière d’ambiances hostiles, cette dernière en connaît un rayon, suffisamment pour ne pas avoir les genoux qui se touchent au moment de monter sur le terrain. Venue pour éviter une nouvelle gifle après sa défaite surprise de l’aller (et même une humiliation bien plus folle si elle, la cinquantième nation mondiale, finit par terminer derrière le petit Luxembourg au classement du groupe A), elle jouera certainement de cette antique tradition britannique consistant à montrer les muscles. Le Grand-Duché, qui a perdu Dirk Carlson, l’un de ses dépositaires physiques, devrait répliquer avec son arme à lui, le tiki-taka local, en sachant que même s’il revient d’Asie, il a certainement laissé moins d’énergie dans son match en Azerbaïdjan, disputé pendant une heure en supériorité numérique.
Les médias irlandais se sont inquiétés de voir que «Gerson Rodrigues était monté en puissance» avant ce duel excitant au possible. On dirait que désormais, il fait presque aussi peur que CR7. Et cela, les sites de paris l’ont oublié…
Julien Mollereau