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Le Tour est sauf ! [billet]


La 19e étape du Tour de France a été remportée au Bettex, face au Mont Blanc, par le Français Romain Bardet, désormais deuxième au classement. (photo AFP)

On pensait pouvoir roupiller tranquille jusqu’aux Champs. Évacuer à plus loin dans le temps la frustration d’un Tour sans éclat. Moribond. Archiconvenu. Cadenassé par une équipe de fer. Régenté avec militarisme par la Sky de Chris Froome où derrière le chef, sans aucune contestation possible, le plus fort de ce peloton, pas une tête ne dépasse. C’est moche, mais ça marche.

Et on pensait bien, oui, vu la mine affichée au fil des jours par Bauke Mollema et Adam Yates, que Romain Bardet avait justement moyen de percer dans ce contexte.

Un orage, des chutes en cascade. De multiples rebondissements. En seulement douze kilomètres, le Tour reprit toute sa splendeur. Sa sauvagerie animale. Sa magie qui n’appartient vraiment qu’à lui, dans ces instants où tout, absolument tout peut se passer en seulement quelques minutes, quelques secondes. Tout se bouscule dans ces instants uniques. Et c’est aussi pour ça que c’est le Tour. Capable de nous inoculer des heures de somnolence. Et d’un coup, capable de réveiller en chacun des instincts oubliés.

Passées la descente acrobatique de Peyresourde, la course à pied du Ventoux, Chris Froome se pensait bien à l’abri de tout, en dépit de propos polis et raisonnés. Il reste bien sûr le maillot jaune confortable, incontournable, alors qu’il ne reste qu’une seule véritable étape à tirer.

Mais sa chute survenue en descente sur une ligne blanche n’a pas seulement égratigné le vernis. Le genou, claudiquant et glacé dès l’arrivée, l’indique mieux que le résultat d’un scanner, il a morflé. Que va-t-il encore lui arriver sur la route de Morzine? Le mystère perdurera malgré tout jusqu’au bout. Malgré quatre minutes et onze secondes d’avance.

Impossible par ailleurs de ne pas remercier le généreux donateur de sensations fortes qu’est devenu, sur le coup de 17 h, Romain Bardet. L’étape et la deuxième place du général après un merveilleux travail collectif des AG2R La Mondiale où Ben Gastauer qu’on connaît désormais bien, généreux, valeureux. Tout simplement énorme.

Le jeune Français de 25 ans, lui, y est allé, de son propre aveu, à l’instinct, presque à l’encontre des consignes. Le résultat est là. Et qui sait, au fond, avec tout ce qu’on a vu en ce drôle de vendredi, en toute fin d’après-midi, si on ne va pas assister à un ultime rebondissement?

Denis Bastien