Transferts – Le Fola met-il, même vaguement, en péril ses rêves de titre en consentant à l’essai de Samir Hadji à Lugo (D2 espagnole) ? Aujourd’hui, tout un club approuve la démarche. Sans penser au risque ?
Le Fola sans Samir Hadji, cela ressemblerait à quoi ? Toujours à un joli bolide, mais pas forcément aussi rapide. (Photo : Mélanie Maps)
On ne mesure pas forcément l’influence d’un joueur offensif à ses statistiques. Samir Hadji, de ce côté, était plutôt léger sur la première partie de saison. Mais ses récentes performances, dont une très belle sortie lors du choc face au F91 (0-2, le 2 novembre), ont prouvé qu’il est un rouage essentiel de l’animation offensive du leader. Alors forcément, à y regarder de manière superficielle, l’envoyer en son âme et conscience en Galice dans un club qui ne le connaissait sûrement pas et qui cherche pourtant un renfort de son profil, cela ne peut-il pas être assimilé à un petit suicide sportif ?
Si Hadji séduit Quique Setién, coach du CD Lugo, le Fola n’aura pas trente-six solutions : soit il décidera de boucler sa saison en considérant qu’Hornuss, Bensi, Lukic, Françoise et Andujar – dont aucun n’a de profil de véritable point d’ancrage en pointe – peuvent suffire à le ramener au titre, soit il doit recruter ce genre de profil avant début février. Crise économique aidant, nombre de dossiers sont déjà parvenus sur le bureau de Pascal Welter, directeur sportif du Fola. Mais recruter un garçon de qualité qui soit directement opérationnel et se fonde directement dans le moule sera périlleux. La perspective irrite déjà Jeff Strasser : « Si, si, si… Attendez ! Il n’est pas encore parti Samir. Quand le premier « si » sera effectif, on verra pour le deuxième… » Si, donc, Hadji part, il y aura du boulot. Et la perspective existe, non pas que l’édifice s’écroule comme un château de cartes, mais que le Fola puisse être un poil moins performant, ce qui pourrait lui être fatal. Ou pas. En tout cas, le club semble prêt à courir le risque.
> Comment monétiser un joueur de DN ?
Il y a des raisons à cela. En rachetant 49% des parts du CD Lugo, Gérard Lopez avait une idée en tête. Non pas celle de faire des infidélités à son Fola en expédiant presque automatiquement Hadji à l’entraînement, mais bien d’initier une collaboration à grande échelle. Le concept n’est pas inintéressant puisque, si Hadji saute le pas, le message qui sera envoyé sera celui-ci, synthétisé par Pascal Welter, directeur sportif : « Des clubs luxembourgeois qui puissent être de vrais tremplins, il n’y en a pas beaucoup. Je n’en vois qu’un seul : le RFCU avec Troyes (NDLR : et son président Masoni, lui aussi propriétaire d’un club au Grand-Duché et d’un grand-frère pensionnaire d’une D2 de grand championnat européen). Nous serions les seuls à avoir la proximité suffisante pour pouvoir expédier rapidement un de nos joueurs à l’essai. Parce que plein de clubs ont des partenariats avec Nancy ou Metz. Mais concrètement, jusqu’à présent, cela a donné quoi ? »
« Nous, on pourra leur faciliter le passage », renchérit Mauro Mariani, vice-président du Fola, qui dit en avoir marre des « pseudos clubs pros » (visant à mots couverts des clubs comme Wohlen – D2 suisse – qui a cherché, cet été à attirer Hadji pour… zéro euro) et remarque que « l’une des faiblesses du foot luxembourgeois est de ne pas parvenir à monétiser l’achat et la revente de ses joueurs. Mais nous, on commence à avoir des idées pour monter des structures de deal ». L’idée derrière tout cela : « Jeunes footballeurs luxembourgeois désireux de ne pas abandonner vos rêves de professionnalisme, signez chez nous… » On ne sait pas encore, concrètement, ce que le Fola pourrait en retirer (de l’argent ?), mais Mariani assure que « toute cette opération s’est faite en totale transparence avec le staff technique ».
Tout cela est bien beau, mais c’est périlleux. C’est accepter de prendre un pari sur l’avenir. Pas énorme non plus puisqu’Hadji, effectivement, n’a encore séduit personne en Galice. Il revient de trois semaines d’arrêt et les chances de le voir repointer le bout de son nez dans une semaine sont encore plus grandes que celles de le voir rester là-bas. On ne lui souhaite pas. Par contre, au Fola, si, un peu…
De notre journaliste Julien Mollereau