Kim Kirchen fut, en son temps, un coureur qui arrivait assez tôt en forme. Il commente le succès de Ben Gastauer dans le Tour du Haut-Var qui arrive juste après celui de Bob Jungels.
Kim Kirchen a apprécié le premier succès de Ben Gastauer sur le tour du Haut-Var. Son avis s’avère, comme toujours, très précieux. (Photo : Nice Matin/Frank Muller)
Lorsqu’il avait remporté le Trophée Laigueglia en 2005, on avait considéré que Kim Kirchen était arrivé très tôt en forme. La suite de sa saison fut de bonne qualité, puisqu’il remporta également le Grand Prix de Chiasso et termina deuxième de la Flèche Wallonne (derrière l’Italien Danilo Di Luca). Après un abandon dans le Tour de France (mal de dos), il remporta de belle manière le Tour de Pologne. Aujourd’hui, Kim Kirchen (36 ans), jeune retraité du cyclisme toujours attentif à son sport, commente régulièrement avec Tom Flammang sur RTL Télévision.
> Quel regard portez-vous sur le succès de Ben Gastauer dans le Tour du Haut-Var ?
Kim Kirchen : Il a remporté un succès mérité. Dès l’an passé, sur le Tour de France, on avait remarqué sa transformation. On a surtout vu qu’il était accepté par son équipe, il faut dire qu’il n’a jamais ménagé ses efforts pour ses leaders. Tout le monde a remarqué qu’il effectuait un travail extraordinaire. Et tout le boulot fait jusqu’ici par Ben, porte ses fruits. Mais j’insiste là-dessus : s’il s’est imposé sur ce Tour du Haut-Var, c’est qu’il a la confiance et le soutien de son équipe. Et ce n’est jamais garanti dans une course française lorsque tu cours dans une équipe française. Je ne suis pas à l’intérieur de cette équipe AG2R La Mondiale, mais je pense que cela dénote une très grande confiance de part et d’autre.
> En 2005, vous aviez remporté en début de saison le Trophée Laigueglia et la suite fut assez bonne mais pas constante. C’est une bonne chose, selon vous, de s’imposer tôt dans la saison ?
Dans le cas de Ben, cela couronne ses cinq premières saisons chez les pros sans victoire. Donc, c’est forcément très bien. C’est aussi vrai que cela peut être un petit piège de gagner tôt dans la mesure où, dans ce cas, ton moral grimpe vite. Résultat, tu vas rouler à l’entraînement plus fort et par tous les temps. Le conseil que je donnerais à Ben, c’est de ne pas se laisser griser. Car c’est vrai qu’une saison, c’est long. C’est toujours bien de gagner tôt, à condition de ne pas trop en faire.
> La façon dont il s’est imposé vous inspire quoi ?
Il l’a dit lui-même : s’il avait mal aux jambes, lorsqu’il a résisté au retour du peloton, samedi, c’est que les autres avaient mal aussi. Il a su risquer et ce fut couronné de succès.
> Le conseil que vous lui donneriez pour ces prochaines semaines ?
Cela va surprendre un peu, mais je lui conseillerais de mettre un peu la pédale douce surtout lorsqu’on veut être opérationnel sur le Tour de France, ce qui sera forcément le cas de Ben. Là, justement, il récolte les fruits de son travail régulier, sérieux, progressif. Il a déjà une bonne petite expérience derrière lui. Il semble bien gérer sa carrière. C’est clair qu’un tel succès ne vient pas tout seul. Je le sais, le Tour du Haut-Var, ce n’est pas facile à aller gagner.
> Son registre va-t-il ou doit-il changer, selon vous ?
Ben, je le vois avant tout comme un énorme travailleur. Je ne le vois pas encore en mesure de prendre des responsabilités entières sur des courses comme Paris-Nice. Mais c’est sûr qu’on le verra jouer un grand rôle de lieutenant pour ses leaders, un peu comme sur le dernier Tour. Seulement, il évoluera sans doute un peu plus haut encore dans le peloton. Son succès au Haut-Var va lui conférer immédiatement un peu plus d’autorité. C’est comme ça que ça se passe.
> Vous le trouviez trop gentil jusqu’ici ?
J’ai toujours pensé qu’il arriverait à obtenir des succès à partir du moment où il serait plus offensif, plus ambitieux. Il doit continuer à faire sa place, ce succès va l’aider. Jusqu’ici, disons qu’il était sans doute un peu trop bon garçon. On aimerait qu’il soit plus agressif pour remporter d’autres courses. Sans être arrogant, quelquefois, il faut savoir courir avec agressivité. Je suis sûr que son succès va l’aider.
> L’autre coureur luxembourgeois à avoir gagné tôt, c’est Bob Jungels…
Oui, il est jeune et progresse beaucoup chaque saison. Il est très ambitieux et ça marche très bien pour lui. Ce sera intéressant de le voir sur Paris-Nice, d’autant plus qu’il marche bien en chrono. Moi, je lui conseillerais de ne pas se fixer uniquement sur les chronos.
> Pour quelles raisons ?
C’est mon point de vue, je l’aurais imaginé plus facilement sur toutes les classiques et pas seulement les Ardennaises qui lui tiennent pourtant à cœur. Je pense qu’on devient un champion une fois qu’on est passé sur toutes les grandes classiques. Je l’aurais bien vu en apprentissage dans un rôle de soutien à Cancellara sur les Flandriennes. Cela n’est pas son choix ni celui de son équipe. On voit qu’il a beaucoup progressé en montagne, comme il vient de le démontrer encore sur la Ruta del Sol. Il est encore jeune et la suite sera forcément passionnante à suivre. D’autant plus qu’il a le soutien total de Trek.
> Le week-end prochain, c’est l’ouverture en Belgique avec le Het Nieuwsblad où Jempy Drucker reviendra avec son maillot BMC..
C’est parfait pour lui, il a intégré une grande équipe, avec du très bon matériel, une grande structure. Dans un premier temps, ils vont lui demander d’entourer ses leaders jusque dans le final. Ce sera un nouveau rôle, il devra travailler plus tôt qu’avant, de manière plus agressive. Il connaît les routes par cœur, c’est un avantage. Sur ce que j’ai vu, Gilbert sera dans le coup, dès samedi. Van Avermaet aussi. Jempy travaille toujours sérieusement, qu’il fasse son travail et la suite viendra.
De notre journaliste Denis Bastien