« Une sacrée bande de retraités ! » Uli Hoeness en rit, mais il est surtout fier : à Munich, les principaux postes d’encadrement sont occupés par des sexa- ou septuagénaires, et le Bayern semble ne jamais s’être si bien porté depuis des mois.
« Et voilà », a claironné le président Hoeness la semaine dernière devant les milliers de membres du club réunis en assemblée générale : « Hoeness a 65 ans, Rummenigge 62, Müller-Wohlfahrt 75, et Heynckes 72 ! Une sacrée bande de retraités ! Peut-être qu’on ne peut plus courir aussi vite, mais notre cerveau fonctionne encore à 100% ! ».
Hoeness, sorti de prison l’an dernier après avoir purgé près de deux ans pour fraude fiscale, est redevenu le personnage charismatique qu’il était, visionnaire génial qui transforma le Bayern artisanal des années 70 en multinationale richissime et prospère. Juste, peut-être, un peu plus avare en coups de gueule qu’autrefois.
Début octobre, c’est lui qui est allé convaincre son ami Jupp Heynckes de sortir de sa retraite pour venir au débotté succéder à Carlo Ancelotti. Avoir été champions du monde ensemble en 1974 crée des liens…
« L’Uligarchie » au pouvoir
A son arrivée, Heynckes le septuagénaire s’est comporté comme un jeune général fraîchement promu ! Rigueur à tous les étages, entraînement intensif, et confiance aveugle aux joueurs historiques du club, les Hummels, Müller et autre Robben.
Pour revenir sur le banc, l’entraîneur avait posé par ailleurs une condition : retrouver à ses côtés ses deux adjoints historiques, Peter Hermann, 65 ans, et Hermann Gerland, 63 ans. Des petits jeunes…
A peine Heynckes était-il de retour que son ancien complice, le docteur Hans-Wilhelm Müller-Wohlfahrt, reprenait lui aussi du service, après quatre ans d’absence. Le médecin, légende du football allemand, arbore à 75 ans une crinière épaisse quoique grisonnante, qui évoque plus le fantasque football des années 70 que l’atmosphère feutrée des cabinets médicaux.
Controversé pour ses méthodes, adeptes des piqûres et fan de l’actovegin (médicament à base de sang de veau), capable de claquer la porte s’il n’a pas la confiance absolue du coach (il a quitté deux fois le Bayern, sous Klinsmann et sous Guardiola), il a soigné pendant des années les stars de Munich et celles de l’équipe nationale.
Par chance, la reconstitution de ligue dissoute n’est pas un crime au Bayern ! Mais la presse allemande parle tout de même d’ « Uligarchie », pour désigner le système mis en place par Hoeness.
« Dans la nuit parisienne… »
Karl-Heinz Rummenigge, le plus jeune de tous ces « super-papys », s’occupe de l’intendance au plus haut niveau. Lui aussi ancienne star du club, il est président du directoire. Il a cimenté son pouvoir pendant que Hoeness purgeait sa peine, et c’est lui qui a aujourd’hui la haute main sur la gestion au jour le jour et sur les finances.
Son entente avec Hoeness, dit-on à Munich, n’a pas toujours été parfaite. Mais dans « la famille Bayern », l’union est un mot sacré.
Et Hoeness, s’il aime bien à l’occasion envoyer quelques piques au « nouveau riche » Paris SG, reconnaît que le club français l’a aidé sur un point. « Il n’a pas été simple de m’intégrer de nouveau après mon séjour en prison », avoue-t-il, « mais maintenant on ne pourrait plus glisser une feuille de papier à cigarette entre Rummenigge et moi ».
Selon lui, c’est « dans la nuit parisienne », au soir de la défaite 3-0 au match aller contre le PSG en septembre, que leur duo s’est reconstitué. Ensemble, ils ont décidé de limoger Carlo Ancelotti. Et quelques jours plus tard, d’aller chercher Jupp Heynckes.
Le Quotidien/AFP