[Handball] Pires, le goaleador venu de Fafe

Hiver 2017, Vladimiro Pires débarque à Diekirch en provenance de son Portugal natal. Deux ans plus tard, il pointe en tête du classement des buteurs. Rencontre.

Il existe une jurisprudence Gyafras. Celle-ci, du nom d’un arrière hongrois répondant au prénom de David, bien connu au Grand-Duché pour avoir été sacré meilleur buteur du championnat (2017 et 2018) tout en portant le maillot de Pétange, l’une des formations les plus faibles du championnat. Une prouesse teintée, dans l’esprit, d’un paradoxe qui, en théorie, n’en est finalement peut-être pas un. Quand la responsabilité offensive repose sur les épaules d’un ou deux joueurs, le nombre de leurs tentatives est plus important que celles de certains de leurs semblables plus richement encadrés. Et à efficacité égale, voire même moindre, ils marqueront toujours plus. Cette saison, au classement des buteurs – et selon les chiffres de la FLH – la hiérarchie est dominée par Vladimiro Pires (76) et Borys Brukwicki (73) deux joueurs de… Diekirch. Sixième d’AXA League et auteur d’un sans-faute jusqu’alors face à Schifflange et Pétange, la formation nordiste est assurée de disputer le play-off titre. Sans être parvenue toutefois à dominer un membre du Big Five. Ce qui était déjà le cas la saison passée.
17 mars 2019, 2e journée du play-off titre. Ce soir-là, le CHEV reçoit les Red Boys. Arrivés un peu trop décontractés, les Differdangeois repartent du Nord avec un court succès (30-31), mais auraient pu subir une mise en échec assez humiliante – au regard des moyens des deux équipes – si Vladimiro Pires avait transformé son sixième penalty dans les ultimes secondes de la soirée. «C’était la première fois que je me retrouvais dans cette situation-là et j’étais nerveux, se souvient l’ailier droit. Je me suis compliqué la vie et j’ai raté mon tir. Si on ne gagne pas ce soir-là, c’est de ma faute. Ça a été un moment très difficile pour moi.»

«J’ai deux titres de champion de D2»

Près d’un an plus tard, malgré ce souvenir bien ancré dans sa mémoire, le Portugais est passé artilleur en chef d’Axa League. Sur ses 76 réalisations, 15 résultent d’un jet de 7 m. Préposé n° 1 à l’exercice, il partage toutefois ce rôle avec Brukwicki. «C’est simple, à chaque match, je suis le premier à tirer. Si je rate, Borys se charge du suivant», explique le Portugais qui, dans cette manœuvre, a le moins bon taux de réussite du top 5 (lire ci-contre). «Dans l’idéal, je pense pouvoir faire mieux.»
Arrivé en décembre 2017, Vladimiro Pires ne s’imaginait pas figurer en tête du classement des buteurs à deux journées de la fin de la saison régulière. «C’est un peu une surprise de me retrouver dans cette position, je ne marquais pas autant au Portugal», glisse ce gaucher de 28 ans passé notamment par l’AC Fafe, le club de sa ville natale habitué à naviguer entre les deux premiers échelons nationaux («J’ai deux titres de champion de D2»).
Deux lignes d’un palmarès riche également de cinq titres de champion et deux sacres européens sous le maillot de l’UMinho, le club universitaire. Vladimiro est alors étudiant en physique et rêve d’embrasser une carrière de chercheur. Venir au Luxembourg ne figurait pas dans ses plans. Mais voilà, Gab Zanon, le vice-président de Diekirch, a quelques connaissances au pays du Fado. À la recherche d’un ailier droit, un ami lui glisse le nom de Vladimiro Pires. «Partir ou non, c’était une grande décision, confie l’intéressé. Je me suis toujours beaucoup investi dans le sport et jouer dans un autre championnat m’est apparu comme un défi. Je crois avoir pris la bonne décision. J’ai gagné en expérience et j’ai beaucoup de responsabilités.»
Il devrait en avoir encore samedi soir contre Red Boys. 321 jours après son échec face à Sedin Zuzo, Diekirch peut-il rêver d’un exploit? «Je pense que si on est bien organisé, qu’on joue bien, qu’on a un peu de chance, c’est possible de gagner contre les équipes qui sont devant nous au classement, estime Vladimiro Pires. Après, les Red Boys et Esch sont au-dessus du lot, mais on s’adapte mieux au jeu differdangeois…»
Au pied de cette montagne, la formation nordiste pourra toujours se souvenir qu’à aller elle s’était inclinée (34-32) après avoir infligé un 5-0 à son adversaire dans les cinq dernières minutes. Et puis, Pires l’assure, si un penalty décisif venait à se présenter en toute fin de rencontre, il prendrait ses responsabilités : «Si je réussis les autres avant, bien sûr! Maintenant j’ai plus d’expérience que la dernière fois.»
Quant au classement des buteurs, le Portugais n’en fait pas une fixation : «Je n’y ai jamais pensé, mais si ça devait arriver, je serais très content. Mais pour moi, le plus important est d’aider mon équipe à gagner des matches.»

Charles Michel