En quatorzaine depuis le 11 septembre, Lionel Pérignon (48 ans) revient sur les débuts victorieux du Standard, l’ambiance au sein du club de la capitale et sa convalescence.
Où étiez-vous samedi soir ?
Lionel Pérignon : Chez moi avec ma femme comme un lion en cage. Pas facile, très stressant, car on a aucune mainmise sur ce qui peut se passer. Alors oui, dans le courant de l’après-midi, j’ai appelé les gars en Facetime pour un petit discours, mais ce n’est pas la même chose que d’être avec eux dans le vestiaire à quelques minutes du coup d’envoi.
Que leur avez-vous dit ?
J’ai discuté avec Morgan (Kermel), le capitaine. J’avais besoin qu’il transmette à son tour l’essentiel du message. C’est-à-dire ce projet de jeu qui nous unit et nous fait avancer depuis maintenant presque trois ans que je suis ici au club. Eh bon, d’après ce que j’ai compris, ils ont été formidables sur le terrain.
Vous n’avez pas vu le match ?
Non. Et je n’ai toujours pas vu une seule image pour le moment !
Lors de cette rencontre, c’est Jörg Tomaschek, l’entraîneur de l’équipe dames, qui vous a suppléé…
Oui, c’est Jörg, car mon adjoint, Serge Chaboisseau a également contracté le virus.
Ce Covid-19 a chamboulé tout votre début de saison. Comment cela s’est-il passé dans les faits ?
Concrètement, c’est simple : le premier cas a été détecté le 30 août. Et, depuis, on ne s’est entraînés que deux fois en trois semaines… Certains de mes joueurs ont déjà été testés cinq fois.
Samedi, vous avez remporté votre premier match contre Diekirch, et ce, en l’absence de trois membres du six de base (Pierre Andriuzzi, Simon Galleco et Robin Matruchot). C’est fort, non ?
Dans l’équipe, à part Sedin (Zuzo), Alexandru (Cioban) et Steeve (Massard), personne n’a évolué au haut niveau. Dans le meilleur des cas, via leurs études à l’étranger, l’un ou l’autre a pu jouer dans un club de N2 ou de N3… Mais le handball, ça ne se résume pas uniquement à courir, sauter et tirer. Et c’est ce que j’ai rappelé aux joueurs avant le match.
Même à distance, mes joueurs m’ont procuré une joie incommensurable
Ça sert quand même un peu de savoir manier le ballon, non ?
(Il rit) Oui bien sûr qu’il faut avoir un peu de technique, mais parfois, habité par une émotion, tu peux te sublimer et, samedi, c’est ce qui s’est passé. Et même à distance, mes joueurs m’ont procuré une joie incommensurable.
Il semble y avoir une vraie ambiance club…
Complètement. Quand j’ai repris l’équipe senior en avril 2018, il y avait douze joueurs. Et puis, peut-être attiré par l’atmosphère qui y règne, le nombre de joueurs n’a cessé d’augmenter. J’ai un groupe de 28 joueurs et, en temps normal, j’en ai entre 22 et 26 à chaque entraînement. Et ça porte ses fruits. Après, je ne vais pas vous le cacher, on est quand même partis de vachement loin… En 2017, je me suis d’abord occupé des U17 et l’équipe senior compte beaucoup de joueurs de cette génération. Comme je l’ai dit, il y a un projet. On veut préparer l’avenir. On espère juste en avoir le temps.
C’est-à-dire ?
Certains éléments vont être demandés, ou l’ont déjà été, par d’autres clubs. Pour l’instant, ils restent ici parce que l’ambiance leur plaît mais ils vont grandir et si le club ne se développe pas au niveau sponsoring et financier, on aura du mal à lutter pour les conserver. Et c’est normal, ils ne resteront pas uniquement pour mes beaux yeux.
Le Standard a donc bien débuté sa saison en Axa League qui compte cette année dix équipes. Que pensez-vous de cette formule ?
Je ne sais pas si dix, c’est le bon chiffre, mais je suis assez sceptique quant à l’idée de réduire la DN à six équipes (NDLR : ce projet à moyen terme est régulièrement évoqué). Peut-être que les meilleurs Luxembourgeois joueraient dans leur club, mais que deviendraient les autres? Je me souviens de ce tour de Coupe d’Europe avec Esch contre les Suédois de Savehof de Kim Andersson (NDLR : le 12 octobre 2003). Là-bas, on avait perdu de 13 buts (34-21). Au retour, remontés comme jamais, à un moment, on mène de sept buts avant finalement de faire match nul (25-25). Ce que je veux dire, c’est que tu progresses en te mesurant à plus fort que toi. Et il faut laisser le temps aux petits clubs de se développer et éviter d’aller leur piquer un bon joueur dès qu’ils en ont un.
Ce qui est angoissant, c’est de ne pas savoir comment ça peut évoluer. Et comme je fume un peu…
Serez-vous samedi sur le banc du Standard lors du déplacement à Schifflange, formation qui n’a toujours pas encore disputé le moindre match de championnat en raison du Covid-19 ?
Ma quatorzaine s’arrête le 24 septembre. Donc, normalement oui.
Au Standard, il y a eu douze cas positifs au Covid. Comment l’avez-vous attrapé ?
Pas par mes joueurs, mais par ma fille (il rit). Elle venait de faire son entrée à l’université. Un jour, elle me dit qu’elle n’est pas bien, qu’elle a une otite. On décide quand même de la faire tester. Au final, ma fille l’avait et l’a refilé à ma femme et moi. Ça va rester dans le cercle familial (il rit).
Avez-vous eu peur ?
Quand tu as une bonne grippe, tu sais que pendant trois jours tu es rétamé. Là, ce qui est angoissant, c’est de ne pas savoir comment ça peut évoluer. Et comme je fume un peu… On entend des choses par-ci par-là, mais dans mon cas, je n’ai eu qu’une perte de goût et d’odorat. Je n’ai pas eu de fièvre, ni de toux ni de grosse fatigue. Ça varie tellement d’un individu à l’autre. Mais pour moi, il n’y a rien eu de grave du tout. Je retrouve d’ailleurs le goût.
Entretien avec Charles Michel