Accueil | Sport national | [Handball] Käerjeng : une supériorité numérique payante

[Handball] Käerjeng : une supériorité numérique payante


Ricardo Trillini, qui se tient la tête entre les mains, a réussi son coup en jouant le surnombre. (Photo Julien Garroy)

Käerjeng s’est qualifié, dimanche, pour le 2e tour grâce à un but inscrit par Chris Auger, son gardien, à la dernière minute et en surnombre. Une situation que l’on pourrait bien revoir cette saison.

Dimanche, il reste moins d’une minute à jouer et le Um Dribbel est en effervescence : Käerjeng mène 27-25 contre Vojvodina, vainqueur la veille d’un but (31-30). Les supporters bascharageois sont debout, prêts à exulter, à célébrer cette qualification pour le tour suivant mais sont contraints de retenir leur souffle. C’est à cet instant précis que Riccardo Trillini opte pour un choix audacieux : faire monter son gardien, Chris Auger, au jeu et évoluer en supériorité numérique (7 contre 6). Un choix payant, puisque, comme il l’avait annoncé à ses partenaires lors du précédent temps mort, Auger se jouera avec maestria de la défense serbe pour venir crucifier Luka Arsenic d’une roucoulette inversée. Un chef-d’œuvre assurant la qualification de Käerjeng pour le 2e tour.

Voir Chris Auger se muer en buteur est devenu chose courante. Il avait d’ailleurs fini la saison dernière avec trois réalisations en compétition officielle. Cette fois, son compteur en affiche déjà deux. «Chris a une motricité d’un joueur de champ, fait remarquer Stéphane Mina, l’entraîneur adjoint de Käerjeng. Il manie bien le ballon et sait attaquer les intervalles.» Doté d’un gabarit (1,85 m pour 80 kg) ne correspondant pas au standard actuel de gardien de but, l’ex-portier de Nancy se veut néanmoins très efficace sur sa ligne (17 arrêts dimanche) et est capable d’amener le danger à proximité de la zone adverse. Si comme le souligne Mina, «il sait faire une passe et voit bien le jeu», cette aisance technique lui permet de se mêler au jeu, à sa construction et, comme dimanche, d’assurer parfois lui-même la finition. Mais abandonner sa cage n’est pas anodin et, au vu des risques encourus, Auger ne peut se permettre de jouer impudemment les héros. Au contraire, ses facilités doivent être mises au service d’un système bien défini.

«On n’est plus dans un jeu en lecture»

À le voir détaler et fêter son but (le deuxième) tel un enfant, on pourrait presque se demander pourquoi Chris Auger n’est pas appelé à venir jouer plus souvent encore le surnombre en phase offensive. Naïvement, on pourrait se dire qu’à 7 contre 6, forcément, les chances de marquer sont plus importantes. Stéphane Mina apporte un bémol : «Quand tu sais que, derrière, ton but est vide et que toute perte de balle se paie cash, tu ne joues pas de la même manière. D’ailleurs, quand Chris monte, ses équipiers sont prudents. On n’est plus dans un jeu en lecture, mais dans un schéma programmé.» Dit autrement, le porteur du ballon est moins libre de ses mouvements et doit réfréner tout désir de création.

Depuis son arrivée au Grand-Duché, Riccardo Trillini s’est distingué par sa faculté à amener son dernier rempart à prendre part au jeu lorsque sa bande se trouve en infériorité numérique. Au vu des qualités intrinsèques d’Auger, on pourrait croire que le technicien italien est désormais tenté d’opter également à l’avenir pour le surnombre. Et ce quelques semaines seulement après que certaines nations ont tenté – avec plus ou moins de succès – l’expérience lors des Jeux olympiques de Rio. Conséquence de l’adoption cet été par l’IHF d’une règle stipulant qu’une équipe peut évoluer avec sept joueurs de champ sans que l’un deux ait besoin de porter le maillot significatif de gardien. Adieu la vilaine chasuble…

Toutefois, et aussi paradoxal que cela puisse paraître, le technicien italien n’est pas favorable à cette règle : «Ça modifie trop le jeu. En surnombre, il n’y a pas cette nécessité de jouer des un contre un.» Trillini n’en reste pas moins pragmatique : «C’est à l’entraîneur d’étudier les nouvelles règles et d’en tirer profit…»

Bref, Chris Auger n’a pas fini de faire trembler les filets.

Charles Michel