AXA LEAGUE (PLAY-OFF TITRE, 2e J.) Peu épargnés par les pépins, les Red Boys sont déjà à la traîne. Sylvain Brosse, leur entraîneur, a déjà fait une croix sur le titre. Restent la Coupe de Luxembourg et… la saison prochaine.
Battus par Dudelange à domicile (23-29), samedi, les Red Boys se retrouvent à la 5e place et pointent déjà à quatre longueurs d’Esch, l’actuel leader. Que cela vous inspire-t-il ?
Sylvain Brosse : Je pense que ça va être très, très difficile de faire quelque chose de bien en championnat. Enfin, d’aller chercher le titre. Il ne faut pas rêver. Je ne vois pas bien comment il pourrait échapper à Esch, qui me semble être un cran au-dessus, et comme derrière, il n’y a pas de hiérarchie clairement établie, ça profitera aux Eschois qui vont encore creuser l’écart…
On imagine que c’est une grosse déception que de se dire que le titre semble déjà hors de portée après une journée de play-off titre…
Vous m’auriez dit ça avant le confinement. Avant le match contre Esch en saison régulière, ça aurait été une énorme déception, mais là, ça l’est beaucoup moins. Il faut être réaliste et regarder les choses en face. Depuis la reprise, on n’a pas été épargnés par les petits bobos. J’en ai discuté avec Nikola Malesevic et André Gulbicki, tout le monde en a et c’est dû à cette longue période d’inactivité. Trois mois sans jouer, c’est long… On n’est pas habitués à gérer ça. Et comme on n’a pas une profondeur de banc avec un niveau de jeu suffisant, une fois qu’on a fait le tour des joueurs majeurs, derrière ce sont des jeunes qui sont là pour apprendre, progresser, mais pas pour nous faire gagner le championnat.
Où en est-on à l’infirmerie ?
Entre Max (Kohl), qui ne s’entraînait que deux fois par semaine en raison d’une douleur au genou opéré cet hiver, Swan (Lemarié), blessé lui aussi, et Damir (Batiniovic), en délicatesse avec son mollet depuis plusieurs semaines, cela fait trois joueurs importants de la base arrière diminués pour les matches mais aussi aux entraînements.
Les trois étaient présents samedi contre Dudelange…
Oui, mais si Swan Lemarié est rétabli, Damir joue sur une jambe et Max vient de passer une IRM car il a le genou gonflé. On attend les résultats.
En revanche, Peter Ostrihon, élément clé de votre défense centrale, était quant à lui absent. Pour quelle raison ?
Ah ça, c’est la cerise sur le gâteau! Peter porte des lentilles, mais il a eu une grosse infection à l’œil et ne pouvait absolument pas jouer. Il ne voyait rien. Et puis, j’oubliais Haris (Hodzic), l’autre pivot, s’est fait une entorse à la cheville. Bref, ça fait un peu beaucoup pour espérer tenir la distance et le rythme.
La vérité, c’est qu’on n’est pas bons
D’aucuns diront que les Red Boys ne sont pas les seuls à avoir des blessés…
Mais je n’essaie pas de trouver des excuses. La vérité, c’est qu’on n’est pas bons. Au lieu d’être patients en attaque et de conserver la balle pour éviter de voir le match s’emballer, chacun veut sauver la patrie. Contre Dudelange, en première mi-temps, je prends un temps-mort. Je leur demande d’arrêter de prendre le tir après trois passes, mais de s’appuyer sur les enclenchements qu’on connaît. Bref, d’être plus patients. Comme la consigne est encore bien fraîche dans leur esprit, les joueurs l’appliquent, enchaînent deux-trois temps forts, mais ils n’arrivent pas à l’appliquer durablement. Donc, j’ai resserré les boulons à l’entraînement et il est clair que je vais accélérer la formation des gamins.
Vous faites sans doute référence à Destiny Emanuel Sylvester (20 ans), Sean Luzolo (19) et Fabio Picco (17) présents samedi contre Dudelange…
Oui, ils n’ont pas joué. Pour la simple et bonne raison que je ne vais pas leur donner du temps de jeu quand le navire coule. C’est aux plus anciens de gérer ça. Comme contre Esch ou Dudelange. Et puis, je ne les fais pas jouer, car je me dis que c’est encore possible, mais maintenant, le championnat, faut pas rêver, je vais leur donner du temps de jeu dans la mesure du possible. Je ne leur demande pas d’être performants en attaque, mais d’avoir du cœur et de se battre en défense. L’intégration des gamins sur le terrain passe par là.
Au manque de profondeur de banc, on peut ajouter un recrutement estival, auquel vous avez pris part, pour le moins mitigé. Si Filip Bonic et Swan Lemarié semblent répondre aux attentes, ce n’est pas le cas de Lukas Christin. Comment l’expliquez-vous ?
Sur le poste de pivot, c’est plutôt décevant… Sans même parler du niveau de jeu, Lukas (Christin) a un manque de condition physique certain. Quand tu viens de D2 française, ce n’est pas possible d’avoir si peu de fond.
Avez-vous songé à vous renforcer cet hiver ?
On était en contact avec un joueur de Besançon, un demi-centre (NDLR : Christopher Corneil) mais finalement, ça n’a pas pu se faire. Pourquoi? Je n’en sais rien. Dommage, car un joueur de plus aurait changé un peu la donne. Ces derniers temps, j’ai même été obligé de mettre Daniel Scheid au poste de demi-centre.
Samedi, vous vous rendez à Berchem où vous aurez face à vous Yann Hoffmann. Au vu des difficultés que vous rencontrez à la base arrière, auriez-vous préféré le garder ?
(Rires) Je préfèrerais l’avoir chez nous bien évidemment… S’il avait beaucoup de temps de jeu à Berchem, qu’il y est épanoui, je dirais qu’il a fait le bon choix. Mais de ce que je vois, il ne joue pas beaucoup. Alors que nous on manque de bras. Mais tout ça est compliqué…
Avez-vous déjà discuté avec vos dirigeants en vue de la saison prochaine ?
On devrait avoir très prochainement une réunion et je poserai clairement la question du recrutement. Ce sujet doit être soigneusement étudié avec un plan d’avenir. Il ne faut plus être dans le coup par coup.
Si l’on comprend bien, votre priorité en cette fin de saison, c’est la Coupe de Luxembourg…
Dire que le titre s’est envolé, ça ne revient pas à dire qu’on va brader le championnat! On va continuer de travailler, permettre aux jeunes de progresser et jouer la Coupe à fond même si ce sera compliqué.
Cette saison, les Red Boys n’ont pas joué la Coupe d’Europe pour des raisons économiques. Est-ce qu’une qualification européenne est un objectif ?
Si tu as une petite équipe sympa qui peut te permettre d’espérer te hisser en demi-finale de la petite Coupe d’Europe (NDLR : European Cup) pourquoi pas. Si c’est juste pour passer un tour, je ne vois pas ce que ça peut nous apporter. Et quand je vois la situation actuelle avec ce Covid-19, heureusement qu’on ne l’a pas jouée.
Comment vivez-vous le fait de jouer à huis clos depuis le début de la saison ?
En tant que coach, ça ne change rien. Quand j’étais joueur, l’ambiance était dans ma tête. J’étais concentré et ce n’est pas parce que ça hurle en tribune que ça change ton rendement. Moi, je n’y crois pas et si un joueur a besoin de ça pour se surpasser, c’est problématique. Jouer a domicile est important par rapport aux repères que tu as dans la salle et éviter la fatigue liée aux déplacements. Ici, des déplacements, tu n’en as pas… En revanche, ce confinement impacte la vie de groupe. Après les entraînements ou le match, tu ne restes plus boire une bière. Du coup, les sous-groupes déjà formés se recentrent sur eux-mêmes. Et ça, je le ressens sur le terrain. Bon, quand tout va bien, il n’y a aucun souci, mais au moindre problème, tout le monde se regarde en chien de faïence. C’est la faute de l’autre. S’il ne divise pas l’équipe, le confinement ne renforce pas sa cohésion. Vivement qu’on sorte de cette galère.
Charles Michel