Le Luxembourgeois n’a jamais pu s’exprimer à sa juste mesure dans cette édition 2019 du Giro. Dimanche, il a pris une honorable 17e place du chrono. Le champion national termine à la 33e position du classement général final.
Un soleil de plomb fusillait les Arènes, terminal de la dernière étape, et lorsque Bob Jungels a fendu la foule pour rejoindre, sans s’attarder, le parking des bus, rejeté loin hors du centre-ville, loin de la foule bruyante et suffocante qui venait de l’accompagner dans ses derniers mètres, on a compris que le champion national en avait fini avec sa corvée quotidienne sur ce Giro.
Durant ce long chemin en roue libre, il aura eu le temps de faire et défaire les fils d’un Giro où sans doute, pour la première fois de sa carrière, il a dû digérer une forte déception.
Il s’est ensuite longuement confessé sur ses doutes, ses interrogations. Sa frustration de ne pas pouvoir peser sur la course, malgré son rôle de leader pour le classement général. Il dira en avoir pleuré le soir de sa déconvenue sur le Montoso. Il confirme qu’il ne peut donner le meilleur de lui-même sur un grand tour très montagneux comme l’était ce Giro. Il ne tire pas pour autant un trait sur ces grands tours et le Giro, qui l’avait révélé. Bob Jungels confesse ensuite son désir d’observer une pause, pour mieux revenir en fin de saison, où beaucoup de courses lui conviennent, comme le Tour de Lombardie, où il aimerait s’illustrer. Morceaux choisis.
Son chrono
«Je suis content car le Giro est désormais fini, le chrono s’est assez bien passé mais j’ai remarqué que je n’avais pas retrouvé toute mon énergie.»
Son mental
«J’ai eu de grands problèmes avec ça, dès la première étape en montagne, lorsque je me suis aperçu que je ne pouvais pas suivre les meilleurs. Je me suis assis dans le bus et j’ai pleuré pendant dix minutes. Je n’avais perdu que deux minutes mais dès ce moment-là, j’ai ressenti que je n’étais pas en forme, physiquement et mentalement. En montagne, c’était vraiment dur pour moi, tous les jours, d’ailleurs, c’était dur. La météo n’a pas aidé non plus. Je ne sais pas pourquoi mais mentalement, je n’étais pas prêt pour disputer un grand tour comme le Giro. C’est un point que je dois régler à l’avenir.»
Ses responsabilités de leader
«Je me sentais coupable vis-à-vis de mes coéquipiers dans ce Giro et je ne voulais pas abandonner pour eux, même si, physiquement et mentalement, j’ai souffert. J’ai donc tenu à rester jusqu’au bout.»
Ses conclusions
«Je vais essayer d’être plus relax, de me calmer, d’aborder les choses plus tranquillement. J’ai appris à connaître mon corps au fil des ans, et depuis l’an passé, je me connais bien. Mais là, ce n’était pas le cas. »
Sa préparation
«J’ai peut-être sous-évalué l’énergie que coûtent les classiques flandriennes avant de préparer ce Giro. Je l’ai abordé en disputant moins de courses. Dans le passé, j’enchaînais un stage d’altitude, les classiques ardennaises puis le Tour de Romandie. Cela m’avait permis de terminer sixième et huitième du Giro (2016 et 2018). Là, je suis allé en Colombie (NDLR : il a remporté une étape sur le Tour de Colombie) et je me suis aligné sur les classiques flandriennes (NDLR : il a également couru Paris-Nice). J’ai donc moins disputé de courses que les années passées. Lors du Tour des Flandres (NDLR: cinq jours avant son stage d’altitude en Sierra Nevada), je me suis aperçu que je n’étais pas au top physiquement. J’ai respecté la théorie et j’ai fait des pauses.»
Son avenir dans les grands tours
«J’ai déjà montré que je peux bien faire dans un grand tour, car je récupère bien en troisième semaine. C’est la première fois que ce n’est pas le cas. Mais ce n’est pas la pire des choses non plus. Il ne faut pas que je baisse la tête.»
Son programme
«Je vais faire une pause, j’en ai besoin, et je vais partir en vacances avec ma copine, je veux prendre le temps de savourer, sans téléphone, j’ai vraiment besoin de cette pause. Je ne sais pas quand je veux reprendre le départ d’une course. En été, je veux participer à moins de courses ou, même, à aucune course, parce qu’à la fin de la saison, il y a beaucoup de belles courses, comme le Tour de Lombardie.»
Denis Bastien, à Vérone