Le projet de rachat par Renault de l’écurie Lotus de Formule 1, à l’étude depuis plusieurs mois, vit une semaine cruciale, sur fond de rumeurs ni confirmées ni démenties depuis quelques semaines dans la presse européenne.
A quelques jours du GP d’Italie, prévu dimanche, une proposition concrète de Renault devait être transmise aux actionnaires de Genii Capital, le fonds d’investissement luxembourgeois de l’homme d’affaires Gérard Lopez.
Où en est Lotus ?
L’affaire est compliquée par la situation financière critique de l’équipe de Romain Grosjean, 3e du Grand Prix de Belgique, qui s’appelait Renault F1 jusqu’en 2010. Ses camions ont été retenus pendant trois jours dans le paddock du circuit de Spa-Francorchamps, après le podium de Grosjean, par un huissier belge, en raison d’une action en justice de Charles Pic, pilote de réserve en 2014, pour se faire rembourser une partie de sa mise correspondant notamment à des séances d’essai non-effectuées.
Selon la presse britannique, Bernie Ecclestone, le grand argentier de la F1, a dû aider Lotus cet été à payer les salaires de ses 400 employés, au moyen probablement d’une avance sur ses futurs revenus commerciaux. Mais pas le salaire de Grosjean, désormais payé par des sponsors personnels en échange d’espaces sur la carrosserie de sa Lotus.
Où en est Renault ?
«Nous sommes dans la dernière phase de l’étude de faisabilité», disait Cyril Abiteboul, le directeur général de Renault Sport F1, il y a deux semaines à Spa. Depuis, le dossier a avancé et deux réunions importantes étaient prévues cette semaine, lundi chez Renault et vendredi chez Lotus. La réflexion est en cours depuis un an et le rachat d’une autre écurie, comme Toro Rosso ou Force India, n’est plus à l’ordre du jour, car elles sont moins bien équipées techniquement (soufflerie, etc.).
Autre intérêt des négociations en cours, le statut d’écurie «historique» de la F1, en passe d’être accordé par Ecclestone, au même titre que Ferrari, Mercedes, McLaren et Williams, augmenterait de plusieurs dizaines de millions d’euros, chaque année, les revenus commerciaux de Renault F1. En échange d’une présence à long terme, pour dix ans au moins, dans une discipline où la marque au losange est arrivée en 1977. Grâce aussi à l’image très forte de Renault auprès des fans de F1 et à la force de persuasion de Carlos Ghosn, le pdg de l’Alliance Renault-Nissan.
Renault aimerait finaliser le «deal» d’ici la mi-septembre, soit avant le GP de Singapour, car il y a urgence: la fin de saison, avec sept GP lointains, va coûter cher à l’écurie d’Enstone, qui achète le moins de pièces possible et a quasiment stoppé le développement de sa monoplace actuelle, la E23. Certains fournisseurs ont dû porter leurs créances devant la Haute Cour de Londres pour être payés.
Où en est Red Bull ?
Le sort d’une nouvelle écurie Renault F1, dès 2016, est intimement lié à celui de Red Bull Racing qui disposerait de deux clauses importantes dans son contrat avec le motoriste français. L’une évoque un statut privilégié d’écurie numéro 1, incompatible avec un retour de Renault comme écurie à part entière, avec de grandes ambitions. L’autre est une clause de performance, qui pourrait être actionnée en raison des résultats décevants de 2014 et 2015.
Depuis plusieurs mois, Red Bull ne cache pas, en privé, son désir de se séparer de Renault avant le terme du contrat actuel, fin 2016. Et on sait, de source allemande sûre, que le conseil d’administration du groupe Daimler AG a autorisé Mercedes-AMG à fournir ses moteurs à Red Bull dès l’an prochain, en suivant la recommandation de Niki Lauda, le président non-exécutif de l’écurie championne du monde, pour qui cela relancerait durablement l’intérêt de la F1.
Où en est Alain Prost ?
Le quadruple champion du monde de F1 a été omniprésent cet été, en coulisses. Il fait partie du projet Renault, dont il est l’ambassadeur, et pourrait même prendre une participation significative dans la future entité sportive, comme l’a fait Lauda chez Mercedes-AMG. Après la faillite de Prost GP, il avait juré qu’il ne remettrait plus la main au portefeuille, mais si Renault lui offre 10% de la nouvelle écurie, on le voit mal refuser.
Où en est Total ?
Le pétrolier Total, partenaire historique de Renault en F1, est prêt à augmenter sa mise, sur la durée, avec Grosjean comme pilote de pointe de l’écurie d’Enstone. Le cas de PDVSA, le pétrolier d’Etat vénézuélien qui soutient Pastor Maldonado, est plus délicat, car il apporte beaucoup d’argent (45 millions d’euros par an) mais les résultats du pilote sont décevants.
AFP