Contre l’un des nouveaux dieux du foot mondial, Erling Haaland, les Roud Léiwen s’offrent un amical à ne pas prendre à la légère. Sinon…
Ah bon? Ils ont donné leur équipe?» En onze années de présence à la tête des Roud Léiwen, il restait encore à Luc Holtz à faire connaissance avec la Norvège et sa mentalité si particulière de transparence à l’extrême. Voilà, c’est fait. Hier, au stade de la Rosaleda, le sélectionneur a ouvert des yeux tout ronds en apprenant que Stale Solbakken venait de fournir sa composition au site internet de sa fédération et a eu un rire nerveux quand il lui a été demandé s’il pourrait envisager de fournir la sienne, comme ça, à 24 heures d’un rendez-vous international, même amical. «Ah, vous me connaissez : même moi je ne la connais pas. J’attends toujours la séance de clôture, je me décide même parfois le jour du match.» Ce qui ne l’a pas empêché de jeter un petit coup d’œil sur internet sitôt les micros coupés.
Bon, on veut bien que Holtz hésite encore sur quelques positions mais à la vérité, pour ce double rendez-vous de fin de saison, les Roud Léiwen commencent tout de même à manquer un peu de combattants (pour changer). Bensi a arrêté sa carrière, Chanot (cuisse) n’est pas venu, Malget, Muratovic et L. Gerson sont blessés de longue date, V. Thill est présent pour travailler sur son pubis et Barreiro (cuisse aussi) dans l’attente de son retour face à l’Écosse. Sinon, Skenderovic est suspendu pour cette première levée, et Philipps (mollet) encore trop juste… Sinon, Mahmutovic, qui avait dû faire l’impasse sur la séance de lundi, tentait sa chance sur le billard de Malaga, histoire de voir s’il peut postuler contre les monstres d’attaque Haaland et Sörloth, qui mesurent 3,87 m à eux deux. Les kilos, on ne vous en parle même pas.
Clairement, on a pu juger que la question athlétique ne passionne pas autant Luc Holtz que cette mode très norvégienne de dévoiler officiellement son équipe la veille de l’évènement. Il a quand même consenti à livrer son sentiment sur le duel physique qui attend ses joueurs à tous les étages du terrain, ce soir, en Andalousie : «On connaît bien cette qualité athlétique des joueurs scandinaves. On a joué récemment contre la Suède (NDLR : défaite 8-0) ou contre le Danemark (NDLR : défaite 4-0) et on sait leurs compétences dans ce domaine. Mais nous, on a une autre culture. On va essayer de les neutraliser et de mettre nos qualités en valeur.»
Un Haaland survolté ou défaillant?
Inévitablement, la conversation a fini par glisser sur LA star. C’est qu’en mars, notamment après une gifle contre la Turquie (3-0, déjà à Malaga), quelques anciens internationaux se sont mis sur le râble du joueur. John Arne Riise a tout d’abord critiqué son rendement : «On a tellement loué son agressivité avec Dortmund. Mais avec la Norvège, on ne voit rien de tout ça.» Puis Bernt Hulsker, footballeur plus modeste mais désormais auteur, s’est attaqué à sa mentalité : «Avec nous, il ne fait que capituler. Il donne l’impression de ne pas avoir envie d’être là.» C’est en partie à ses critiques que le joueur du Borussia se retrouvera aussi confronté, malgré le ronronnement d’une fin de saison sans Euro. Un Haaland tonitruant ou un Haaland en vacances, ce soir? C’est à ce moment qu’on a retrouvé un sélectionneur aux yeux globuleux, presque surpris par la question. «Pour moi, c’est le même joueur en club et en sélection. Je ne vais pas dire que c’est un “bœuf”, mais bon… Athlétiquement, c’est dur de le bouger mais si en plus on lui laisse des espaces pour qu’il percute, il nous fera mal. Ces derniers temps, il a juste manqué de réussite en sélection. J’espère qu’il ne l’aura pas contre nous. Ce doit être un challenge pour nos défenseurs.»
Un challenge contre une nation qui va décider, en ce mois de juin, si elle décide au niveau national un boycott de la Coupe du monde 2022, en raison des libertés prises par le Qatar dans le traitement des travailleurs émigrés, alors qu’elle dispose enfin d’une génération pour renouer avec un grand tournoi international qui serait le premier depuis l’Euro-2000. Une perspective pour gens bien. Luc Holtz, d’ailleurs, «comprend», même s’il n’apprécie pas l’idée de «se servir du sport pour faire de la politique». Son idée à lui, ce soir, serait plutôt de «faire» de la confiance avec un résultat. Après sept défaites consécutives en matches amicaux, mettre dans une rencontre sans enjeu les ingrédients qui font tant de merveilles en matches de compétition pourrait aider à passer un cap supplémentaire contre la 42e nation mondiale.
Julien Mollereau