Depuis le temps que les clubs de l’élite réclament des réformes profondes (premières licences, transferts…), la LFL a fini par présenter, mardi, son projet de révolution. Le prochain congrès va déménager.
Depuis tant d’années que durent les récriminations des clubs de l’élite envers la politique fédérale en matière de sélectionnables et de transferts (entre autres choses), il fallait bien que ça arrive un jour. Mais on se demandait vraiment quand et voilà que comme ça, du jour au lendemain, la LFL, passée depuis quelques mois à la vitesse supérieure dans sa capacité à fédérer les énergies, expédie un communiqué annonçant présenter sept amendements. Tous mis bout à bout (certains beaucoup plus que d’autres) représentent une petite révolution à l’aune de ce qui se fait aujourd’hui, notamment pour garantir un approvisionnement décent en joueurs pour la sélection.
Nous avons contacté le secrétaire de la Ligue, Alain Gross, pour lui demander des éclaircissements concrets sur les requêtes qui seront soumises au vote des 104 clubs le 24 octobre prochain, et qui sont portées à l’heure actuelle par quelque 28 clubs, dont 16 de BGL Ligue, 6 de PH et 6 de divisions inférieures.
Le système des premières licences
La LFL demande à ce que désormais, soit considéré comme premières licences tout joueur étant installé au pays avant l’âge de 14 ans, ou ayant passé cinq ans sous licence luxembourgeoise entre 15 et 23, voire tout simplement de nationalité grand-ducale, ce qui ne coule pas forcément de source. Exemple : Mario Mutsch…
«On a effectivement des joueurs de nationalité luxembourgeoise qui, cas surprenant, ne sont pas considérés comme premières licences», constate Alain Gross, membre du comité du RFCU, le club de la nouvelle présidente de l’institution, Karine Reuter. Selon pas mal de clubs, la rareté du joueur luxembourgeois (pour faire court) a créé, ces dernières années, une véritable bulle spéculative qui nuit aux intérêts, notamment financiers, des clubs. «Cela ne va pas faire baisser drastiquement les coûts liés au recrutement de joueurs, croit pourtant savoir Alain Gross, mais quand même.» Les clubs revendiquent aussi leur volonté de ne pas pénaliser tous les jeunes qui arrivent dans ce pays d’immigration en pleine croissance de population.
Les clubs demandent, qui plus est, à ce que soit appliqué un effet rétroactif pour que les joueurs ayant déjà rempli ses conditions puissent bénéficier de la liberté de jouer sans cette contrainte.
Ils veulent cinq transférés sur la feuille de match
Révolution numéro 2 ? Les entraîneurs se lamentent depuis des temps immémoriaux d’avoir, en plus des sept premières licences, à composer avec un blocage à quatre joueurs transférés. Voir ce critère étendu à cinq serait une sacrée amélioration de leur ordinaire, notamment parce que «certains clubs qui en comptent énormément se retrouvent aujourd’hui dans une situation ridicule, à devoir laisser des joueurs en tribune», paraphrase Alain Gross, qui n’évite pas le problème de ces clubs qui, justement, recrutent malgré tout à tour de bras : «Un jour prochain, de toute façon, la FLF devra aussi légiférer contre ces techniques utilisées par certains pour affaiblir des concurrents. Question de fair-play.» Mais cela, on verra plus tard.
L’extension relative de la période des transferts
La Ligue et ses alliés de circonstance ne réclament pas une refondation totale de ces périodes. Le plus gros volet de cet amendement concerne l’extension de la période des transferts internationaux, afin de la porter du 25 mai au 31 août inclus, ce qui permettrait notamment aux clubs européens dont les joueurs finissent par séduire à l’étranger de retomber sur leurs pattes en recrutant des éléments en dernière minute afin de compenser. Dernier exemple en date, le Progrès, qui a laissé filer Sébastien Thill, son capitaine, à Tambov en Russie et n’a pas pu le remplacer. «On ne pense pas que cela susciterait beaucoup de transferts en plus, estime Alain Gross, mais c’est une question de logique.»
Autre souhait en matière de transferts, le souhait de laisser la possibilité aux joueurs de bénéficier d’un droit à l’erreur qui leur permettrait, en cas de manque de temps de jeu dans leur nouveau club, de retourner jouer pour l’ancien en cas d’accord de toutes les parties : «Cela serait au bénéfice de tout le monde», pense pouvoir dire Alain Gross.
À noter que les transferts hivernaux, dans l’esprit des clubs, devraient permettre de recruter plusieurs joueurs, quitte à ne continuer à n’en qualifier que deux pour la fin de saison, selon les vœux de la FLF.
Un sursis raccourci d’un an
On parle là d’une mesure d’équité sportive, selon les clubs. Pour l’instant, une règle non écrite dirait en effet que pour bénéficier d’un sursis pour une faute en particulier, un joueur devrait évoluer trois ans sans commettre la même erreur pour bénéficier de nouveau d’un sursis dans ses suspensions. La Ligue voudrait ramener ce délai à deux ans.
Et surtout le voir appliqué aussi aux étrangers, estimant avoir débusqué une évidente mesure de discrimination : «Concernant les joueurs venant d’un autre championnat, les juges fédéraux m’ont expliqué, raconte Alain Gross, qu’ils devaient partir du principe que leurs antécédents hors de nos frontières sont négatifs. C’est la raison pour laquelle ils ne bénéficient jamais, eux, du sursis, en arrivant. En fait, ils doivent montrer patte blanche pendant trois ans avant de pouvoir bénéficier de sursis. On veut tirer ça au clair.»
Ces amendements seront-ils étudiés ?
À en croire les clubs, aucune chance qu’ils ne soient pas soumis au vote. Un amendement aux règlements peut être soumis d’office à l’approbation des clubs par le conseil d’administration, ou s’il est formulé par un vingtième des clubs. Il aurait donc fallu qu’un peu plus d’une vingtaine de clubs s’unissent pour présenter leur vision. Ils sont vingt-huit, c’est largement suffisant, d’autant qu’Alain Gross explique que la Ligue veut encore séduire des clubs de PH : «La plupart des dirigeants de ces clubs étaient en vacances quand nous avons bouclé, en une dizaine de jours, fin août, ce texte. Seuls six se sont associés à la démarche mais d’autres devraient nous rejoindre.»
Ces amendements ont-ils une chance de passer ?
Puisque certains amendements que la LFL estime cruciaux en côtoient de moins importants (la rétroactivité ou l’improbable taille des publicités autorisée sur les équipements des joueurs), les clubs souhaitent que ces mesures ne soient pas votées en paquet mais séparément pour optimiser leur chance de les voir adoptées.
La Ligue va donc faire du lobbying, organisant ces prochaines semaines trois réunions régionales pour expliquer la portée de ces amendements. Sachant que les clubs votent au prorata du nombre d’équipes qu’ils ont inscrites en championnat, que les équipes de DN ont deux voix de plus et les équipes de PH une de plus, les chances de révolutionner le système ne sont pas minces «d’autant qu’il ne s’agit pas de changements sectaires qui favorisent par exemple les grands au détriment des petits, ajoute Alain Gross. On a trop attendu. Cette fois, on s’est dit qu’on devait prendre l’initiative et rien, dans ce que nous proposons, ne me semble de nature à susciter des discussions».
Pas même au sein de la FLF ? «Oui, il y aura sûrement des grincements de dents. Le président s’est plus d’une fois offusqué de changements que nous réclamions. J’estime que certaines des réactions de la fédération à propos des changements que nous revendiquons ont parfois été déplacées voire éloignées de la réalité. Oui, c’est sûr, ça va fâcher.» Surtout si effectivement, une révolution est en marche et que la fédération perd totalement la main.
Julien Mollereau