Diogo Pimentel, moteur de l’entrejeu du leader eschois, va-t-il repartir dès cet été et signer pro ? Ce serait tant mieux : il deviendra bientôt luxembourgeois.
Certains clubs continuent de ne pas concéder un mètre à la pandémie. Dimanche, la speakerine du Fola s’est fendue de trois appels micros afin de faire respecter les distances sanitaires en tribunes. Elle n’était que le bras armé d’un comité intransigeant sur les règles. Et qui a forcé, à l’en croire, le Swift à coopter en urgence Flavio Becca afin qu’il puisse recevoir l’autorisation de passer les portes du Galgenberg et suivre le choc disputé par un club qu’il subventionne mais où il n’a pas de licence.
Pourquoi on vous raconte ça ? Mais parce qu’il y a une personne qui avait très envie de regarder cette «finale» de plus près, c’est l’un des scouts de Greuther Fürth, l’actuel deuxième de 2e Bundesliga, qui avait fait une demande préalable en ce sens. Il n’a même pas cherché à cacher la raison de sa venue : Diogo Pimentel. Cela n’a pas suffi à infléchir l’intransigeance des dirigeants eschois.
Mais on le comprend de tenter sa chance et de contourner les protocoles. Il a bon goût le monsieur. Car l’ancien Ettelbruckois n’est plus le milieu de terrain prometteur qui avait planté un but de soixante mètres au F91 en novembre 2018, indiquant tout sourire que cela allait «rester dans (s)on histoire personnelle». Non, là, on ne parle plus d’un coup d’un jour mais d’un garçon en train d’éclabousser cette saison de DN de son hyperactivité et de ses statistiques. Trois buts, six passes et une troisième place au classement des meilleurs joueurs du championnat. Vu sa dynamique du moment, le Portugais de 23 ans pourrait réussir un truc fou : être le premier joueur non-attaquant à terminer sur le trône, fin mai. Dans la caste des milieux récupérateurs à l’abattage de malade, en 2010, Ben Payal, alors au F91, avait échoué à la deuxième place. En 2019, Rodrigue Dikaba, coéquipier de Pimentel au Fola, avait fait une troisième place…
«Il déborde encore trop d’énergie»
Parlons-en, de Rodrigue. Il doit commencer, déjà, à en avoir marre de faire ses 35 ans : quand on l’appelle, désormais, c’est souvent pour parler de ses jeunes coéquipiers. On sent pourtant que ça ne le dérange pas une seule seconde d’ouvrir le dossier Pimentel : «Il a tout pour faire carrière, c’est clair et net. Au niveau des tests physiques, il est impressionnant. Son volume de jeu, son impact, se ressentent dans notre jeu : il harcèle, il déclenche le pressing qui met toute l’équipe à l’aise. Vous allez rire si je vous dis ça parce que vous connaissez ses stats, mais elles pourraient être encore plus folles s’il était un peu plus calme. Il déborde encore trop d’énergie. Mais c’est déjà un monstre et il le sera encore plus. En fait, même au niveau pro, aucun coach ne peut se passer d’un joueur comme lui.»
C’est la prochaine étape. Pimentel, comme un certain Laurent Jans avant lui, a très bien fait les choses en débarquant à Esch, l’été dernier. La tête sur les épaules, il a décidé de ne demander qu’un salaire minimal en échange d’une clause de sortie au ras des pâquerettes. Autrement dit, il n’est pas très cher. Pour un club pro, il suffirait presque de bien regarder et de se servir. Et le Fola ne s’attend pas forcément à compter encore son bouillonnant chevelu dans son effectif en 2021/2022. «S’imposer aussi vite que ça, c’est très très rare, souligne son directeur sportif, Pascal Welter. Mais ce gars-là, en fait, il est exceptionnel.»
Et ce «gars-là», cela intéressera peut-être Luc Holtz même si le sélectionneur dispose d’un entrejeu en plaqué or avec «Kiki» Martins et Leandro Barreiro, sera bientôt luxembourgeois. Les démarches sont en cours et devraient aboutir avant la fin de l’année. Pas trop tôt, dira l’un de ceux qui étaient là, en témoin, au début de l’aventure, le vice-président de la Jeunesse Schieren André Schmit, qui avait alerté la FLF sur le talent du gamin et l’intérêt d’effectuer les démarches en vue de sa naturalisation : «Il avait déjà un talent hors norme. Mais un jour, Diogo a participé à un entraînement organisé fédéral à Mertzig pour détecter des talents… J’étais désabusé par le comportement des deux entraîneurs : plutôt que de suivre le match, ils discutaient entre eux.» Pimentel n’a pas eu besoin d’eux pour que, quelques années plus tard, on ne voie plus que lui.
Julien Mollereau