Dans l’un des derniers pays européens encore non confinés, Lars Gerson continue de s’entraîner avec Norrköping. Et même de jouer des amicaux.
Alors que deux milliards d’êtres humains sont confinés à l’heure actuelle pour cause de coronavirus, alors que l’Europe est, de loin, le continent frappé le plus durement, Lars Gerson est le seul joueur de football luxembourgeois encore en mesure de faire son boulot à peu près normalement. Jeudi, il a même participé à une opposition interne «normale, avec contacts». Les rencontres du mois d’avril pour les grands débuts de l’Allsvenskan ont été reportées, mais il n’empêche : l’international nous a raconté cette rareté qu’est devenue la normalité.
Comment va la vie en Suède à l’heure d’un confinement quasi-généralisé en Europe ?
Lars Gerson : En Scandinavie, tout reste encore très ouvert effectivement. On s’entraîne normalement et on fait juste un peu plus attention, notamment en allant moins dehors. En Suède, c’est d’ailleurs encore plus ouvert qu’en Norvège ou au Danemark. Il me semble que là-bas on ne peut pas se réunir à plus de cinq personnes, chez nous, c’est encore cinq cents.
On va chercher à manger au restaurant et on ramène ça pour manger chez soi
Tous les magasins sont donc restés ouverts ?
Les restaurants, les cafés… Oui. Bon, il y a quand même beaucoup moins de gens qui les fréquentent, donc il reste à voir s’ils sont capables de tenir encore longtemps comme ça, financièrement. Moi-même, j’essaye de traîner beaucoup moins dehors, je mange plus à la maison que ce que je faisais auparavant. (Il rit) Disons qu’on va chercher à manger au restaurant et qu’on ramène ça pour manger chez soi. Ce sont les consignes qu’ils demandent de respecter à la télé et que le club nous a incités à suivre. Bon, j’aurais le droit d’aller au restaurant quand même si je voulais, hein…
Bref, vous vivez quasiment normalement, même dans votre pratique du football ?
Ah, mais on fait encore nos séances à peu près normalement. Bon, on ne se fait pas de bisous, on ne se touche pas, mais les séances se font comme d’habitude. On n’a pas non plus pris de mesures dans les vestiaires, qui sont assez grands. On nous a dit que si l’on sentait le moindre problème de santé, un mal de tête, une toux curieuse, on restait à la maison. Et si après deux jours, tout semble redevenu normal, alors tu peux revenir à l’entraînement. Aujourd’hui, deux de nos joueurs sont à la maison d’ailleurs, mais apparemment, ce n’est rien de grave. Et puis si tu as quelque chose, le doc peut te faire un test, mais il faut vraiment beaucoup de symptômes pour en arriver là.
Vous rendez-vous compte que vous êtes l’un des derniers sportifs luxembourgeois, si pas le dernier à vous entraîner à peu près normalement ?
Je ne sais pas. C’est le cas ? C’est fou. Bon, on va quand même commencer le championnat seulement en juin. Cela nous fait quand même une très, très longue préparation. Déjà qu’elle est longue en temps normal… La fédération est en train de voir ce qu’on va faire et comment on va le faire, mais certains clubs envisagent de laisser deux semaines de congés à leurs joueurs avant de reprendre. Le gouvernement devrait les aider financièrement.
Il paraît qu’en ce moment, beaucoup de gens ont envie de voir du foot
Cela reste étonnant. Vous n’êtes pas inquiet, au moins un peu ?
On s’inquiète surtout pour les plus vieux. Comme mon père, qui fait attention. Il ne lui arrivera rien. Et moi aussi, l’air de rien, je fais attention. Je me lave très souvent les mains d’ailleurs.
Et jeudi, vous jouiez… un match amical ! (voir vidéo ci-dessous)
En fait, on avait un amical prévu samedi (NDLR : contre l’AIK). Celui-là a été annulé, comme tous les autres, comme tous les sports. Cela s’est transformé en opposition interne (NDLR : il jouait dans l’équipe bleue de Norrköping), comme ce qu’on avait déjà fait la semaine passée, sans public mais avec des arbitres. Le club l’a d’ailleurs diffusée sur le site, parce qu’il paraît qu’en ce moment beaucoup de gens ont envie de voir du foot (il rit). Cela nous fait beaucoup de bien de ne pas rester sans rien faire. Quand j’envoie des messages à mes coéquipiers de la sélection, je reçois des images où je les vois s’entraîner seuls.
Vous allez leur donner envie de venir s’engager dans un club suédois !
Ah, mais s’ils le veulent, moi, je serais ravi de les voir arriver en Allsvenskan. Par contre, à l’heure actuelle, je ne sais pas s’ils auraient le droit de franchir la frontière. Pour le moment, ici, ça va bien, mais j’ai l’impression que tout pourrait très vite changer.
Entretien avec Julien Mollereau