Le Quotidien Indépendant Luxembourgeois
Les hommes en noir du Grand-Duché ont faim de football, jure Alain Durieux. L’arbitre international assure même que les siens s’assiéront sur leurs vacances pour que la saison puisse s’achever.
La FLF se casse la tête pour savoir comment finir le championnat, les clubs s’inquiètent pour leurs finances, les joueurs sont occupés à maintenir un semblant de condition physique. Et les arbitres dans tout ça ? Eux aussi tentent de maintenir à flot leur petite corporation. Alain Durieux, l’une des têtes d’affiche du milieu, nous a raconté son quotidien.
Ça vous manque, le football ?
Alain Durieux : Ah, bien sûr ! On en est à trois semaines sans foot, mais j’ai l’impression que ça fait déjà trois mois. J’ai des contacts réguliers avec d’autres arbitres et nous aussi, on veut y retourner.
Les joueurs sont payés par leurs clubs et continuent à s’entraîner. C’est contractuel. Pour vous, c’est quoi la carotte ? Les arbitres seront-ils prêts quand cela reprendra, si cela reprend ?
Oui, c’est sûr et certain qu’on sera tous prêts, que l’entraînement sera bien fait. J’ai une vue sur les données de mes confrères et ils n’ont pas baissé! Certains ont fait même plus vu qu’ils sont au chômage partiel. C’est surtout de l’endurance de base, pour la prévention des blessures. Parce que si on reprend, on va reprendre directement par une phase extrêmement chaude du championnat et on devra être immédiatement prêts.
Votre entraînement, il est exclusivement physique ?
Majoritairement. De la coordination, un peu de stabilisation. Et une fois par semaine, l’UEFA organise désormais des entraînements online. On se connecte à une heure donnée et pendant 30 minutes. On y voit plusieurs phases. S’agit-il d’un coup franc direct ou indirect ? Est-ce un carton jaune, rouge ou pas un carton du tout ? Y a-t-il hors-jeu ou pas ? On visionne l’action. On a droit à un ralenti et on a cinq secondes pour prendre notre décision.
L’UEFA vous impose une formation continue ?
Oui, elle a créé cette plateforme et on doit effectuer ces tests, c’est obligatoire. Bon, ce n’est pas très stressant non plus : le timing est assez important pour la prise de décision. On nous donnera les résultats plus tard.
Vous entraînez la concentration ?
La concentration, c’est primordial. La condition physique c’est bien, mais sans concentration… Mais je ne sais pas comment l’entretenir.
Une fois par semaine, l’UEFA
organise des séances online
Les préparateurs physiques de club craignent tous un manque de rythme de la part des joueurs. Cela peut exister aussi pour les arbitres ?
On a les mêmes soucis, oui. Les joueurs vont peut-être avoir des lacunes au niveau tactique, nous, cela peut être dans la lecture du jeu, dans notre placement sur le terrain. En général, avant une reprise, on a toujours quelques amicaux pour se mettre dedans, mais là, on va reprendre de zéro. On a le feeling de base, mais cela peut prendre quelques matches avant de retrouver le sens du placement. Mais avoir du temps pour se préparer à la reprise, c’est surtout pour les joueurs que cela va être important. C’est plus important pour eux que pour nous. Eux ont vraiment besoin de savoir quand on va reprendre.
Joueurs et arbitres sont par contre égaux devant une réalité : au mois de juin, au moment où tout le monde voit le football national s’arrêter, vous prenez généralement vos vacances. Or cette année, on risque bien de jouer au football. Les joueurs, payés par leur club, n’ont pas d’autre choix que d’annuler. Mais les arbitres, qui n’ont pas de contrat à honorer ?
Ah ça, cette année, non, on ne sait pas. En général, oui, on part après la fin de saison et moi, d’ailleurs, j’avais planifié mes vacances pour juin. C’est vrai que pour nous, rester, ce n’est finalement pas une obligation mais on va le faire quand même. Ce serait effectivement difficile de finir la saison sans nous, non? Cela nous coûtera de l’argent en annulations, mais peut-être les assurances marcheront-elles…
Avez-vous un avis sur l’opportunité de finir cette saison d’ailleurs ?
À voir. Mais ce serait bien qu’on puisse désigner le champion de manière normale.
Aviez-vous personnellement des échéances internationales prévues ?
Un tournoi U19 au Danemark était prévu pour la fin-mars. Tout est en stand-by. J’imagine qu’il y aura d’autres rendez-vous. Si on reprend le championnat, il y aura beaucoup de semaines anglaises et ce sera probablement très intense.
Le système des montées-descentes pour les arbitres sera-t-il maintenu en l’état, cet été ?
Je ne sais pas. J’imagine que oui. Normalement, on apprend ça fin juin début juillet. Je ne sais pas si ce sera le cas cette fois. Mais moi, je ne sais pas où j’en suis.
Entretien avec Julien Mollereau
