Le capitaine pétangeois de BGL Ligue a soigné ses croisés, mais à gauche, il va entrer en concurrence frontale avec Leandro Zorbo, recruté… cet hiver.
En football, il y a des chapelles auxquelles on évite de toucher. Et Artur Abreu, gaucher dribbleur, flanqué du numéro 10 et du brassard de capitaine de Pétange, avait des allures de saint canonisé avant de se faire les croisés et le ménisque, le 4 mars 2020, contre Rodange. C’est pourtant alors qu’il revient aux affaires, après onze mois de galère, que le Titus a fini par lui adjoindre un peu de concurrence dans son couloir droit en recrutant le Belge Leandro Zorbo, qui n’avancera pas masqué bien longtemps puisque c’est un joueur auquel les vidéos YouTube réservent l’hommage flatteur habituel : sens de l’élimination, précision devant le but. Tout comme Abreu.
Parce qu’il sent venir le débat inutile, Nicolas Huysman coupe court : «On ne programme pas toute une saison sur un seul joueur.» La phrase fait double sens : Artur Abreu, depuis deux saisons, était devenu l’alpha et l’oméga de Pétange malgré l’élévation visible du niveau de l’effectif et il n’est donc pas plus mal pour l’équipe d’en faire un joueur (presque) comme les autres. Et puis vu l’accumulation de matches qui s’annonce et le manque de temps de jeu d’Abreu autant que de Zorbo (puisque son club des Francs-Borains et la D3 belge étaient à l’arrêt) ces derniers mois, instaurer un turn-over dans le couloir gauche ne semble pas un trop mauvais calcul.
À supposer bien sûr, que leur coach les destine tous les deux au même poste. Ce qui n’est pas avéré. Huysman, qui rappelle qu’il a eu Zorbo sous ses ordres aux Francs-Borains sur la saison 2018/2019, garde le souvenir d’un garçon qui a inscrit 15 buts en D2 amateure qui peut aussi jouer axial. Avec Maah blessé et Nanizayamo parti, voilà un secteur dans lequel ne subsiste plus que Mokrani au moment de reprendre la compétition.
Une pierre de moins dans le jardin d’Abreu, qui ne voyait de toute façon pas les choses de manière aussi négative : «J’ai l’impression que comme moi, Zorbo préfère le couloir gauche mais je ne vais pas me mettre dans la tête que c’est un ennemi ! Il est là, comme moi, pour aider. Il vient ajouter à la concurrence, à moi de travailler. Et puis vous savez, je ne postule pas vraiment à une place de titulaire avant au mieux deux ou trois semaines et vu l’état des terrains qui font un peu peur, c’est bien d’avoir beaucoup de monde.» Amen.
«Abreu, il pue le foot»
Cinquième plus mauvaise attaque de BGL Ligue, Pétange savait parfaitement que son meilleur buteur de la saison passée (10 buts en 17 journées de championnat) et de celle d’avant (8) allait revenir en ce début d’année mais sans garantie de retrouver immédiatement ses sensations. Or l’urgence, vu la situation, vu la crainte que tout puisse de nouveau s’arrêter et figer les positions, c’est d’être efficace immédiatement.
Or en fin d’année dernière, avant même qu’on apprenne qu’on ne rejouerait plus au football en 2020, Huysman avait posé un diagnostic dont il se sert aujourd’hui : «On est déficients dans le dernier geste, on ne tue pas les matches. Or Leandro Zorbo sait tuer un match.» Mais il n’aura pas la peau d’Artur Abreu, promis : «Je n’ai aucun doute sur la mentalité d’Abreu, a aussi dit Huysman. Il pue le foot et on voit qu’il a envie. C’est aussi l’un des meilleurs joueurs du pays quand même !» Il devrait d’ailleurs retrouvé le brassard qui était passé, depuis, sur les biceps de Hamzaoui et Kakoko, même si c’est le genre de responsabilités que son entraîneur aime «partagées».
Peut-être dimanche, si l’on joue, verra-t-on les deux ailiers sur la pelouse de Hostert. Abreu, qui n’a plus rejoué le moindre match, même amical, depuis 345 jours – «c’est bête ce que je vais dire, mais je suis un peu content que le Covid soit passé, je n’ai presque rien raté» –, s’estime capable de faire 20 à 30 minutes et il recherchera avant tout «à se sentir libre, dans la tête, de ne plus penser à la blessure. Alors la confiance reviendra».
Et alors Pétange pourra peut-être compter sur deux joueurs décisifs qui se relaieront à son chevet. C’est ainsi, en tout cas, que Nicolas Huysman le conçoit, lui qui s’enthousiasme devant le turn-over du leader de Ligue 1, Lille, qui compte six joueurs offensifs à plus de treize matches de championnat, dont cinq à plus de trois buts. «C’est énorme de trouver ce genre de fonctionnement.» Et c’est tellement mieux que de tout miser sur un seul homme…
Julien Mollereau