La FLF et les clubs vont devoir se conformer à un protocole incroyablement exigeant pour pouvoir jouer à l’international, fin août. Des exigences logiques et surréalistes en même temps.
L’UEFA est souvent fidèle à son petit côté jusqu’au-boutiste. Mais on n’a pas besoin de considérer la lutte contre le coronavirus comme une priorité (c’en est une, de toute façon) pour savoir que l’instance nyonnaise en fait presque un peu trop. Pour des clubs comme ceux que le Grand-Duché va envoyer en Coupes d’Europe, par exemple, cela va être un véritable supplice. Les quatre clubs concernés ont d’ailleurs rendez-vous avec la FLF sous peu pour évoquer le sujet.
Ils s’y sont mis à six médecins, d’un peu partout (Allemagne, Croatie, Angleterre, Pays-Bas, Pologne, Espagne) pour suggérer qu’il faut, à l’international, un protocole capable de créer une sorte de « couloir-bulle » pour les équipes et leurs accompagnants. C’est bien joli mais l’UEFA reste l’UEFA et « le non-respect de ces règles pourrait avoir de lourdes conséquences et entraîner des mesures disciplinaires ». Attention, « spoiler-alert », les dirigeants du Fola, du Progrès, de Differdange et de Pétange vont devoir se dépouiller pour que leurs joueurs puissent monter sur un terrain, fin août. Et d’aucun ne cachent pas que les demandes qu’on leur a formulé sont « aberrantes » mais qu’il faudra malgré tout s’y plier. Point positif : Pétange jouera au Galgenberg, sur la pelouse du Fola et le Progrès au Parc des sports d’Oberkorn, sur celle de Differdange. Il n’y a donc que deux enceintes à mettre aux normes de cette période un peu folle. Petit aperçu de tout ce que réclame l’UEFA, accrochez vos ceintures, même si c’est pour le bien de tout le monde…
Un Mister hygiène et un Mister protocole par club
L’UEFA exige de l’ordre et de la discipline pour son protocole sanitaire. Et aussi des référents dans chaque club. Aussi faut-il désigner, en interne, un officier de liaison médical chargé de tout ce qui touche aux tests (et ils seront nombreux et extrêmement précis), mais aussi un officier de soumission au protocole pour ce qui a trait à la mise en œuvre des mesures d’hygiène. Et il faut enfin un officier d’hygiène sachant parler l’anglais et qui veillera de son côté à ce que chaque personne pénétrant dans l’enceinte du stade soit contrôlée. Voilà la partie immergée de l’iceberg : on ne vous dit pas combien de « petites mains » seront nécessaires pour désinfecter les vestiaires et les communs la veille du match et le jour du match…
Des tests, des tests, encore des tests, toujours des tests
Test buccal, test nasal… à trois jours de match, il faudra passer au labo pour se faire tester. Mais pour ceux qui se déplaceront, ce sera plus compliqué. Il faudra être testé avant le départ à J-3, J-2 ou J-1 selon ce que le pays hôte réclame, voire éventuellement une deuxième fois sur place pour avoir le droit de mettre le pied en terre étrangère, en fonction des règles en vigueur dans le pays. L’idée : avoir au moins six heures avant le coup d’envoi le résultat des tests. Mais cela posera problème puisque pour pénétrer dans n’importe quelle enceinte d’Europe, il faudra pouvoir justifier d’un contrôle négatif. Ce qui exclut théoriquement le fait de pouvoir disputer un dernier entraînement, la veille du rendez-vous ?
En attendant, nos clubs se posent la question de la fiabilité et de l’éthique des laboratoires étrangers et aimeraient des garanties de la part de l’UEFA, pour ne pas se voir annoncer dix tests positifs à la veille du match (donc autant de joueurs forfaits) et découvrir à leur retour au pays que les tests étaient bidons. Une crainte justifiée.
Salon VIP, bus sur le tarmac et… une chambre par joueur
L’UEFA « recommande chaudement » de voyager par vol charter. Une façon de se déplacer qui coûte un rein mais soit… Il faudra de toute façon que l’avion soit désinfecté avant, après. Les joueurs s’y sentiront vraiment entre eux et ça ne les changera pas : ils voyageront coupés du monde. Les équipes sont invitées à se tenir à l’écart d’absolument tout le monde (y compris de leurs dirigeants – délégations limitées à dix personnes -, qui sont priés de voyager par un autre moyen et de se loger ailleurs), d’être perpétuellement masquées en public et si possible de se mettre en contact avec les aéroports qu’elles fréquenteront pour se faire ouvrir les loges VIP afin de ne croiser personne. À défaut, une sorte de corridor sanitaire fera l’affaire. L’UEFA, qui n’a aucun scrupule donc, à demander à ce que « ses » clubs ne soient pas traités comme le commun des mortels pour protéger ses compétitions, demande même, dans la mesure du possible, d’expédier des bus sur le tarmac et de négocier des procédures douanières simplifiées.
Le séjour, de toute façon, ne sera pas une sinécure. Les joueurs, habitués à loger deux par deux, seront contraints à rester seuls dans leur chambre (là aussi, des surcoûts phénoménaux) et pas très longtemps puisque les clubs sont invités à repartir sitôt après la fin du match. Dommage, les conditions d’hébergement étaient nickel : le staff des équipes en personne devrait, théoriquement et dans la mesure du possible, s’acquitter de toutes les tâches annexes généralement dévolues au personnel hôtelier, y compris, donc, le service à table et le lavage des équipements. Bien évidemment, sauf en cas de séjour « long », impossible de quitter l’hôtel.
Des miroirs dans la zone antidopage !
Pas d’escorte, pas de cheerleaders, pas de musiciens, pas de mascotte, pas de poignées de mains, pas d’échange de maillot (ce n’est pas souhaité en tout cas) mais quand même… un échange de fanions. Bref, le folklore des entrées sur le terrain sera réduit à sa plus simple expression. Pour éviter que les vingt-deux joueurs qui s’écharperont sur le terrain pendant 90 minutes traînent côte à côte dans le tunnel, ils entreront de manière séparée, comme les rugbymen, si l’espace est trop étroit au goût de l’UEFA. Le parc des sports d’Oberkorn et le Galgenberg offrent des couloirs plutôt larges. À voir ce qu’en dira l’UEFA.
Toujours est-il que la taille des vestiaires sera méticuleusement étudiée et que les clubs pourraient se voir demander le rajout de structures annexes pour garantir la distanciation sociale entre joueurs. D’ailleurs, les éventuelles tables de massages devront être installées à part et les bains froids, sauna, jacuzzi interdits. Il faudra aussi rallonger les bancs de touche, pour permettre un mètre de distance entre chaque remplaçant et membre du staff, quitte à leur laisser au besoin des places en tribune, à l’écart du public.
Pour fluidifier le jeu, les traditionnels ramasseurs de balle seront en nombre limité et dûment munis d’une autorisation parentale. Pour eux, ce sera masque obligatoire, ballon au pied exclusivement et désinfection des mimines après l’échauffement et au début et à la fin de chaque mi-temps. Quatre à six seulement si les tribunes sont proches de la pelouse. Six à huit s’il y a une piste.
Enfin, les tests anti-dopage seront d’un genre un peu spécial. Il faudra installer des miroirs afin que les contrôleurs puissent surveiller leurs « candidats » tout en respectant la distance de sécurité. Bref, tout sauf une partie de plaisir, au propre comme au figuré.
Julien Mollereau
Spectateurs : il vous faudra un billet, un test négatif et la bonne température
Les joueurs ne feront pas n’importe quoi pour avoir le droit de participer à la Ligue des champions et à l’Europa League ? Eh bien vous, spectateurs, n’aurez pas le droit non plus à énormément de liberté pour les voir jouer. Votre température sera prise à l’entrée et elle a plutôt intérêt à être bonne ou vous n’entrez pas (même si, apparemment, le protocole vous garantit un deuxième test de contrôle).
Mais il vous faudra aussi une attestation de négativité. Sur place, ce sera masque pour tout le monde si le club ne peut garantir un espacement de deux mètres minimum (déjà installé à Differdange par exemple) et obligation pour le club de vous en vendre (et donc d’avoir un stock). Toute personne prise sans son masque sera susceptible d’être éjectée.
Personne, en outre, ne regardera la rencontre debout. Pour le jour du match, les clubs seront d’ailleurs tenus d’établir des listings avec les noms des personnes susceptibles d’accéder à chacune des trois zones de l’enceinte. Elles seront toutes matérialisées avec des couleurs très précises afin de ne pas laisser le moindre doute et un système au sol sera installé dans chaque lieu où une file risque de survenir.