Le Quotidien Indépendant Luxembourgeois
Le FC Differdange 03 nous a habitués, depuis cinq ans, à d’invraisemblables exploits. Mais celui qu’on exige de lui ce jeudi soir (19h, stade Josy-Barthel) contre le grand Trabzonspor, vainqueur 1-0 à l’aller en Turquie au 2e tour d’Europa League, dépasserait d’assez loin tout ce qu’il a pu réaliser jusque-là. Y compris le 25 juillet 2013 à Utrecht.
La configuration est la même qu’il y a deux ans contre Tromsø (un but de retard avec match retour à domicile), mais le calibre de l’adversaire est bien plus élevé que celui des Norvégiens, venus à l’époque s’imposer dans une cruelle séance de tirs au but, et le FCD03 bien plus fatigué, semble-t-il.
Differdange a de l’expérience et un mental gros comme ça, mais doit-il encore apprendre à être méchant, voire mal élevé? Ces 72 dernières heures, on n’en finit plus de parler de ce match amical contre Louvain (1-6) que le club a choisi d’honorer, dimanche, bien qu’il se soit retrouvé coincé entre deux rencontres épuisantes face à Trabzonspor.
Le rendez-vous était prévu de longue date et il paraît que jouer une D1 belge, cela ne se refuse pas. En tout cas, cela ne se décommande pas. Pourtant, l’impact sur les joueurs de cette lourde défaite et des kilomètres parcourus aura été au moins physique et peut-être même mental. Marc Thomé a d’ailleurs choisi de faire un petit mea-culpa (« C’est ma faute. Je n’aurais pas dû programmer ce match à ce moment, puisque Differdange va TOUJOURS au 2 e tour ») sans dire s’il regrette de ne pas avoir choisi, tout simplement, d’annuler.
C’est ce que Trabzonspor, lui, a fait en début de semaine. Sans aucun scrupule ni égard pour le F91, qui lui avait dit oui pour un amical de dernière minute. Arveladze a changé d’avis et suivi son propre intérêt. Officiellement pour un problème de joueurs blessés. Officieusement pour éviter que tout le monde vienne se rincer l’œil lors de cette opposition que Dudelange a voulu optimiser en l’annonçant au grand public le plus normalement du monde.
Entre un grand club qui ne recule pas devant la possibilité de se faire des ennemis pour son manque d’égards et un petit club qui honore ses engagements même quand cela l’embête prodigieusement, on voit tout de suite qu’il y en a un des deux qui met plus de chances de son côté, et ce n’est pas forcément le plus gentil.
À cet égard, le FCD03 mise peut-être beaucoup trop sur son légendaire mental pour compenser cette petite erreur de gestion, mais bon, c’est comme ça qu’il nous plait, quand il ne calcule pas…
«Le mental peut battre la qualité»
Prenons donc ce match retour pour ce qu’il est : une traditionnelle opposition de David contre Goliath, dont David, dès lors qu’il est habillé en rouge et noir, sort souvent vainqueur. Sauf que là, David est un peu plus fatigué qu’il y a une semaine et Goliath, qui n’avait que dix jours d’entraînement dans les pattes, un peu mieux préparé. C’est pourtant là-dessus que Jean-Philippe Caillet, désormais bras droit de Marc Thomé, mise : « Espérons que physiquement et tactiquement, ils ne soient pas encore tout à fait prêts. »
Rien qu’au niveau de l’effectif, ils sont loin d’être prêts. Sans Mbia ni Cardozo ou Bosingwa, ce Trabzonspor-là, 8 e de finaliste de la dernière édition (éliminé par Naples), est forcément un peu plus prenable qu’il ne le sera dans un mois. Et le match qu’il a sorti dans son stade Hüseyin Avni Aker, mercredi dernier, autorise même à croire qu’il est largement prenable. Soit. Mais il y a aussi la réalité du score de l’aller et ce 1-0 qui ne laisserait que peu d’espoirs même à une équipe professionnelle chevronnée.
Il y a d’ailleurs encore de l’amertume chez Marc Thomé, qui retrouvera son banc de touche ce soir après avoir suivi l’aller en tribunes pour suspension : « Je continue de croire qu’un match nul aurait été mérité et cela va être à eux de nous démontrer sur le terrain qu’ils sont plus forts que nous. J’ai lu que le mental peut battre la qualité. On va jouer là-dessus parce qu’au niveau de la qualité, il n’y a pas photo. »
Contrairement à 2013, à Utrecht, le FCD03 – qui devrait aborder son match dans le même dispositif (et donc avec deux milieux offensifs) et avec les mêmes joueurs – ne sera pas qualifié au coup d’envoi. Contrairement à Tromsø qui avait failli passer à la casserole le même été, Trabzonspor a assez de charisme pour tenir fermement la barre après avoir pris un petit avantage. Reste que c’est Differdange, que c’est l’Europa League et que c’est une histoire d’amour qui renverse tout. Même la fatigue, même la logique.
Julien Mollereau
Arveladze : « On va prendre nos précautions »
Shota Arveladze, le coach de Trabzonspor, est plus que serein avant le retour.
Le Quotidien : Vous aviez indiqué après le match aller que votre manque de préparation expliquait une performance médiocre de vos hommes. Et avant le retour?
Shota Arveladze : En entamant ce deuxième camp de pré-saison à Trèves, on a eu ce qu’on voulait. On passe du temps ensemble et on se comprend mieux à l’intérieur du groupe. Ce sera un avantage pour nous par rapport à l’aller.
Vous êtes donc… mieux préparés?
On s’est surtout entraînés physiquement et mentalement. Oui, de ce côté, on se sent plus prêts.
Ekici, visiblement gêné, a été remplacé à l’aller alors qu’il était le seul à vraiment sortir du lot, notamment en marquant l’unique but du match sur coup-franc. Comment va-t-il?
Je pense qu’il sera apte à jouer. Il a eu quelques pépins mais je suis positif, on devrait pouvoir compter sur lui.
Quelle sera votre stratégie?
On ne change rien. On a des gars expérimentés dans l’équipe et on doit se servir de cette expérience. On sait pourquoi on est là : pour la qualification. Mais on est une équipe d’attaque et on va essayer de le prouver. Nos joueurs sont assez intelligents pour savoir quand ils peuvent prendre des risques ou pas.
Et vous attendez-vous à des changements notables dans la façon dont le FCD03 va aborder son match retour?
Je n’attends pas de changement radical non plus de leur part. On sait ce qu’ils sont capables de «performer» comme match et je sais d’avance que cela ne sera pas ouvert. Ce ne sera pas facile pour eux. Bien sûr, ils seront obligés de prendre des risques mais ils ne vont pas tout risquer, justement. Je m’attends à des contre-attaques organisées. Mais on va prendre nos précautions et on sera assez intelligents.
Julien Mollereau
