Frustré par la défaite au Swift, le coach d’un F91 pourtant resté leader, se pose des questions lourdes de sens.
Carlos Fangueiro n’a pas caché sa déception, voire sa colère, dimanche soir, l’issue de la défaite contre le Swift (1-0). Elle ne lui a pas coûté sa première place mais l’a mis sous la pression directe de trois clubs au moins d’ici à la fin d’année. Lundi soir, le technicien dudelangeois a décompressé à Mondercange, où il suit sa formation pour la licence UEFA A aux côtés de Mario Mutsch, René Peters, Oliver Lickes (Medernach) ou François Papier (adjoint à Strassen). Cela l’a-t-il détendu? À peine.
La déception palpable qui était la vôtre au coup de sifflet final de Swift – F91 (1-0), dimanche dernier, est-elle dissipée? Cela a-t-il été d’autant moins difficile quand vous vous êtes aperçu que vos principaux concurrents non plus, ne s’étaient pas imposés ?
Carlos Fangueiro : Ce sont les bons mots. Tout ce que vous venez de dire. Mais ce qu’il reste le plus, c’est la frustration parce que c’est la deuxième fois cette saison qu’on peut creuser un écart et qu’on n’en profite pas. Mais bon, finalement, les autres non plus. C’est visiblement un championnat très compétitif, mais l’avenir, c’est encore loin…
Pourtant, il y a moins d’un mois, vous battiez sèchement le Fola chez lui, au Galgenberg, et alors que le Progrès et le Swift n’était toujours pas très rassurants, on se disait que vous aviez déjà tout en mains…
À un moment, j’ai été convaincu, moi aussi, qu’on pouvait gagner clairement ce championnat. Mais comme je vous l’ai dit : cela fait deux fois qu’on ne profite pas d’occasions qui nous sont données de faire des différences. C’est pour ça que je me pose la question : est-on vraiment prêts pour être champions? Est-ce qu’on est assez forts mentalement? Et je vous avoue que je ne sais pas. Par exemple contre Strassen, on n’a pas le droit de perdre deux points. Pas après la première mi-temps qu’on produit et toutes les occasions qu’on rate. Notre domination était alors incroyable. Mais en deuxième période, on n’a pas joué du tout. Un peu comme contre le Swift : on était plus forts en première période mais en deuxième, on a perdu beaucoup de duels. Strassen, Hesperange… les moments importants, on ne les saisit pas!
N’est-ce pas simplement un petit coup de mou physique ?
Non, c’est vraiment une question mentale. Contre le Fola, oui, on était prêts. Contre Strassen et le Swift, non. Pourtant, avant le match contre Strassen, si vous aviez vu notre semaine d’entraînement! Concentration, rigueur, envie, qualité… c’était fantastique.
Strassen, Hesperange… les moments importants, on ne les saisit pas
C’est surtout la baisse de régime de vos attaquants qui se remarque, à l’heure actuelle.
C’est probablement dû au manque de concurrence du moment. Pendant tout le début de saison, ils étaient à quatre pour deux places et cela se voyait. Depuis quelques semaines et les blessures d’Edvin Maratovic et Samir Hadji, les deux n’étant de retour que récemment, il y a sans doute eu du relâchement chez Hassan Nader et Adel Bettaieb. Ou trop de confiance. Il y a aussi que ces derniers temps, les remplacements que je fais ne sont plus décisifs. Ils n’amènent plus la qualité du début de saison, ils ne donnent plus forcément leur vie pour l’équipe.
Danel Sinani, votre joueur le plus décisif du début de saison, est sorti très tôt au Holleschbierg dimanche, l’issue de son plus mauvais match depuis début août. Il baisse lui aussi de pied après d’autres matches relativement anonymes, notamment contre son ancien club du Fola ?
Oui, on a pu constater qu’il n’a pas fait un grand match contre le Swift mais si je l’ai fait sortir, alors que c’est un garçon qui peut faire la différence à tout moment, c’est parce que durant la semaine, il a eu une douleur au mollet et vu sa prestation, je pensais qu’il ressentait peut-être quelque chose. Et lui, c’est le dernier qui me dira qu’il a mal.
Tout cela est dommageable et pourtant, le F91 aurait tout intérêt à profiter de sa fin d’année contre les deux relégables du moment, Rodange et le RM Hamm Benfica, pour travailler son goal-average. Vu le resserrement en tête et le fait que ce critère a souvent été décisif ces dernières saisons…
La DN, c’est quand on pense que cela va être simple qu’on se rend les choses compliquées. Donc on ira d’abord pour gagner. Mais le goal-average, à la fin, oui, pourrait bien être décisif cette saison encore.
Avant Swift – F91, Flavio Becca, ancien sponsor du F91, néo-sponsor du Swift, nous disait comme il avait eu raison de vous installer à la tête du vestiaire dudelangeois. Comment avez-vous pris cette sortie ?
J’ai eu l’opportunité de lire ça, oui. C’est lui qui m’a appelé et c’est lui qui m’a fait signer. On devait travailler ensemble et il a pris un autre chemin, mais j’ai été content de voir ce qu’il pensait de moi. Ça me donne envie d’être encore plus exigeant.
Et pour tous les journalistes sportifs du pays, cela a été motif à interprétation : on se dit que fatalement, il aura envie de travailler un jour avec vous du côté du Holleschbierg…
Au Swift? On ne sait jamais. Dans le monde du foot, un jour vous êtes ici, un autre jour vous êtes là. Mais pour l’heure, je suis content de travailler à Dudelange, malgré le fait qu’on n’ait pas beaucoup d’argent. On a aussi beaucoup de gens qui s’investissent pour le trouver, cet argent, et payer les salaires en temps et en heure.
Flavio Becca a aussi indiqué qu’il aurait voulu prendre plus de joueurs du F91 lors de son départ vers le Swift. Ça vous inquiète ?
Le foot, c’est comme ça. On a des joueurs qui, aujourd’hui, sont valorisés par leurs performances. Tu bosses bien? On risque de te proposer des meilleures conditions ailleurs. Et si jamais on a un jour des garçons qui partent là-bas, alors il faudra bien trouver à les remplacer.
Pour finir, le gouvernement a décidé de changer prochainement la loi autour des sportifs et de leur capacité à continuer à jouer au football en fonction de leur vaccination. Cela vous inquiète-t-il, à Dudelange ?
La non-vaccination, chez nous, cela concerne encore six ou sept joueurs dont certains titulaires. Et oui, ça pourrait poser problème. Et si le championnat se décidait sur un match avec des joueurs empêchés de jouer parce qu’ils n’ont pas eu le temps de se vacciner ?
Julien Mollereau