Un mois après la disparition d’Emiliano Sala dans le crash de son avion, Cardiff City évalue ses options juridiques pour savoir s’il est dans l’obligation de verser à Nantes les 17 millions d’euros convenus au moment du transfert.
Sur quelles bases se fondent les « Bluebirds » pour ne pas payer les « Canaris » ? Selon le Guardian, le club français avait laissé aux Gallois jusqu’à mercredi pour effectuer son premier versement de cinq millions de livres (5,75 millions d’euros). Pour l’instant le FCNA attend…
Quelle est la position de Cardiff ?
Le principal argument du club gallois pour retenir le paiement est l’attente du rapport final de l’AAIB, l’organisme britannique qui enquête sur l’accident. Une première mouture du rapport avait été promise dans le mois suivant le crash : l’AAIB devrait donc la publier d’ici vendredi. Cardiff City insiste sur le fait qu’il n’a pas arrangé le voyage fatidique du joueur. En l’occurrence, le vol avait été organisé par Mark McKay, l’agent mandaté par le FCNA pour mener à bien le transfert de Sala.
Selon The Telegraph, Cardiff estime que si le pilote David Ibbotson ne disposait pas de la licence nécessaire pour transporter commercialement des passagers, une plainte pour négligence pourrait être déposée contre les organisateurs du vol. Selon les médias britanniques, le promu gallois viserait alors le clan McKay, et pourquoi pas, Nantes. De son côté, le père de Mark, Willie McKay, lui aussi agent et impliqué aux côtés de son fils, a accusé Cardiff de le « jeter aux lions » en en faisant une sorte de coupable idéal pour éviter de payer.
Dans des propos tenus dans le Times, il a indiqué que son fils Mark avait organisé tous les vols des parties intéressées dans le transfert, notamment les fois où l’entraîneur Neil Warnock était venu observer Sala en France. Au moment de l’organisation du vol, le club gallois n’a d’ailleurs rien trouvé à redire et un représentant des « Bluebirds » attendait Sala à l’aéroport de Cardiff.
Quelle est la position de Nantes ?
Pour les Canaris, le Certificat international de transfert (CIT) a été reçu le lundi 21 janvier, avant l’accident d’avion, ce qui marque la fin de la relation contractuelle de Sala avec Nantes. Tout ce qui se passe après, et donc notamment la façon dont il rejoint Cardiff, ne les regarde plus. Quant aux relations avec les McKay, s’ils ont bien eu un mandat, celui-ci a expiré avec la signature du contrat, puisque leur mission, trouver un club à Sala, était terminée.
Si le club français affirme avoir reçu le CIT, les autres instances du football ne se prononcent pas. La Premier League a indiqué ne pas vouloir émettre de commentaires en raison du caractère « sensible » du sujet. La Fifa a elle aussi regardé ailleurs, un porte-parole indiquant que l’instance mondiale n’avait « pas été contactée sur ce sujet ».
Pourquoi Cardiff s’interroge ?
Cardiff City a-t-il été dupé sur la valeur de l’attaquant argentin ? C’est l’autre piste poursuivie pour contester le transfert. Le club de Premier League se fonde sur la publication dans la presse d’un mail de Willie McKay adressé à Sala. L’agent écossais basé à Monaco explique : « C’est nous qui avons fait passer dans les médias que d’autres clubs te voulaient, comme West Ham, Everton, etc. afin de créer de l’intérêt. C’est comme ça que l’on fait ».
L’idée pour Cardiff serait alors de plaider une forme de fraude de la part de l’agent (qui était censé toucher 10% du transfert) : en faisant passer dans la presse britannique des intox, les McKay ont fait grimper le prix du joueur artificiellement. L’argument tient difficilement, tant la pratique est courante. De plus, Neil Warnock et son staff sont venus observer Sala en personne à deux reprises lors de matches de Nantes. Et ils ont à leur disposition, comme tous les clubs de ce niveau, les vidéos des matches de Sala et ses statistiques détaillées. Bref, ils n’étaient pas dans le flou du tout sur le profil de l’Argentin.
Et maintenant ?
« Il y a, à mon avis, deux solutions possibles », estime l’avocat sportif Gianpaolo Monteneri, qui a dirigé le Département du statut des joueurs de la Fifa de 1997 à 2005. « La première est que les parties se sont mises d’accord pour se rendre devant la Fifa et, dans ce cas, l’affaire est soumise au comité du statut des joueurs en première instance, avec la possibilité d’un appel devant le Tribunal arbitral du sport (TAS) », détaille-t-il. « Mais il est également possible que les parties aient décidé (…) de s’adresser directement au TAS. Pour ce genre d’affaire, il y a une obligation de s’adresser à des organismes liés au football ou au sport. »
« Si certains délais, qui sont mentionnés dans le contrat de transfert, ne sont pas respectés, cela peut avoir des conséquences pour le club en question », ajoute Monteneri. « Cela peut aller d’un avertissement jusqu’à un retrait de points en championnat. » Cardiff, qui lutte pour le maintien en Premier League, peut-il vraiment prendre ce risque ?
LQ/AFP