Titré pour la deuxième fois en élite, il termine deuxième du scratch. Mais peut mettre, l’esprit tranquille, un point final à sa carrière.
Il claque des dents et ce n’est vraiment pas une image. Les vestes qu’il enfile et superpose n’y changent rien. Une quinzaine de minutes après la course, en attendant de revêtir son maillot de champion élite, Scott Thiltges a toutes les peines du monde à se réchauffer. Il n’est d’ailleurs pas le seul. Pas loin de là, Cédric Pries et Mats Wenzel ont le même souci. Deux fois, Scott Thiltges s’arrête de parler, littéralement saisi par le froid.
Beau joueur, il échange ses premiers mots d’après-course avec Loïc Bettendorff, le jeune espoir de 20 ans, de neuf ans son cadet, qui l’aura privé de la première place honorifique. Dès que ce dernier est passé devant lui, la cause était entendue. Les oreilles bourdonnantes du bruit des haut-parleurs, la tête embrumée par les vapeurs de bière, on voyait presque son cœur bouillonner sous son maillot. Jamais il n’allait abandonner au stand ses prétentions initiales, mais mieux valait se raviser, ne pas gâcher cette belle tranche de nostalgie.
Il dira par la suite deux phrases qui résumaient le fond de sa pensée vagabonde. «Oui, Loïc était le plus fort.» Et aussi : «Ce fut l’une des courses les plus dures de ma carrière…»
On aurait pu s’arrêter là, mais on l’invitait pour la dernière fois de sa carrière à dérouler le film de ce championnat national où, longtemps, pendant les deux premiers tiers de la course, il s’était posté seul aux commandes de la course et campait sans partage le premier rôle. «J’avais vu les autres courses et j’avais remarqué que c’était dur en fin de course pour tout le monde. Donc, je suis parti rapidement, mais ensuite, j’ai essayé de ne pas aller trop vite. Disons que j’étais à 90 %, puis Loïc (Bettendorff) est donc revenu. Nous étions ensemble quelques tours et, à la fin, il m’a juste manqué un peu», diagnostiquait-il.
Une bonne rasade de crémant
Vrai que longtemps on le crut capable de se maintenir avec cette dizaine de secondes d’avance qui finiraient par se retrouver dans la colonne du passif à l’arrivée. Mais on le sait, même deuxième, il était quand même le champion national élite et c’est forcément son nom qui reviendra au moment d’évoquer le champion national version 2022 lorsque, plus tard, les mémoires vacilleront.
Bien sûr qu’il aurait préféré pleinement goûter son départ avec un succès scratch qui lui aurait rendu la copie un poil plus nette, mais que pouvait-il y changer? Un peu plus tard, les regrets affleuraient. «Peut-être que si j’avais pris le risque d’aller à 100 % dès le début, alors cela aurait fonctionné. Mais c’est plus facile à dire après. Mais je suis quand même très content de terminer ma carrière en champion. Il n’y a rien de plus beau, c’est super…»
On lui demande si une petite frustration se fait sentir. Il évacue rapidement cette idée. «Pour l’instant, non, tout va bien…» Enfin requinqué, il secoue sa bouteille de crémant, arrose l’assistance, puis, d’un geste qui semble prémédité, remplit sa chaussure droite pour en boire une rasade. Sa manière à lui de raccrocher au clou son vélo. De refermer une longue partie de sa vie sportive la conscience tranquille, le palmarès établi. La trentaine approchant, l’architecte du LG Alzingen va pouvoir passer à bien d’autres plans…