La prudence prévaut lorsqu’on évoque les juniors, mais la sociétaire du CT Aterdaul est assez impressionnante depuis quelques semaines. D’ailleurs, Marie Schreiber, seize ans, vise haut.
Et dire qu’elle n’avait pas de bonnes jambes ! Dimanche à Cessange, sitôt la ligne d’arrivée passée, elle a vite replacé ses bras le long du corps. Elle s’est couverte et a dialogué tranquillement avec ses adversaires du jour qu’elle venait donc de battre.
Pas de signe de joie particulier. Elle effectuait un petit débriefing comme si elle était déjà une vieille habituée. Vrai que depuis le début de la saison, Marie Schreiber, junior première année, accumule les succès toutes catégories confondues en cyclo-cross sur le sol national. Mais à voir son attitude et sa facilité manifeste, on se pince pour se convaincre qu’elle n’a que seize ans.
«Je n’avais pas de bonnes jambes, j’ai fait une attaque pour faire le trou dans le dernier tour», s’excuse-t-elle presque. Comme si on allait lui reprocher d’avoir fait, une fois n’est pas coutume, traîner les choses…
Ça saute donc aux yeux de tous les observateurs, Marie Schreiber est une gagneuse au fort potentiel. Interrogée dans nos colonnes, Christine Majerus à qui on demandait ce qu’elle pensait de la relève luxembourgeoise avait prévenu à son sujet : «Marie Schreiber peut en surprendre beaucoup. Elle est encore jeune. Laissons-lui le temps. Mais je ne m’inquiète pas pour elle…
La multiple championne nationale n’hésite d’ailleurs pas à envoyer des messages d’encouragement ou de conseils à sa cadette, ravie de cette correspondance.
Je connais son potentiel mais elle m’a quand même un peu surpris
Pourtant, à écouter son grand frère Félix, 20 ans et étudiant en éducation physique à la faculté des sciences de Louvain, ce qui est marquant, c’est son caractère. «Si elle a quelque chose dans la tête, impossible de lui faire changer d’avis…», sourit-il, volontiers admiratif. Du coup, il évite de l’abreuver de conseils, laissant ce rôle à Michel Wolter, l’entraîneur national, qui dresse les plans d’entraînement de Marie. Mais évidemment, l’ancien champion national espoirs n’en pense pas moins. «Je connais son potentiel mais elle m’a quand même un peu surpris. Surtout lorsqu’elle a pris la 24e place en Belgique (à Hamme, le 16 novembre) d’une manche du DVV Trofee avec une grande partie des meilleures mondiales élites. Au Luxembourg, sur les épreuves locales, elle ne rencontre pas trop de concurrence, mais ce qu’elle fait est prometteur», poursuit Félix Schreiber.
Sa jeune sœur dispose en effet d’un mental conquérant. «C’est bien de remporter des épreuves puisque je vise le classement de la Skoda Cross Cup (NDLR : elle est justement en tête)», rappelle l’intéressée. L’enfant de Bettborn qui a débuté le cyclisme à l’âge de six ans parce que «toute ma famille en faisait» (NDLR : à commencer par Julie, sa grande sœur de 23 ans qui a depuis arrêté pour se consacrer à ses études) s’est prise de passion pour le cyclo-cross. «Je pense tout simplement que c’est cette discipline qui me convient le mieux», poursuit-elle.
Elle a du caractère mais ce n’est pas plus mal
«Pour le moment, ses qualités techniques sont indéniables, elle est très forte et elle court bien en course. Sa 24e place récemment en Belgique ou encore sa 7e place en octobre à Contern, avec des filles bien plus âgées, sont de bonnes indications. Elle a du potentiel, une grande marge de progression. Comme elle n’est que junior première année, il lui faut développer doucement son moteur et qu’elle fasse également de la route. Quant à son caractère, elle en a, mais ce n’est pas plus mal…», étaye Michel Wolter, l’entraîneur national qui s’occupe de ses plans d’entraînement.
Actuellement en troisième au lycée des sports, Marie Schreiber possède un emploi du temps favorable pour développer sa passion.
Cette fan de Mathieu van der Poel et de Sanne Cant, les deux champions du monde de la discipline, aimerait à compter de la saison prochaine franchir un nouveau palier. «Je sais que pour continuer à progresser, il me faudrait courir en Belgique, donc je vais chercher une équipe là-bas», prévient cette jeune fille élancée de 1,75 mètre, une taille idéale pour maîtriser sa technique.
Pour le reste, il faut s’habituer à la voir accumuler les succès sur le sol luxembourgeois. Mais en décembre, deux grandes échéances vont se présenter à elle : «Je vais m’aligner sur les manches de Coupe du monde à Namur (le 22 décembre) et à Zolder (le 26).»
Des épreuves qu’elle abordera dans la catégorie espoirs-juniors. Contrairement aux championnats du monde début février à Dubendorf (Suisse). «Là, poursuit Michel Wolter, les juniors filles vont pour la première fois avoir un championnat du monde à elles. Marie devrait faire partie des filles à suivre. Mais elle n’est pas la seule, elle retrouvera des concurrentes comme la Néerlandaise Shirin Anrooij, d’ailleurs victorieuse à Contern voici peu de l’épreuve internationale dames et juniors deuxième année…» La preuve qu’il lui faut continuer à travailler. Dans la plus grande sérénité.
Denis Bastien