Leader de la Skoda Cross Cup du haut de ses 38 ans, Isabelle Klein marque les esprits par ses performances comme sa personnalité et son parcours atypique.
Impossible de la rater. Depuis le début de la saison de cyclo-cross, une nouvelle tête s’est invitée sur les podiums des épreuves dames. Impossible surtout d’échapper à son sourire qui irradie souvent son visage lorsqu’elle s’impose comme ce fut le cas cet automne à Tétange et à Schifflange. Et même lorsqu’elle termine deuxième à Mondorf. Ou plus récemment encore, dimanche dernier, derrière Christine Majerus. «J’avais très envie de courir avec Christine Majerus et voir où j’en étais par rapport à l’une des meilleures du monde de la discipline», sourit celle qui avait pris également la sixième place, fin octobre, du cyclo-cross international de Contern alors remporté par Marie Schreiber.
Elle est repartie de Mamer, voici trois jours, avec un doux sentiment. «J’ai souffert un peu, mais je vois qu’il y a moyen de progresser», glissa celle qui avait fini à un peu moins d’une minute de Christine Majerus. Pour une première saison de cyclo-cross, il y a pire…
Cette jeune prétendante qui est venue avantageusement étoffer les rangs du peloton féminin luxembourgeois aux côtés de Nina Berton et Maïté Barthels, est à l’évidence une graine de championne de… 38 ans déjà. C’est peu dire qu’elle ne les paraît absolument pas. Alors lorsqu’on lui demande de dérouler le fil de sa déjà longue expérience sportive, elle s’exécute au pas de charge. Attention, le parcours n’est pas une simple ligne droite. Il y a des détours. Des virages. Mais jamais d’arrêt brutal. Une sorte de continuité. Ce qui explique aussi cela.
Car Isabelle Klein a versé tour à tour dans la natation, le triathlon puis le cyclisme version cyclosportives et VTT. «J’ai commencé par la natation que j’ai pratiquée jusqu’à mes 18 ans. J’étais bonne amie avec Diane Kapgen», explique l’ancienne brasseuse qui se souvient s’être qualifiée pour le 50 mètres lors des championnats d’Europe juniors 1998.
Puis Isabelle Klein se souvient en avoir eu «marre de la compétition», sans jamais pour autant s’arrêter «de s’entraîner pour le plaisir». Alors elle varie les modes d’expression. «Je me suis concentrée sur le vélo et la course à pied.» Elle remporte ainsi le classement féminin de la Charly Gaul en 2003 et dix ans plus tard, obtient par exemple la médaille d’argent aux Jeux des Petits États en VTT derrière… Christine Majerus. «J’ai remporté en VTT des épreuves de masse comme la Transmaurienne 2016, j’ai toujours aimé les épreuves marathon en VTT…»
Du sport plaisir dont elle fait son métier, puisqu’Isabelle Klein officie en tant que coach sportif, plus volontiers spécialisée dans les cours de natation : «Cela me fait plaisir d’initier et d’entraîner les enfants, j’aime bien motiver les autres.»
Les gens me demandent souvent pourquoi je ne reste pas sur une seule discipline. Je leur réponds qu’il y a tellement de belles choses à faire
Pas étonnant donc qu’elle ait longtemps traîné dans les épreuves de triathlon. Elle excelle en X-Terra (1 500 m de natation, 40 km de VTT et 10 km de trail) et lors des derniers championnats d’Europe, elle a eu un peu de mal à digérer sa disqualification pour une petite faute dans le parc fermé. Elle s’est consolée en remportant le titre national en septembre dernier du championnat 70.3, comme cela lui était déjà arrivé par le passé à Remich.
Isabelle Klein confesse une tendance touche-à-tout qu’elle ne veut surtout pas renier. «Les gens me demandent souvent pourquoi je ne reste pas sur une seule discipline. Je leur réponds qu’il y a tellement de belles choses à faire. Et puis j’avoue que j’ai toujours eu du mal à me décider...»
Le cyclo-cross, c’est son ami Georges Valentiny, lui aussi licencié au CT Toproad Roeserbann, qui l’y a donc entraîné. «Je connais beaucoup de monde dans le milieu du cyclisme et j’ai été très bien accueillie. J’en parlais l’autre jour à ma mère, j’entends des gens dans le public m’encourager alors que je ne les connais même pas…»
Si ses bons résultats émerveillent, c’est sans doute aussi qu’elle récolte là les résultats d’une existence vouée au sport. «Je m’entraîne dur depuis une vingtaine d’années, mais j’adore ça, souffrir dans le sport, ça me plaît. Mais je ne me sens pas usée, j’ai très bien géré mes efforts jusqu’ici. Je pense surtout que je bénéficie d’une très bonne base, ce qui explique ma saison de cross.»
Le speaker a dit à son micro que mon arrivée dans le cyclo-cross était une plus-value pour le cyclisme luxembourgeois. J’étais très gênée, mais aussi fière…
L’actuelle leader de la Skoda Cross Cup plonge désormais son regard vers les championnats nationaux qui auront lieu début janvier à Ettelbruck sur le nouveau tracé plat tracé autour du Deich. «Pour toutes les filles, c’est très motivant, résume-t-elle. Enfin, je pense que c’est plus intéressant d’avoir des écarts réduits entre les meilleures.»
La perspective de batailler, pourquoi pas, avec Christine Majerus et Marie Schreiber, n’est donc pas pour lui déplaire, même si elle sait rester à sa place. «Pour le moment, coupe-t-elle, je fais encore beaucoup trop de fautes techniques. Après chaque erreur, je me dis tout haut : zut! zut! Je manque encore de spécifique pour le cyclo-cross, mais cela me motive justement pour progresser…»
Mais la concurrence ne lui fait pas peur. «J’ai appris à gérer ça en natation…» Dimanche, après avoir terminée à 56 secondes de Christine Majerus, Isabelle Klein est allée directement féliciter la multiple championne nationale fraîchement élue pour la septième fois, meilleure sportive luxembourgeoise. «Je lui ai dis : bravo Christine! Je l’admire beaucoup pour sa carrière mais aussi sa façon d’être, sa personnalité, qui n’est pas complètement plongée dans les réseaux sociaux. Étant plutôt discrète de nature, j’aime sa discrétion et la façon qu’elle a de travailler pour toujours être meilleure…» De loin, on peut voir quelques ressemblances, même si la trajectoire d’Isabelle Klein, est singulière.
La juste assertion, l’autre jour de Camille Godelet, le speaker de la plupart des épreuves luxembourgeoises, n’est pas tombée dans l’oreille d’une sourde. «Le speaker a dit à son micro que mon arrivée dans le cyclo-cross était une plus-value pour le cyclisme luxembourgeois. J’étais très gênée, mais aussi fière…» Car c’était plutôt bien vu !
Denis Bastien