Sixième du Tour d’Italie, l’an passé, Bob Jungels s’est donné les moyens de préparer son affaire. Le champion national luxembourgeois compte sur ses progrès en montagne pour monter un palier supplémentaire et s’approcher du podium final. Et sur ses qualités de rouleur.
C’est son objectif numéro un pour cette saison
Bob Jungels ne l’a jamais caché. À partir du moment où il a confirmé, début janvier lors de la présentation de l’équipe Quick-Step Floors, qu’il serait, comme en 2016, au départ du Giro, le coureur cycliste a été clair. «C’est mon objectif numéro un cette saison. Les épreuves auxquelles je participerai avant seront autant de tests, mais c’est sur le Giro que je veux briller. Et comme l’an passé, je vais préparer ensuite les championnats du monde. Mais la priorité, c’est le Giro», avait-il insisté.
Pour le moment, il a respecté son plan de marche. Quatorzième de Tirreno-Adriatico, huitième récemment du Tour de Romandie, Bob Jungels a réalisé quelques attaques percutantes comme sur l’Amstel Gold Race et la Flèche Wallonne, mais sans jamais trop en faire non plus. Comme si une forme de sagesse le poussait à en garder malgré tout sous la pédale…
Sa forme : oui, il est au sommet…
Lorsqu’on lui a demandé s’il avait déjà ressenti d’aussi bonnes sensations depuis le début de sa jeune carrière, Bob Jungels n’a pas pu s’empêcher de laisser échapper un petit rire affirmatif.
« J’ai fait tout ce que je pouvais et c’est vrai que je ne me suis jamais senti aussi bien de ma carrière. Maintenant, c’est en dernière semaine que tout se jouera dans ce Giro et il conviendra d’être le plus frais possible à ce moment crucial de la course. Cela ne me gêne pas, car je sais de par les grands tours auxquels j’ai déjà participé que je récupère bien en dernière semaine. C’est l’un de mes atouts », répond-il.
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Son stage de préparation : des kilomètres et des kilomètres en haute montagne
Pour préparer leur numéro de mai axé sur le centième Giro, nos confrères de Vélo Magazine sont allés récemment rendre visite à Bob Jungels alors que le champion national s’entraînait du côté de la Sierra Nevada avec le fameux centre d’entraînement connu de tous les cyclistes, à quelques 2 700 mètres d’altitude. Bob Jungels y est resté comme prévu pendant trois semaines avant de revenir disputer l’Amstel Gold Race et la Flèche Wallonne.
« Quand je fais des stages en montagne et que j’enchaîne les longues montées comme je le fais ici en stage, ce long effort s’apparente à celui du chrono. Ça me sert indirectement. La musculature spécifique chrono, je la travaille ensuite avec un minimum de trois sorties sur le vélo de chrono par semaine », leur a-t-il expliqué.
« Ce stage en Sierra Nevada est presque obligatoire pour réussir dans un grand tour. Trois semaines, c’est long, un peu ennuyeux mais je m’y fais. Et puis ça permet de travailler en montagne », confirme Bob.
Ses adversaires : Il le sait, il y a du lourd…
Bob Jungels le sait bien, avant le départ de la 100 e édition, ce ne sera pas simple de faire sa place. Ou du moins, pas aussi simple que l’an passé. « Les deux grands noms, c’est Quintana et Nibali, les deux coureurs qui ont déjà inscrit leur nom au palmarès. Ensuite, il y a une dizaine de prétendants et j’espère bien en faire partie », note-t-il.
Effectivement, Bob Jungels peut s’inclure dans cette longue liste de noms qui, pour le moment, sont restés des prétendants. « C’est dur de dire qui seront mes principaux adversaires, mais c’est clair qu’un coureur comme Pinot qui a déjà terminé deuxième du Tour fait partie des principaux outsiders. Mais bon, Geraint Thomas est très fort. Tout comme Mikel Landa, son coéquipier chez Sky.
Il y a de grands grimpeurs comme le Russe Zakarin ou le Britannique Simon Yates, qui est vraiment en super forme. Il ne faudra pas oublier Kruijswijk, qui était tombé l’an passé près de l’arrivée alors qu’il était en rose. Et, bien sûr, Tom Dumoulin qui est un peu comme moi, un rouleur qui aimerait limiter les dégâts en haute montagne », se plaît à détailler Bob Jungels.
Reste à savoir quels sont les coureurs qui, au fil de la course, vont inexorablement disparaître et s’éclipser. En trois semaines, il va s’en passer des choses…
Grimpeur ou rouleur ? Il veut entretenir sa polyvalence
Et si la première qualité de Bob Jungels, tête bien faite, physique charmant doté de qualités physiques exceptionnelles, était d’abord d’être têtu, en fait le propre de tous les champions dignes de ce nom. Il faut l’être lorsqu’on est rangé, de par ses caractéristiques physiques, dans la catégorie des rouleurs (1,89 m pour un poids de forme à 70 kilos).
Or depuis longtemps déjà, Bob Jungels s’est mis en tête de devenir un coureur de grand tour. « Je ne serai jamais un pur grimpeur, mais je suis très content de mes progrès. Mon style est celui d’un grimpeur qui gère ses ascensions. Mon ambition, sur ce Giro, sera de limiter sans cesse les écarts par rapport aux grands grimpeurs sur les plus hauts sommets. Je vais courir sur la défensive dans ces moments-là. Ce que je veux chercher à éviter, c’est le jour sans qui me ferait tout d’un coup perdre plusieurs minutes », explique Bob Jungels qui saura aussi passer à l’action, comme on l’a déjà vu ces derniers temps.
« Je pense que Bob aura beaucoup d’occasions à saisir. Il ne lui faudra pas chercher à suivre à tout prix les purs grimpeurs sur les grandes étapes, je pense qu’il saura s’accrocher. Mais je le vois bien aller récupérer du temps sur des étapes de moyenne montagne », relève pour sa part Andy Schleck qui se range parmi ses supporters.
Son équipe : roulez jeunesse !
Il le dit sans qu’il ait besoin de chercher une formule plaisante ou diplomatique. «On s’entend vraiment bien, ça me fait plaisir d’aborder le Giro en tant que leader unique pour le classement général. Les gars qui sont là sont motivés et cela me fait plaisir de prendre le départ dans ces conditions. Les choses sont claires, l’équipe va travailler pour les sprints de Fernando (Gaviria) qui a l’avantage de bien passer les bosses, ce qui est préférable car dans beaucoup d’étapes, il y aura des petits talus à passer sur le final. Et de l’autre côté, on va travailler pour que j’obtienne le meilleur classement général possible. J’aurai des bons coureurs qui seront avec moi en cas de bordure (NDLR : Iljo Keisse, Davide Martinelli, Maximiliano Richeze et Dries Devenyns très polyvalent). Mais j’aurais surtout beaucoup de grimpeurs à mes côtés (Eros Capecchi, Laurens De Plus et Pieter Serry).»
Vrai que cette jeune équipe Quick- Step Floors qui sera dirigée par l’expérimenté technicien italien Davide Bramati a vraiment fière allure.
La dynamique du succès pourrait évidemment venir du sprinteur colombien, Fernando Gaviria qui devrait démontrer son agilité dès aujourd’hui en Sardaigne.
Mais trois semaines dans un grand tour c’est long et la cohésion devrait venir en cours de route. Pour la première fois de sa carrière, Bob Jungels disposera d’une équipe à son service. «Une motivation supplémentaire car c’est un honneur», conclut-il.
Denis Bastien