Tom et Luc Wirtgen auront la chance mais aussi la tâche de tenir leur rang au sein de leur formation Bingoal pour un monument très attendu, dimanche.
C’est dit comme ils le pensent. «Il n’y a pas beaucoup de frères professionnels dans le peloton et il n’y en a pas beaucoup qui peuvent se retrouver au départ d’un Tour des Flandres pour la deuxième année consécutive. Il y a les frères Naesen (NDLR : Oliver et Lawrence qui portent les couleurs de l’équipe AG2R-Citroën) et nous…»
Interrogés séparément, Tom et Luc Wirtgen tiennent presque le même discours. Ce n’est pas nouveau. Les présentations sont déjà faites. Et refaites. Pour faire court, ils portent le même maillot, celui de l’équipe formatrice de deuxième division, Wallonie-Bruxelles.
L’aîné, Tom, a 25 ans. Luc, le plus jeune, deuxième saison professionnelle, en a trois de moins. Le 18 octobre dernier, ils étaient allés au bout de leur premier Tour des Flandres. Luc s’était classé 88e, Tom, 90e. «Mon meilleur souvenir», s’était écrié cet hiver le cadet. Ils sont repartis pour une nouvelle aventure.
C’est agréable de se retrouver ensemble, mais on ne fait pas exprès, surtout en ce moment où toutes les courses sont rapides et nerveuses
Les deux enfants de Hostert se sont d’ailleurs retrouvés pas plus tard que mercredi pour À Travers la Flandre, dernière répétition avant le monumental Ronde van Vlaanderen. De nouveau dans les pas l’un de l’autre. Ou presque, 83e place pour Luc, 88e, pour Tom, dans le même peloton.
«C’est agréable de se retrouver ensemble, mais on ne fait pas exprès, surtout en ce moment où toutes les courses sont rapides et nerveuses, on voudrait se suivre qu’on ne pourrait pas…», sourit Tom Wirtgen.
Bon, l’histoire des frères Wirtgen n’est pas banale, même si les fratries de cyclistes, cela existe depuis longtemps déjà, surtout ici au pays des frères Schleck…
Ce qui peut étonner, c’est qu’ils n’ont pas le même profil du tout. Tom, du haut de sa grande taille (1,91 m), regarde de haut son jeune frangin, placé douze centimètres plus bas. «Je marchais bien la semaine dernière sur la course française Cholet-Pays de Loire, c’est sans doute pour ça que je fais à nouveau partie de l’équipe pour le Ronde cette année. C’est un honneur. Mais ensuite, j’aurai sans doute la chance de pouvoir m’aligner sur les classiques ardennaises…»
Tom rêvait de son côté de découvrir Paris-Roubaix – où pour la première fois, son équipe Bingoal-Pauwels WC est invitée – mais il devra remiser ses ambitions en octobre. Pas si grave au fond. «Bon, reprend-il, le souci sera de reconstituer un calendrier cohérent, car beaucoup d’annulations et de reports vont désormais s’opérer en France pour ces prochaines semaines…»
Autant donc goûter à pleines dents ce Tour des Flandres qui s’annonce magnifique en dépit de l’absence de public. «C’est curieux, mais on s’habitue, note Luc. Sur le Ronde, ce qui est impressionnant, c’est l’intensité de la bataille dans les 100 derniers kilomètres. Cela n’arrête jamais, ça monte et ça descend de mont en mont. Et ça va de plus en plus vite… Même mercredi pour À Travers la Flandre, cela a roulé bien plus vite que prévu. On avait prévu de placer un coureur dans l’échappée, mais de véritable échappée matinale il n’y a pas eu. Toute la course, j’ai eu l’impression de rouler à bloc…»
C’est vrai que pour exister, la seule chance, c’est de devancer un peu la grande bagarre
Tom acquiesce. Mais dimanche, il s’efforcera de «choper» le bon coup, enfin celui qui se dessinera dans la première partie de la course. Avant, pourquoi de donner un coup de main à Arjen Livyns, le coureur belge très en vue ces dernières semaines.
«Notre équipe a déjà remportée deux succès cette année (NDLR : succès d’étape pour Timothy Dupont sur l’Étoile de Bessèges et Nokere Koerse avec Ludovic Robeet) et souvent, on se montre à l’avant de la course. L’arrivée de Pauwels Sauces, notre nouveau co-sponsor est un bon indicateur. On a envie de bien faire collectivement. Je vais donc m’attacher à respecter les consignes de l’équipe», promet encore Tom. Prêt, donc, à prendre ses jambes à son cou, dans les premiers kilomètres.
Luc espère pouvoir résister le plus longtemps possible aux multiples coups d’accélérateur que les cadors promettent de produire. Mais pour ça, il n’y a pas de mystère, lui aussi cherchera à filer avant le premier grand coup de canon.
«C’est vrai que pour exister, la seule chance, c’est de devancer un peu la grande bagarre et donc de prendre les devants avant que les (Mathieu) Van der Poel, (Wout) Van Aert ou autre Julian Alaphilippe, pour ne citer que ces trois grands favoris, n’accélèrent. Lorsqu’ils le font et déclenchent la grande bagarre, personne ou presque ne peut suivre…»
Certes, les deux frères Wirtgen ne seront pas des acteurs de premier plan comme le seront les favoris, dimanche, mais ne comptez pas non plus sur eux pour se laisser aller. «Le but est double : bosser pour l’équipe, que nos dirigeants soient contents de notre boulot, et d’arriver au bout, comme l’an passé, avec le sentiment d’avoir fait le maximum pour exister…» Signé Tom et Luc Wirtgen. Ou Luc et Tom Wirtgen. C’est égal!
Denis Bastien