On savait que Nina Berton (23 ans) avait le sens du sacrifice. Elle a dépanné, dès le premier secteur pavé, sa coéquipière italienne, Letizia Borghesi, qui finira deuxième, derrière la Française Pauline Ferrand-Prévot. Avec le sourire et le sentiment du devoir accompli. La cinquième place de la Canadienne Alison Jackson a complété la belle journée de l’équipe EF Education-Oatly. Nina Berton (45e) raconte…
Dès sa descente de machine, Nina Berton, visage recouvert d’un masque de poussière, afficha un petit rictus qui en disait beaucoup sur la souffrance endurée. Le dos courbé témoignait de la petite séance de torture par ces foutus pavés déglingués. Alison Jackson, lauréate en 2023 et cinquième ce ce samedi incandescent sur l’Enfer du nord, se jeta sur la Luxembourgeoise et amorça un pas de danse dont est coutumière la factieuse et pétulante canadienne. Avec Sarah Roy, c’est un trio bras dessus, bras dessous, qui faisait face à la zone mixte, où certaines filles n’avaient pas résisté à l’impérieuse nécessité de se jeter à terre sur l’herbe désormais synthétique du vélodrome. Une boisson fraîche à la main, Nina Berton les imitera à son tour. Après quelques minutes, elle passait à la confession…
Nina, votre équipe est très joyeuse…
Nina Berton : Oui, avec une deuxième et une cinquième place, c’est très bon. On savait qu’on avait une très forte équipe pour ce Paris-Roubaix. Tout le monde a fait son job et tout s’est parfaitement déroulé pour nous. Je suis très heureuse et en plus, j’ai terminé.
Comment s’est déroulée votre course?
Dès le premier secteur, Letizia (Borghesi) a subi une crevaison de la roue avant. Je me suis arrêtée après son dépannage pour la ramener dans le peloton. On est revenu, mais c’était assez dur. Il a démontré qu’elle était très forte, c’est super ce qu’elle a fait.
Vous vous êtes donc sacrifiée…
Oui, il le fallait. Letizia venait de faire sixième du Tour des Flandres. C’est le résultat de l’équipe qui compte et c’est vraiment ce que nous avons fait.
Ensuite, que s’est-il passé pour vous?
J’ai fait mon job et je me suis retrouvé dans un petit peloton. Juste avant le Carrefour de l’Arbre (à 17 kilomètres de l’arrivée), le peloton s’est encore cassé. Je ne sais pas comment j’ai fini, une dizaine de minutes derrière les premières, ça ne compte pas, mais j’ai fini et j’ai fait mon job. L’équipe a fait une grande chose.
Qu’avez-vous aimé dans ce Paris-Roubaix, votre deuxième Paris-Roubaix?
J’aime vraiment cette course, c’est la course la plus mythique de la saison. Il y a son histoire. Avoir un Paris-Roubaix femmes, c’est incroyable, avec un jour différent des hommes, c’est top. L’atmosphère était super. Je garderai un super souvenir du carrefour de l’Arbre, mon secteur préféré. C’est un secteur dur, mais avec cette ambiance, j’ai adoré.
Que n’avez-vous pas aimé?
(Elle rit). Ben, rien du tout, j’aime les pavés, je n’ai pas d’ampoules sur les mains (contrairement à sa coéquipière australienne, Sarah Roy…). Je n’ai eu aucun problème, aucune crevaison.
Vous n’avez peut-être pas aimé la crevaison de votre coéquipière…
C’est vrai. Si elle n’avait pas crevé, on aurait été à quatre dans le final. Mais bon, c’est comme ça et elle a fait un super résultat.
Et les conditions météorologiques?
C’était un peu chaud, je préfère le froid et la pluie, mais on a eu ce temps sur les classiques de pavés… Maintenant, je suis excitée pour le reste de la saison!
Ce sera quoi justement, la suite?
On va voir. Je vais me reposer. Je ne pense pas faire la Flèche Wallonne comme je l’avais prévu, et on verra. Les courses de pavés sont terminées, on va s’orienter sur les courses montagneuses.
Vous serez sur la Vuelta?
Normalement, oui, mais ce n’est pas encore tout à fait certain. Il y a aussi d’autres courses, plus petites, que j’aurais aimé faire comme les épreuves du festival Elsy Jacobs et d’autres de catégorie 1.2 que j’aurais voulu faire. Cette année, c’est la dernière chance, car l’an prochain, on sera en World Tour. On ne pourra plus faire des courses 1.2. On va voir…