Titré dans la course en ligne en 2020, puis en 2021, Kevin Geniets cherchera à viser un triplé, dimanche à Nospelt, lors des championnats nationaux.
Depuis Tignes, la vie de Kevin Geniets (25 ans) semble devoir suivre son cours. Il goûte à ses derniers jours en maillot tricolore, du moins, s’il ne parvient pas à renouveler son bail entamé le 23 août 2020 lors des championnats de Mamer et validé pour 365 jours de plus, l’an passé à Harlange. Soit la bagatelle de 681 jours. Bref, de quoi s’attacher durablement à ce maillot distinctif que son équipe, Groupama-FDJ, plus particulièrement son manager, Marc Madiot, se plaît à laisser neutre aux couleurs du pays de chaque champion.
Et on le sait, le tricot qui permettait à Charly Gaul de se forger une identité visuelle forte dans la galerie des champions du Tour de France de l’après-guerre, remis au goût du jour par le retour au premier plan mondial du cyclisme luxembourgeois depuis une vingtaine d’années, est un maillot recherché.
Toujours est-il que pour le champion en titre, qui devrait très logiquement faire partie de la sélection Groupama-FDJ pour le Tour de France, c’est le moment de faire le point.
Vous allez remettre votre titre de champion national en jeu. Comment appréhendez-vous l’évènement?
Kevin Geniets : Comme je suis en stage à Tignes en altitude avec l’équipe, j’avoue que je n’y ai pas trop pensé. Je vais d’ailleurs rallonger ce stage, ce qui m’empêchera de commencer vendredi avec le contre-la-montre du championnat. Depuis mardi dernier, je suis là…
N’est-ce pas trop difficile d’enchaîner le Dauphiné et ce stage à Tignes?
Non, car les premiers jours, on ne s’est pas trop entraîné. On a surtout profité de l’altitude, une sorte de rappel.
Généralement, ces stages en altitude marchent bien pour vous?
Oui, cela marche très bien, du coup, on ne s’est pas posé beaucoup de questions…
Ne craignez-vous pas de ressentir quelques jours difficiles lorsque vous reviendrez disputer le championnat national, comme cela peut être le cas après un tel stage?
Cela peut arriver, c’est vrai, mais, généralement, je me sens assez bien lorsque je viens de redescendre. Et là, nous n’avons pas effectué un énorme bloc d’entraînement. Je ne m’inquiète pas trop.
On comprend forcément que ce stage sert à préparer le Tour de France et non les championnats nationaux…
Oui, mais tant que la sélection n’est pas sortie officiellement, il faut rester prudent, rien n’est sûr (NDLR : l’entretien a été réalisé lundi en fin d’après-midi). Mais c’est vrai que je ne prépare pas à Tignes les championnats (il rit).
Mais quoi qu’il advienne pour la sélection, il suffisait de suivre le déroulement du Dauphiné et votre travail auprès de David Gaudu pour comprendre que vous êtes en grande forme…
C’est vrai, cela marchait super bien sur le Dauphiné, un peu comme toute la saison. Alors voilà…
Cette fois-ci, on a senti de nouveaux progrès en haute montagne…
Oui, j’ai vu sur le Dauphiné que je grimpais pas mal. C’est le cas lorsque je suis en forme.
Vous vous êtes surpris?
Je me sentais vraiment bien, du coup, j’y suis allé franchement. Mais c’est vrai que je ne m’attendais pas trop à ce qu’il ne reste qu’une quinzaine de coureurs dans le groupe de tête lorsque je m’écartais, une fois mon travail terminé.
Vous êtes l’un des seuls coureurs de classiques flandriennes à pouvoir aller si loin…
Oui, je pèse quand même 73 kilos, il faut pouvoir les monter…
Pour revenir au Dauphiné, vous aviez réalisé une très bonne première partie avant de perdre pas mal de temps en dernière partie. Que s’est-il passé au juste?
J’étais en effet très bien parti, mais comme je n’ai pas effectué beaucoup de sorties d’entraînement spécifiques avant le Dauphiné, mes muscles du fessier se sont durcis. J’ai eu du mal avec cette position. Voilà…
Pour en revenir à votre forme du moment, on imagine que vous ne vous êtes jamais aussi bien senti de votre carrière?
C’est vrai qu’au Dauphiné, j’avais l’impression d’avoir la forme de ma vie. Maintenant, je mets tout en œuvre pour garder ça, en poussant même, je l’espère, d’un petit cran. Ces prochains jours, demain ou après-demain, la sélection sera officialisée. On verra bien.
Dans ce rôle que vous avez occupé dans le Dauphiné, c’est-à-dire une protection rapprochée de votre leader, en l’occurrence, de David Gaudu, vous avez encore appris beaucoup de choses?
Je pense que je me perfectionne vraiment là-dessus. Ce qui me fait plaisir, c’est d’être l’un des derniers à me relever. Je progresse dans ce rôle, cela me plaît. J’ai eu aussi l’opportunité de terminer cinquième dans la troisième étape (où David Gaudu s’est imposé devant Wout van Aert). J’ai pu faire mon truc, des fois ça fait du bien.
C’est important pour moi de prendre conscience de quoi je suis capable, car c’est quand même énorme de me retrouver juste un vélo derrière Wout van Aert sur une telle étape
Comme vous aviez travaillé au préalable dans cette étape de Chastreix-Sancy pour David Gaudu, vous ne vous êtes pas dit que vous auriez très bien pu vous imposer vous-même?
Je me suis dit que je n’étais pas loin! J’avais fait l’effort de remonter David (Gaudu) dans le vent. Il était un peu coincé et j’aurais dû même le lancer plus tôt, mais ensuite, il s’est vraiment lâché. Ces efforts lactiques me conviennent le mieux. C’est important pour moi de prendre conscience de quoi je suis capable, car c’est quand même énorme de me retrouver juste un vélo derrière Wout van Aert sur une telle étape.
Sur d’autres étapes, vous vous êtes écarté avant le sommet, mais sans jamais perdre beaucoup de temps non plus. C’était voulu?
Non, pas vraiment. Dans l’avant-dernière étape, où j’ai beaucoup bossé, je n’ai pas pu basculer au sommet de l’avant-dernier col avec les meilleurs, alors que, normalement, j’aurais dû passer. J’ai fini tranquille, en gestion, en pensant au jour d’après (NDLR : il a perdu près de neuf minutes dans cette 7e étape arrivant à Vaujany).
Tactiquement, c’est la course la moins facile. Tu peux vite te faire enterrer
Passons au dimanche d’après. La remarque que l’on peut faire est que rarement on aura vu autant de coureurs luxembourgeois en forme au moment des championnats nationaux…
Oui, c’est clair, je me suis fait la même réflexion. Bob (Jungels), Alex (Kirsch), Michel (Ries), on est tous en forme… Très franchement, ça fait plaisir!
Cela vous inspire quoi d’autre, que ce titre sera dur à garder?
Oui, c’est sûr. C’est toujours dur. D’abord tactiquement, c’est la course la moins facile. Tu peux vite te faire enterrer. Après, on voit que Bob était parmi les meilleurs au Tour de Suisse, Alex parmi les meilleurs au Tour de Belgique, Michel, pareil sur la Route d’Occitanie. Nous ne sommes pas beaucoup, mais il y a un sacré niveau.
Et ce parcours de Nospelt. Sans le reconnaître, vous connaissez les routes…
Oui, en effet. C’est assez vallonné avec une bosse à deux kilomètres de l’arrivée. Normalement, cela devrait me correspondre.
Cela fait-il penser au parcours de Mamer, lors de votre premier titre?
En effet, c’est un peu ça, oui.
Dans le cas où vous seriez effectivement sélectionné pour votre premier Tour de France, on imagine que cela fait partie de vos envies de disputer cette épreuve avec ce maillot de champion national?
J’ai savouré ce plaisir de porter ce maillot pendant deux ans, et c’est très spécial. Tu es beaucoup plus reconnu sur toutes les courses, tu entends ton nom au passage devant le public. Cela procure un énorme plaisir. Bien sûr, le Tour de France, ce serait encore autre chose, j’imagine. Ce championnat national sur route reste donc un très, très gros objectif, oui…
Pour finir, vous gardez une image d’un coureur luxembourgeois portant ce maillot de champion national sur le Tour de France?
Oui, j’ai le souvenir de Frank Schleck, c’est là que j’ai commencé à regarder le Tour. Puis plus proche de nous, il y avait Bob…