Christine Majerus attaquera, fin février, sa neuvième saison dans son équipe SD Worx. Avant, pourquoi pas, de prolonger, elle entend «faire un bon printemps, un très bon Paris-Roubaix».
D’ici la fin du mois, Christine Majerus (34 ans) va aborder avec une reprise programmée sur le Het Nieuwsblad pour sa neuvième saison dans son équipe néerlandaise, qui reste la meilleure formation professionnelle au monde.
Animée par la ferme volonté de briller à la mi-avril à Paris-Roubaix Femmes, dont elle avait animé en octobre dernier la première édition, malgré beaucoup de malchance, la multiple championne nationale demeure un des piliers de SD Worx.
Les circonstances actuelles, on pense à la terrible chute d’Amy Pieters à l’entraînement lors du stage de décembre dans le sud de l’Espagne, sont telles que lors de la présentation officielle de l’équipe hier après-midi aux Pays-Bas, toutes les conversations revenaient vers la championne des Pays-Bas, restée pour l’heure inconsciente.
La saison sur route recommence. Quel est votre programme de course pour 2022 ?
J’ai effectivement mon programme, on s’était penché dessus dès le mois de novembre en fonction de mon objectif, qui est Paris-Roubaix. Cela aurait lieu une semaine plus tard que ce qui était prévu (NDLR : en raison de l’élection présidentielle en France, Paris-Roubaix Femmes est déplacé au 16 avril).
D’expérience, je sais que si on fait tout le printemps à fond à cette période-là, on commence à subir un peu. Ce qui n’est pas mon but, bien au contraire. J’avais donc demandé à courir un peu moins en début de saison en faisant l’impasse sur certaines courses. Mais c’est vrai qu’avec les événements qu’on connaît, avec un coureur en moins, je pense devoir m’aligner sur des courses que je n’avais pas prévu de faire. Ce sera un printemps plein.
À moi de faire en sorte de courir un peu contre nature et de m’économiser sur certaines courses, ce que je n’ai pas fait ces dernières années. Mais il faut que je garde ça en mémoire pour Paris-Roubaix. D’autant plus que les filles ont enchaîné les stages, j’essaie d’y aller avec le frein à main.
Car la saison est longue, les stages sont épuisants, tout le monde veut montrer son état de forme. Pour moi, ce serait contre-productif d’arriver en forme sur les premières courses sans pouvoir progresser par la suite. Voilà pourquoi j’ai abordé tranquillement ces dernières semaines. Je sais que cela va être long.
Après les championnats nationaux de cyclo-cross, vous n’êtes pas partie en stage en Espagne ?
Non, je suis partie en montagne faire du ski de fond. J’ai bien travaillé le cardio et cela m’a permis de voir d’autres horizons et d’avoir envie de remonter sur le vélo. J’ai fait une bonne semaine à la maison. Histoire de reprendre le rythme pour le stage en Espagne qui vient, stage qui va durer deux semaines.
J’aurai le temps de me concentrer sur ma progression. J’espère en sortir non cramée et en bon état pour les premières courses. Cela fera pas mal de temps au soleil, j’espère que cela sera bénéfique. Cela sera compliqué pour moi de revenir en Espagne. Ce sera la première fois depuis l’accident d’Amy. J’appréhende un peu.
Mes coéquipières ont déjà passé un cap pour y être retournées en janvier. On sera ensemble pour surmonter ça. C’est une étape à franchir. Chacun essaie de faire de son mieux, avec le même ressenti et la même difficulté.
On imagine que, fatalement, vous échangez beaucoup entre vous…
Oui, on avait beaucoup communiqué au début et des fois, il n’y a pas grand-chose à dire de plus, on ressent ce que les autres ressentent. Le principal, c’est qu’on soit là l’un pour l’autre. Le moment venu, pour Amy, on sera là quand il faudra.
J’ai plus de liens avec la France et le Tour, c’est quelque chose avec lequel j’ai grandi étant enfant. Je le suivais
C’est la première fois dans votre carrière que vous vous trouvez, en, tant que coéquipière, dans une telle situation ?
Oui, heureusement. C’est la première fois en ce qui concerne une personne de très proche. Ce n’est évidemment pas à souhaiter à quiconque.
On va vous revoir donc en compétition pour le Het Nieuwsblad, le 26 février…
Oui, ce sera soit le Nieuwsblad, soit le van het Hageland (27 février), ou les deux. Après il s’agira d’un programme avec toutes les classiques jusqu’au Tour des Flandres (3 avril). Je devrais avoir un week-end sans compétition jusqu’à Paris-Roubaix (16 avril).
On planifie pour le moment jusqu’au Festival Elsy-Jacobs (29 avril-1er mai). Ensuite, j’aurai un mois de mai un peu plus cool pour récupérer, repartir en stage et songer à la deuxième partie. On verra ensuite entre les deux grands tours, le Tour d’Italie (1er-10 juillet) et le Tour de France (24-31 juillet), mais j’espère faire le Tour.
Oui, vous nous aviez expliqué que vous y teniez…
Oui, l’apparition du Tour de France n’ôte rien à l’importance du Giro, bien au contraire. Mais après, c’est une question personnelle. Les Italiens préfèrent le Giro, ce que je comprends. Moi, j’ai plus de liens avec la France et le Tour, c’est quelque chose avec lequel j’ai grandi étant enfant. Je le suivais.
J’ai donc envie de le faire avec l’objectif de gagner avec mon leader. C’est ce qui me motive. J’espère donc être à la hauteur de ce qu’on me demande ces jours-là.
Un champion n’est pas uniquement quelqu’un qui gagne beaucoup de courses. C’est quelqu’un qui sait y faire humainement
Anna van der Breggen étant partie dans le staff de votre équipe, que pouvez-vous en dire ?
Les ambitions restent identiques que les années précédentes. On veut rester la meilleure équipe du monde et gagner un max de compétitions. Après, c’est vrai que le départ d’Anna, ou plutôt son changement de rôle, va sûrement se faire remarquer. D’abord, je l’apprécie en tant que personne et je l’appréciais en tant que coéquipière.
Travailler pour des filles comme ça, ça prend tout son sens. Un champion n’est pas uniquement quelqu’un qui gagne beaucoup de courses. C’est quelqu’un qui sait y faire humainement. C’était son cas. Ce n’est pas donné à tout le monde. Cela s’apprend aussi.
Anna était une vraie championne, capable de performer quand elle l’avait décidé. C’était un luxe d’avoir ce type de coureur. Elle est partie, il faut essayer de la remplacer. Mais ne la remplace pas qui veut (elle rit). Ce n’est vraiment pas une tâche facile.
Néanmoins, qui voyez-vous pour la remplacer ?
On compte beaucoup sur Demi Vollering (NDLR : victorieuse l’an passé, notamment sur Liège-Bastogne-Liège) pour faire de son mieux. Physiquement, elle va clairement pouvoir le faire. Mais c’est aussi un processus et c’est important pour elle de ne pas griller les étapes.
Après, on a eu comme recrutement principale Lotte Kopecky et Marlen Reusser qui sont des coureurs confirmés et qui ont un certain statut. J’ai hâte de travailler avec Lotte sur les classiques, c’est un vrai atout pour l’équipe. Quant à Marlen, on connaît ses qualités dans les chronos.
Elle sera précieuse pour les courses par étapes avec chronos où elle sera un bon leader. On verra comment elles vont s’intégrer. Je fais confiance à l’intelligence de mes coéquipières pour faire en sorte que ça marche.
De votre côté, il s’agit de votre neuvième saison dans cette équipe. Vous n’avez pas fait mystère de votre souhait de prolonger, si possible, votre carrière jusqu’aux JO de Paris. Allez-vous prolonger à l’issue de cette saison ?
Non, pour le moment, je ne me projette pas. C’est important de ne pas s’éparpiller à droite et à gauche, c’est dangereux (elle rit). Je vais d’abord essayer de faire un bon printemps. Un très bon Paris-Roubaix. Une fois ça de passé, c’est le moment où généralement on discute du contrat.
J’ai le temps, je ne suis pas forcément inquiète à l’idée de ne plus en avoir. Je pense avoir fait mes preuves, montrer ma régularité et mon dévouement. Ce n’est pas quelque chose avec lequel je me mets la pression.
Entretien avec Denis Bastien
L’effectif de SD Worx
Elena Cecchini (Ita/29 ans), Niamh Fisher-Black (Nzl/21 ans), Roxane Fournier (Fra/30 ans), Lotte Kopecky (Bel/26 ans), Christine Majerus (Lux/34 ans), Ashleigh Moolman (AFS/36 ans), Amy Pieters (Ned/30 ans), Marlen Reusser (Sui/30 ans), Anna Shackley (GBR/20 ans), Lonneke Uneken (Ned/21 ans), Chantal van den Broek-Blaak (Ned/32 ans), Blanka Vas (Hon/20 ans), Demi Vollering (Ned/25 ans).
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