Benoît Joachim (40 ans) et Camille Dahm (63 ans) sont les deux candidats déclarés à la présidence de la fédération luxembourgeoise de cyclisme. Verdict attendu vendredi soir à Leudelange.
Pour tout dire, on ne s’attendait pas vraiment à ce genre de match quand, au lendemain du championnat national de cyclo-cross, nous indiquions dans nos colonnes que Jean-Marie Halsdorf avait l’intention de se présenter à l’élection pour le poste de président de la Fédération du sport cycliste luxembourgeois (FSCL).
Finalement, l’ancien ministre des Affaires étrangères ne s’est pas élancé. Avait-il été échaudé par cette sentence du président en poste : « Ce n’est pas un poste pour inaugurer les chrysanthèmes… »
Longtemps, Jean Regenwetter a cherché un hypothétique successeur, sans le trouver. Puis est venue la candidature de Benoît Joachim. Qui aurait déclenché celle de Camille Dahm.
Les deux hommes ont chacun leur personnalité. Un parcours différent. Pourquoi le cacher, des conceptions quelquefois opposées. On a un ancien compétiteur de haut niveau qui a évolué aux pires heures du cyclisme contre un professeur viscéralement attaché à la lutte contre le dopage.
Mais alors qu’ils s’affronteront demain matin sur les ondes de RTL avant de s’opposer le soir même dans les urnes, on sent bien chez eux qu’il n’y a là aucune considération politique, ce qui est plutôt rassurant.
Bien sûr, l’un se prévaut indirectement du soutien du ministre des Sports. L’autre est le grand pote du Premier ministre. L’un présente un profil lisse. L’autre un profil plus abrasif.
Clairement, Benoît Joachim, qui n’a pas la bénédiction du président sortant, ne part pas favori dans cette course à la présidence. Mais tant que la ligne n’est pas franchie, il se défendra corps et âme. C’est donc aux clubs qu’il reviendra de trancher, vendredi soir, si ce n’est déjà fait!
Denis Bastien
Benoît Joachim, « l’amour du vélo »
SON PARCOURS : L’ancien professionnel est de retour
Benoît Joachim a été le premier coureur luxembourgeois de la nouvelle ère. Derrière lui allaient suivre Kim Kirchen et les frères Schleck. Longtemps, il fut le porte-drapeau de la nouvelle génération de coureurs cyclistes. S’il n’a pas obtenu les résultats de ses plus jeunes compatriotes, Benoît Joachim s’est vite rangé à l’idée qu’il valait mieux endosser le rôle d’équipier modèle.
Il le fera auprès du plus grand leader de l’époque, Lance Armstrong, dans la puissante US Postal. Par deux fois, en 2000 et 2002, il sera du Tour de France. Au total, Benoît Joachim, Ben pour les intimes, restera dix ans chez les pros, de 1999 à 2004 à l’US Postal, puis chez Discovery Channel (2005/2006) et enfin chez Astana (2007/2008). Une belle carrière. « Je n’ai pas à rougir », admet-il.
Depuis six ans maintenant, il est directeur de société. Il s’est reconverti dans l’immobilier et l’import-export. Depuis plusieurs mois, il a repris corps avec le cyclisme luxembourgeois qu’il s’est toujours plu à suivre. Il est également vice-président de la commission des Sports et Loisirs de Luxembourg et membre de la commission de la Mobilité urbaine.
SA CANDIDATURE : «Je connais bien mon sport »
Il s’explique ainsi : « J’estime qu’un président de fédération doit bien connaître son sport. Il faut qu’il ait des relations sur le plan international afin de bien représenter son pays. Je pense que je peux relever ce défi. J’ai été choisi, lorsque j’étais coureur professionnel, comme représentant des coureurs au sein du CPA (NDLR : Cyclistes professionnels associés). Un président doit savoir prendre des décisions, trancher dans le domaine sportif, déléguer aux entraîneurs nationaux, mais pas seulement. Il n’y a pas que le côté compétition, il y a aussi le cyclosport et le sport loisirs qu’il faut relancer. »
SON PROJET : Augmenter le nombre de licenciés
C’est son credo, le Luxembourg doit retrouver de nouveaux licenciés et de nouvelles courses alors que ces dernières années, le calendrier n’a cessé de fondre.
Dans son vaste programme, il affiche ses objectifs. Il débite : « Il y a urgence à augmenter le nombre de licenciés, de l’ordre de 10 % chaque année. Il y a lieu de travailler avec les ministères compétents pour organiser des campagnes de sécurité routière. Ayant moi-même débuté à sept ans, en cyclotouriste, je pense que c’est un bon moyen d’attirer les non-licenciés dans nos clubs. J’aimerais dynamiser le secteur du VTT, du cyclosportif par le biais du sport pour tous. Je proposerais aux clubs de créer des courses par handicap, mais également des courses individuelles comme cela se pratique en Belgique. Cela permettrait d’avoir un grand nombre de coureurs au départ mais aussi d’augmenter le niveau. Il faut également aider les clubs à organiser des épreuves festives qui attirent le public. »
Ce n’est pas tout. Benoît Joachim aimerait attirer de nouvelles équipes professionnelles au Luxembourg et y faire intégrer les meilleurs espoirs, les aider à franchir le pas du professionnalisme. « Je veux rester ouvert à toutes les idées innovantes. »
Camille Dahm, « éducateur-né »
SON PARCOURS : De prof de sport à la direction de l’Eneps
Camille Dahm possède un long cursus de professeur de sport, une carrière entamée en 1976. Il est aujourd’hui directeur de l’Eneps (École nationale de l’éducation physique et des sports), poste qu’il occupe à plein temps depuis 2011. Il est aussi, et depuis 1992, membre du conseil d’administration de l’agence luxembourgeoise antidopage, responsable du volet, également membre de la commission sportive du conseil supérieur pour le sport.
Bref, il possède un incontestable profil de dirigeant, mais surtout d’éducateur. « Je suis un éducateur né. Mon père, mes frères étaient tous des instituteurs. J’ai tiré du monde éducatif mes valeurs. Et le sport est mon eau bénite », raconte Camille Dahm.
SA CANDIDATURE : «Une décision qui s’est imposée»
« Aussi longtemps que Jean-Marie avait l’intention de se porter candidat, je ne serais pas intervenu. C’est un homme intelligent qui connaît le milieu, lorsqu’il s’est retiré, l’idée m’est venue. Puis Benoît Joachim s’est porté candidat. Je me suis dit que je ne pouvais pas laisser faire», explique Camille Dahm.
SON PROJET : Des statuts à revoir et un calendrier à remanier
S’il est élu président, Camille Dahm va d’abord réviser les statuts « pour les adapter aux besoins actuels », puis il veut se pencher sans tarder sur le calendrier. « Dimanche dernier, j’étais à Bech, en vélo, pour l’ouverture de la saison. Il y avait quoi, une quinzaine de coureurs luxembourgeois au départ de la course élite. Il faut permettre aux amateurs qui ne sont pas du niveau des équipes de Leopard et Differdange de participer à des courses qui correspondent à leurs niveaux. Je connais beaucoup de cyclistes qui ne courent pas car il n’y a pas de courses adaptées à leurs niveaux. Enfin, le calendrier est trop restreint. Il s’arrête fin juin après les championnats nationaux, c’est inconcevable », plaide-t-il.
Camille Dahm, ancien directeur technique de la Lasel pendant 10 ans, entend également établir des passerelles avec le sport scolaire. « Et soutenir les clubs avec l’équipe technique de la FSCL, au niveau de route et au niveau des autres disciplines du cyclisme. »