Figure de l’athlétisme luxembourgeois, Alain Kieffer (54 ans) est monté au créneau après le report, vendredi, des Championnats nationaux de cross-country prévus ce dimanche. Attention, le coureur du CA Belvaux sort la sulfateuse.
Suite à la décision, vendredi, de la FLA de reporter définitivement les championnats nationaux de cross-country, vous vous êtes fendu d’un communiqué de presse que vous débutez ainsi : «Nous atteignons les bas-fonds de la dérision humaine.» Regrettez-vous ces propos et les avez vous écrits à «chaud» ?
Alain Kieffer : Pas du tout ! Et pour tout vous dire, j’ai écrit cette lettre après avoir appris un peu par hasard, via le site de la FLA, que le championnat, qui devait se tenir initialement à Dudelange, était annulé. Sans la moindre explication. Je l’ai très mal pris et j’ai demandé aux membres de mon club (Ndlr : CA Belvaux) s’ils en connaissaient les raisons. Et en discutant, on s’est dit qu’on allait essayer d’organiser un championnat national uniquement pour les seniors. Le club a donc entrepris des démarches sanitaires dantesques sur le plan sanitaire et mesures de sécurité. Ils se sont démenés durant je ne sais pas combien de jours et ont envoyé tout un concept auprès de la FLA pour se voir, finalement, se signifier un refus simple et net. Alors, j’ai décidé de ressortir cette lettre et de la transmettre à toute la presse sportive.
Dans ce communiqué de presse, vous êtes assez virulent…
Oui mais je l’ai écrit en connaissance de cause. Pour avoir travaillé suffisamment longtemps dans l’administration pour savoir que les écrits restent et je persiste et signe. D’ailleurs, la version originale était encore beaucoup plus tranchante…
À vous lire et vous écouter, on y voit et on entend de la frustration, de l’incompréhension et de la colère. On se trompe ?
Ces trois adjectifs sont corrects. Pendant que je vous parle, je suis en train de regarder le Het Nieuwsblad qui se déroule en Belgique. Tous les participants sont en bonne santé, les spectateurs portent des masques, les gestes barrières sont respectés, dès lors, où se trouve le risque sanitaire ? Pour moi, il n’y en a pas. Annuler ce type de course est un manque flagrant de bon sens.
Dans le cas du championnat national de cross-country, tous les participants auraient dû effectuer un test anti-génique…
Bien sûr! Et à ce titre le CA Belvaux avait déjà recruté quelques infirmiers et infirmières. Sur le plan de la sécurité, il n’y avait rien à craindre. Tout cela m’attriste.
Dans Lucky Luke, l’Indien se méfie des «visages pâles à langues fourchues»…
Que vous énerve-t-il le plus et à qui vous en voulez-vous le plus ?
Le monde politique au pouvoir. Moi-même, face au virus, je ne fais pas n’importe quoi. Je porte mon masque partout là où c’est indiqué, je respecte les gestes barrières… D’ailleurs, le seul point positif de toute cette affaire, c’est que pour la première fois depuis longtemps, je n’ai pas eu de rhume cet hiver. Ce que je reproche à ceux qui sont au pouvoir, c’est cette politique de l’autruche. Ils ont peur de tout, créent et entretiennent un climat très malsain. Et j’ai horreur de ça.
Dans ce communiqué, vous pointez selon vous l’incohérence de certaines décisions comme celle d’annuler ce championnat, initialement prévu dans les bois du parc Leh de Dudelange, là-même dites-vous où «le nombre de promeneurs sera supérieur à celui des participants des championnats de cross»…
Par le temps qu’il fait, c’est certain! C’est comme au Galgenbierg où aurait dû se dérouler le cross de Belvaux la semaine prochaine. Je suis prêt à parier mon salaire !
Vous écrivez aussi : «Force est de constater que de nombreuses fédérations sportives ont des « apparatchiks » des partis politiques au pouvoir à leur tête.» Dès lors, qui visez-vous dans la mesure où Stéphanie Empain, présidente de la FLA, est députée déi gréng ?
La présidente a voté cette fameuse loi qui est à l’origine de l’interdiction de ce championnat national de cross. Dans son communiqué de presse, la FLA semble regretter de devoir annuler ce rendez-vous mais sa présidente, à la Chambre des Députés, sa présidente a voté la loi. Dans Lucky Luke, l’Indien se méfie des «visages pâles à langues fourchues»… Évidemment, la présidente de la FLA est visée mais elle n’est pas la seule. Dans bien des fédérations, on retrouve à leur tête des hommes politiques du gouvernement en place. Si elle n’avait pas voté «pour», cette loi ne serait pas passée puisqu’elle a eu 31 voix pour et 29 contre… Et puis, dans cette loi, on autorise la pratique du sport d’élite. Très bien mais comment le définit-on ? Pour le foot, j’ai bien compris, mais un championnat national senior de cross, c’est élite ou non ? C’est génial. Je peux vous dire que si j’étais à la Chambre des Députés, on m’aurait entendu…
Toujours sur le terrain politique, vous écrivez que les citoyens auront la possibilité de faire entendre leur mécontentement lors des élections communales et nationales prévues en juin et octobre 2023. Comptez-vous vous lancer en politique ?
J’ai toujours refusé d’être engagé en politique pour préserver ma liberté de parole. J’ai toujours été syndicaliste dans le domaine de l’enseignement, mais je n’ai jamais été membre d’un parti. Mais au vu de ce que je vis depuis un an, je suis fermement en train de penser sérieusement à rallier un parti de l’opposition. En tout cas, je le soutiens comme je peux. Et j’en ai tellement marre que je compte en devenir membre. J’y pense sérieusement.
Quel est ce parti ?
Pour moi, le seul véritable parti d’opposition, c’est l’ADR. Son chef de file, Fernand Kartheiser ne mâche pas ses mots et il a le courage de nommer les choses par leur nom. Bon, je n’ai pas dit que j’étais d’accord sur tout…
Recueilli par Charles Michel
Très bon article. Vous pouvez y ajouter un link reprenant mon communiqué « in extenso ». Salutations sportvives Alain Kieffer