Dans une ambiance détestable, le Legia Varsovie de Chris Philipps va tenter d’arracher son 3e titre de champion d’affilée dimanche soir.
Chris Philipps a un avantage sur beaucoup de ses coéquipiers du Legia Varsovie : il ne lit pas le polonais. Ça lui évite des sueurs froides. « La barrière de la langue fait que ça me touche moins. » Et pourtant, il a compris. Cette dernière journée d’Ekstraklasa ne peut que sentir le soufre. Forcément puisqu’elle va se dérouler en enfer…
Le titre de champion de Pologne se joue ce dimanche. Et puisque ni la presse ni les réseaux sociaux ne peuvent renseigner utilement l’international luxembourgeois sur ce qui l’attend réellement, il s’est fié à ses sens. Il a ainsi très bien compris dans quel traquenard ses coéquipiers et lui allaient se retrouver, ce dimanche, en demandant à ses dirigeants quelle était l’organisation du week-end. « On sent que c’est secret, que personne ne veut en parler. D’ailleurs, samedi soir, on ne dort pas à Poznan mais dans un endroit tenu secret pour des raisons de sécurité. »
Et sur le coup de 18h, les petits gars du Legia seront à peu près seuls contre tous. Avec le soutien non négligeable de 2 000 de leurs fans les plus radicaux, mais pas celui de leurs familles. Et pour cause, on ne leur a pas transmis de billet. « Est-ce que c’est dû à la rivalité entre les deux clubs ? , se demande Philipps. En tout cas, moi, ça me va. Ma copine sera là ce week-end, mais je préfère largement qu’elle regarde le match à la maison plutôt que depuis les tribunes. Je ne veux pas qu’elle soit à l’intérieur de tout ça si quelque chose tourne mal. Ce n’est pas juste une rivalité. C’est de la haine qu’on va recevoir. On sera sifflés de la première à la dernière minute. »
«Une fois que tu as vécu ça…»
On n’est pas loin de la psychose. Et c’est normal, les deux clubs et la fédération font tout pour ça. Ainsi, alors qu’il ne faut qu’un petit point à Varsovie pour être sacré, le club a déjà prévu un rapatriement dare-dare de ses joueurs sur la capitale, après le coup de sifflet final. Attendu qu’il ne recevra pas son trophée sur place, il faudra faire ça à la maison. Où ? Quand ? Dans le stade le soir même alors qu’il y a deux bonnes heures de route ? Le lendemain seulement ? Même les joueurs ne sont pas tenus au courant.
Ils n’en sont de toute façon pas encore à se poser ce genre de questions. Il va d’abord falloir résister au Lech Poznan. Et surtout ne pas se fier aux statistiques. Oui, l’adversaire n’a plus gagné depuis quatre rencontres (alors que le Legia, lui, n’a plus perdu depuis sept rencontres – six victoires), oui il s’est incliné lors de ses trois derniers matches à domicile, mais ses supporters lui ont bien fait comprendre qu’il n’avait pas le droit de laisser l’ennemi être sacré sur cette pelouse.
« On dit toujours qu’il faut entrer dans ce genre de match pour le gagner plutôt que pour ne pas le perdre et je suis entièrement d’accord », analyse Philipps, soucieux de ce que son club peut aussi se satisfaire d’un match nul. « Je pense qu’on va arriver sur la pelouse en étant aussi offensifs que d’habitude, parce que si tu prends un but, ce sera difficile de réagir. Cela doit faire partie des matches les plus chauds d’Europe et à mon avis, une fois que tu as vécu ça, plus rien ne peut t’impressionner. »
La question ne sera pas de le vivre, mais d’y survivre. Et cela, les soutiens du milieu de terrain ne l’ont pas tous compris. « Je reçois beaucoup de messages d’amis qui pensent qu’on est déjà champions. Ils n’ont pas compris ce qui nous attend et la configuration. »
Julien Mollereau