La question des chants racistes et homophobes dans les stades de foot résonne dans toute l’Europe, avec des réponses différentes, comme en Italie où la Fédération a durci les sanctions, ou en Angleterre, où les clubs bannissent leurs fans.
En dénonçant les chants « inadmissibles » des supporters parisiens, qui ont entonné des refrains assimilant les Marseillais à des « rats », des « pédés » ou des « enculés » lors de PSG-OM mi-mars, la ministre des Sports Roxana Maracineanu a mis le doigt sur un sujet qui dépasse le cadre du Parc des princes et de la France.
Des chants racistes ou homophobes résonnent encore en Europe : lundi, l’Anglais Raheem Sterling s’est plaint du comportement raciste du public de Podgorica, au Monténégro, lors d’une rencontre internationale qualificative pour l’Euro-2020. L’attaquant de Manchester City avait déjà été la cible d’insultes discriminatoires en Premier League, à Chelsea en décembre, quelques jours après qu’un supporter de Tottenham eut jeté une peau de banane en direction du Gabonais d’Arsenal Pierre-Emerick Aubameyang.
En Italie, la question se pose très régulièrement et a ressurgi en décembre avec les cris de singe ciblant l’international sénégalais de Naples Kalidou Koulibaly, lors d’un match disputé à Milan face à l’Inter, en Championnat. Du côté de l’Espagne, le ministère de l’Intérieur a dénombré 77 « délits de haine » en 2017, englobant entre autres les actes racistes et homophobes. L’Allemagne n’est pas épargnée par les dérapages des supporters, dont le comportement renvoie inévitablement aux souvenirs du nazisme. Le 20 mars, une vidéo montrait trois spectateurs proférer des insultes racistes envers les internationaux Leroy Sané et Ilkay Gündogan et lancer un salut hitlérien, lors d’un match de la Mannschaft à Wolfsburg.
Des sanctions limitées
Mais les sanctions restent rares : les clubs écopent généralement d’une amende assortie d’une fermeture de tribunes, avec ou sans sursis, pour des incidents qui, en France ou en Allemagne, occupent moins les commissions de discipline que l’usage d’engins pyrotechniques. C’est l’Italie qui a pris les dispositions les plus sévères : après l’agression envers Koulibaly, la Ligue italienne a sanctionné l’Inter de deux matches à huis clos à San Siro, plus un troisième à huis clos partiel.
L’émotion suscitée par la récurrence des incidents racistes a poussé la Fédération à adopter fin janvier un règlement plus simple et plus sévère, créant la possibilité d’une interruption du match par l’arbitre dès les premiers cris ou chants délictueux. Quelques semaines plus tôt, la Juventus Turin avait écopé de la fermeture d’une tribune pour un match, plus un autre avec sursis, et d’une amende de 10 000 euros, à la suite de chants racistes visant, là encore, Kalidou Koulibaly…
Cet exemple est un bon étalon pour évaluer la moyenne européenne en terme de sanctions. En 2014, le club espagnol de Villarreal avait été sanctionné d’une amende de 12 000 euros pour le jet d’une banane en direction du défenseur brésilien Dani Alves, qui jouait alors au FC Barcelone. De ce côté des Pyrénées, les sanctions demeurent rares, bien que les instances sportives assurent combattre les discriminations, à l’image de la Ligue qui relève chaque semaine les insultes proférées dans les stades et transmet ses rapports au comité de compétition de la Fédération pour d’éventuelles sanctions.
Pour les matches internationaux, la Fédération russe a écopé en mai d’une amende d’environ 25 000 euros de la Fifa à la suite des cris de singe ciblant les Français Ousmane Dembélé et Paul Pogba lors d’un amical Russie-France à Saint-Pétersbourg. En Angleterre les clubs choisissent de bannir à vie les spectateurs coupables de tels actes, comme l’ont fait Chelsea, également confronté à des problèmes d’antisémitisme dans les tribunes, et Tottenham.
Éducation et toilettes « neutres »
En Italie comme en France, l’argument du « folklore » est souvent avancé pour expliquer les chants discriminatoires en tribunes. Dans la Péninsule, plusieurs groupes ultras ont expliqué que les « buu » ou cris de singe visaient simplement à déstabiliser l’adversaire. « Pour moi, cela n’a rien à voir avec du racisme. Le racisme c’est autre chose. Ici, c’est surtout une question d’éducation », a ainsi estimé l’entraîneur de l’Atalanta Bergame Gian Piero Gasperini.
La présidente de la Ligue française Nathalie Boy de la Tour a mentionné un « travail d’éducation et de sensibilisation » pour réduire le nombre de ce genre d’incidents. En Angleterre, la Fédération a explicité sa politique en la matière, une « combinaison de sanctions et d’éducation ».
L’Allemagne a elle misé sur le dialogue entre les clubs et les associations de supporters pour promouvoir la tolérance. Le pays a également été pionnier en Europe en installant des toilettes « neutres », pour les spectateurs transgenre, pour le match opposant la Mannschaft à la Serbie le 20 mars. Une démarche médiatisée pour démontrer sa volonté d’épouser les valeurs d’ouverture de la société.
LQ/AFP