Sébastien Thill, le capitaine du Progrès, s’est engagé mercredi soir avec le club de D1 russe de Tambov.
S’il ne désespère pas de réintégrer un jour la sélection nationale, Sébastien Thill ne part que pour une chose : lui. Après huit saisons à Niederkorn, il a décidé de demander un congé sans solde (qui lui a été accordé mercredi, rendant l’aventure possible) et veut se donner cette chance de passer pro et d’en faire, au moins temporairement, un vrai métier. Mais il fera tout pour que ça aille plus loin.
D’où sort-elle, cette opportunité soudaine?
Sébastien Thill : Ça vient… C’est à cause de « Kara » en fait. Il m’a juste dit qu’ils cherchaient… À la base, c’était un défenseur, mais vu qu’ils viennent de monter, il leur manque plein de joueurs tout court. Et voilà, il a proposé mon nom et ils ont dit oui pour me prendre.
Mais il a proposé beaucoup de noms du Progrès, Aleksander Karapetian?
Non, juste moi. Il m’a appelé directement pour me demander. Enfin non, il m’a envoyé un message, il y a environ deux semaines, pour me dire qu’il me rappellerait. Et il m’a rappelé. C’était bizarre. Puisque très peu de gens parlent anglais là-bas, il était au téléphone et j’entendais les dirigeants, derrière, qui parlaient en russe. Il faisait la traduction. C’était un peu fou comme moment.
Pourquoi le faire aujourd’hui, à 26 ans, alors que vous avez sûrement eu bien d’autres opportunités auparavant?
Eh bien non, en fait, je n’avais jamais eu de vraie proposition. C’est peut-être aussi parce que je n’ai jamais eu de manager et personne, donc, pour dire aux clubs de jeter un coup d’œil sur moi. Bon après, désormais, c’est un peu « Kara » qui va gérer pour moi. Lui, il connaît LE russe et il connaît LES Russes. Là, cette chance, voilà, je voulais la saisir et ce n’est sûrement pas parce que mes frères sont partis désormais. Je le fais vraiment pour moi.
Le salaire, il faut juste que je voie si ça suffit à me payer ma voiture et mon appartement ici.
En faisant une concession financière?
Je ne le fais pas pour l’argent en tout cas, c’est sûr. Le salaire, il faut juste que je voie si ça suffit à me payer ma voiture et mon appartement ici puisque je garde tout vu que je ne signe qu’un premier contrat de sept mois dans un premier temps. C’est pour ça aussi que je ne me fais pas trop de souci : s’il y a un problème, ma vie d’ici m’attendra.
Les renseignements que vous n’avez pas manqué de prendre auprès de votre frère, que vous ont-ils indiqué sur le challenge qui vous attend en D1 russe?
Je n’ai pas demandé qu’à mon frère. J’ai aussi demandé à certains de ses coéquipiers. Ils disent tous que c’est bien.
Et d’anciens joueurs du Progrès comme votre frère ou Karapetian s’y imposent. C’est donc que c’est très largement dans vos cordes.
Je n’ai aucune garantie. J’y vais comme n’importe quel joueur, sans savoir si je jouerai. D’ailleurs, je ne sais même pas quel poste ils envisagent que je prenne. Je suis assez polyvalent et c’est ma chance. Mais je serai au niveau, oui. J’ai juste besoin de bosser physiquement.
Seriez-vous parti si Karapetian n’avait pas été dans cette équipe de Tambov?
J’aurais peut-être réfléchi un peu plus, mais j’y serais allé. Je vis cette aventure comme quelqu’un d’encore jeune. J’ai encore au moins sept ans devant moi pour jouer au foot. Je n’ai rien à perdre et si je ne l’avais pas fait maintenant, je ne l’aurais plus fait. Mais le but, c’est de rester pro après ces sept mois et les agents, c’est important. Je vais donc y réfléchir.
Le Progrès m’aide beaucoup, il est derrière moi
Cela signifie franchir un cap définitif et donc abandonner cette béquille que représente votre emploi à la commune de Differdange?
Oui. Après, on verra bien en fonction du contrat qu’ils vont me proposer. Mais je suis tranquillisé à ce sujet. Thomas (Gilgemann) a lu le contrat, le Progrès m’aide beaucoup, il est derrière moi.
Pourtant, le club y perd son capitaine.
Oui, ça fait des années que je suis là… Mais le club a toujours trouvé de bons joueurs. Mon départ ne causera pas trop de soucis. J’imagine que derrière, ils confieront le brassard à Aldin Skenderovic ou Metin Karayer. Ces derniers temps, quand je sors, je le laisse à Metin en général.
Un petit pincement au cœur?
Cela me fait un peu mal, oui. Depuis huit ans que je suis là, on joue chaque jour pour aller disputer des matches européens comme ceux qui nous attendent bientôt. Willem II, les Rangers… Mais maintenant, pour moi, ce sera tous les week-ends des matches comme ça (il sourit).
Et vous pourriez commencer votre carrière pro contre votre frère puisqu’un duel est prévu contre Oufa, le 13 septembre.
Exact! Mais je ne pense pas que j’arriverai à temps là-bas. Il me faudra une semaine pour obtenir un visa et je devrais théoriquement arriver la veille du match…
Entretien avec Julien Mollereau
Il en profite pour adresser un petit clin d’œil au sélectionneur
Non, il ne décide pas de partir en Russie dans l’espoir de draguer encore ouvertement le sélectionneur, Luc Holtz, qui ne lui a plus offert de sélection depuis le 9 juin 2017, aux Pays-Bas (5-0). Mais il garde les Roud Léiwen dans un coin de sa tête et tend même une petite perche au patron : «J’estime avoir toujours eu le niveau. Vous savez, là, la sélection vient d’affronter Sarrebruck. Et cette équipe a aussi des joueurs qui évoluent au troisième ou quatrième échelon allemand. J’estime que ce n’est pas forcément mieux que la Division nationale, mais bon… Oui, j’ai encore en tête d’y retourner.»
Ce transfert est-il une chance de voir un jour réunis sous le même maillot Vincent, Olivier et Sébastien? Comme les frères Palacios au Honduras en 2014, ou les frères Arveladze en Géorgie en 1994. Le Luxembourg aimerait bien son trio de Thill…
J. M.