Des prises de bec répétées sur le terrain et en dehors minent le vestiaire de Jacques Muller, qui a mis les points sur les «i», lundi soir. Cela sera-t-il suffisant ?
Ça n’a pas vraiment commencé comme ça, et même pas du tout. Il y avait eu d’autres alertes avant. Mais le sonore : «Qui ? Moi ?», lâché par Kevin Nakache quand son staff lui a indiqué qu’il allait être remplacé est un symptôme assez fort pour inquiéter les dirigeants du RFCU, club outsider en train de passer complètement à côté de son début de saison. «Il doit déjà le regretter», pense le directeur sportif du club, Philippe Ciancanelli. Pourtant, lui et Jacques Muller se sont attaqués, lundi soir, au fil d’entretiens individuels, à la racine d’un mal qu’ils ne veulent pas nommer trop franchement : un esprit d’équipe douteux.
En général, après cinq matches sans victoire, quand on se rêvait en trouble-fête, on ne sait plus démêler les causes des conséquences. En est-on là, en position de barragiste, à cause de la mentalité de certains ou, à l’inverse, les cerveaux sont-ils justement chamboulés par l’absence de résultats ? Cette saillie de l’expérimenté Kevin Nakache n’est en tout cas «pas un bon signal, même si c’est une réaction logique de joueur de foot», dixit Ciancanelli.
«Les adversaires en rigolent»
C’est surtout qu’elle est la dernière en date d’une série de gueulantes qui resteront, pour certaines, cantonnées au vestiaire… à l’exception de celles qui ont eu lieu en direct, sur le terrain, devant témoins. «On s’y engueule parfois comme des chiens, se désole Muller. Les adversaires le voient et doivent bien en rigoler. Le pire, c’est que juste avant le coup d’envoi, dans le couloir, les joueurs se disent entre eux qu’ils doivent arrêter ça et se montrer solidaires, mais après cinq minutes de jeu, chacun met déjà la faute sur le voisin. Certains ont trop d’ego et leur comportement me déçoit. Me surprend même. Même s’ils sont eux aussi peut-être déçus par leur staff…»
Lundi, il était question, au stade Achille-Hammerel, non pas d’un, mais de plusieurs entretiens individuels. Début septembre, c’est tôt pour une psychothérapie de groupe. Mais, visiblement, il y a urgence. «Les joueurs de foot, synthétise Ciancanelli, il faut parfois les prendre là où ça fait mal, leur poser des ultimatums. Pas toujours les caresser dans le sens du poil.» Jacques Muller est un autre partisan de dire les choses tout de suite et maintenant. Parce qu’il n’a «pas vu venir cette situation» et qu’il veut «vite refonctionner en équipe» autant que savoir si «certains se sont mis trop de pression». «Il faut être franc et net, dit-il. Et cela ne peut pas se faire devant le groupe, alors on va discuter en tête-à-tête. Je n’aime pas ces soirées, mais il faut en passer par là.»
«On s’est recroquevillés»
Pas le choix. Après l’US Esch se profilent deux cols de première catégorie : Differdange et le F91. Normalement, le RFCU aurait dû les aborder avec un maximum de confiance et en étant suffisamment proche de ces deux cadors pour faire planer une menace diffuse. Là, les chiffres ne le rendent pas crédible et si la manière a souvent été partiellement bonne dans le jeu, le mental a tout fichu par terre. «Contre Pétange (2-1, dimanche), on a commis des erreurs individuelles, on a manqué de discipline tactique et on ne s’arrachait pas», énonce Muller, d’autant plus surpris que la première période avait été idéale.
Alors c’est dans la tête que tout va se jouer parce que c’est souvent ce qui fait la différence entre perdre d’un but et gagner d’un but. Or ces cinq dernières semaines, le RFCU a vu s’envoler trois de ses cinq matches par un but d’écart. «Samedi, la Jeunesse a battu Rosport en infériorité numérique. Nous, à dix, on n’a pas eu le ‘truc’, compare Ciancanelli. On s’est recroquevillés. La Jeunesse s’est rebellée, nous, on n’y est pas arrivés. Et c’était même tout le contraire.»
Le directeur sportif envisage donc de discuter aussi avec son entraîneur. Pour lui demander si certains joueurs qu’il estime, lui, être «en train de se cacher» ne devraient pas aller faire un petit tour en réserve. «Ça ne va pas chauffer, ce soir (NDLR : lundi soir), mais il va falloir qu’on dise notre façon de voir les choses», conclut-il. Et les choses vont plutôt mal.
Julien Mollereau