Quand on a côtoyé des joueurs comme Mo Salah, Diego Forlan, Abou Diaby, Blaise Matuidi, Mehdi Benatia… on peut tout de même s’enthousiasmer d’un but de DN. C’est arrivé à Azrack Mahamat.
SON BUT FACE AU RACING
Dimanche, dans le seul match de BGL Ligue que l’on disputait, il a été un peu le sauveur de Mühlenbach. Menés 1-2 par le Racing, les Blue Boys allaient encaisser leur 9e défaite en championnat lorsque Azrack Mahamat s’est élevé plus haut que tout le monde sur un corner à la 89e pour propulser la balle au fond des filets. Et donc donner un point à son équipe.
«Marquer un but, c’est toujours quelque chose d’exceptionnel. Et encore un peu plus lorsqu’il vous permet de prendre un point alors que vous évoluez à 10 contre 11. On a joué comme des hommes, avec courage», expliquait après coup le défenseur aux origines tchadiennes né à Créteil voici 31 ans. «Je ne suis pas quelqu’un qui marque beaucoup. Quand je vois la sensation phénoménale que cela fait, je voudrais bien que cela arrive plus souvent.»
FORMÉ À CLAIREFONTAINE…
Originaire donc de la région parisienne, Azrack Mahamat a d’abord été formé à l’INF Clairefontaine. «Je faisais partie de la génération 1988 mais vu que j’y ai fait mes trois ans, j’ai également côtoyé d’autres catégories. Ce qui m’a permis de rencontrer des garçons comme Blaise Matuidi, Mehdi Benatia, Hatem Ben Arfa… ou Bryan Mélisse (NDLR : du Swift)», se souvient le trentenaire.
… ET À L’AUXERRE DE GUY ROUX
En quittant Clairefontaine, direction la Bourgogne et Auxerre. «J’y ai joué de 2004 à 2009, évoluant dans un centre de formation qui faisait alors partie des meilleurs de France. On y retrouvait forcément beaucoup de qualités mais aussi une sacrée concurrence», sourit le joueur. Cela lui a permis de progresser aux côtés d’éléments comme les anciens Bleus Abou Diaby (qu’on a surtout connu sous le maillot d’Arsenal) ou Younès Kaboul (ex-Tottenham, Portsmouth…). «Des garçons qui ont réussi au plus haut niveau. Tout comme Willy Boly, l’actuel défenseur central de Wolverhampton. Ce fut des années véritablement exceptionnelles pour moi. On vivait entre ados cette période intermédiaire entre les amateurs et le monde pro, cherchant à rejoindre ce dernier…»
Si lorsqu’il débarqua à l’AJA Djibril Cissé venait de s’envoler pour Liverpool, il a, par contre, appris à connaître un certain Guy Roux. «Il avait alors un rôle plus en rapport avec le centre de formation. Tout le monde connaît le personnage. Il a auprès des gens l’image d’un père de famille qui s’occupe de ses joueurs comme de ses fils. Et il est vraiment comme ça. Il n’y a pas eu un jour où il n’était pas là, au bord d’un des terrains pour conseiller, encourager, corriger… On sentait qu’il vivait alors pour le foot et le club d’Auxerre.»
7 PAYS EN 10 ANS
S’il a donc passé cinq ans dans l’Yonne, il n’a jamais eu l’occasion de jouer avec l’équipe première. «Je me suis entraîné avec elle. Et derrière, on m’a fait une proposition qui ne me convenait pas. Le souci n’était pas forcément financier. Mais sportif. On me proposait plutôt une place de « joueur complémentaire » dans le groupe. Être un cadre de la réserve à qui on ferait appel de temps en temps en première. J’ai donc plutôt décidé de tenter ma chance à l’étranger.»
C’est ainsi qu’il se retrouve du côté de l’Espanyol Barcelone. Un club qui le prête… en Suède, à Halmstad. En tout, entre 2009 et fin 2019, il enchaîne 12 clubs et 7 pays dont la Bulgarie, la Grèce ou l’Inde.
«C’est difficile de sortir l’une ou l’autre chose. Chaque expérience a été différente et enrichissante. Surtout qu’il n’y avait pas que le sport mais aussi tout le domaine culturel à côté. Maintenant, si on parle de foot, j’ai l’impression d’avoir beaucoup appris en Espagne, du fait que la philosophie du jeu y est très développée.» En Grèce, l’expérience fut différente. «Le championnat était très bon mais on sentait clairement que le pays était touché par une crise économique. Il y avait des retards de paiement et beaucoup de corruption. On n’a pas tenté de me corrompre, mais j’ai fréquenté des gens qui, eux, avaient été touchés par ce fléau dans d’autres clubs… On leur avait proposé de passer à côté d’un match contre une somme d’argent…»
L’INDIAN SUPER LEAGUE
Si les ambiances qu’il a connues à Athènes (face au Panathinaïkos) et Salonique (contre le PAOK) ont marqué Azrack Mahamat, c’est en Inde qu’il a joué devant la plus forte affluence.
«Il y avait 65 000 personnes selon le chiffre officiel. Mais vu que c’était la finale du championnat local de 2016, il devait en réalité y avoir encore plus de monde», se souvient celui qui avait perdu cette finale avec son équipe de Kerala Basters FC contre l’Atlético de Kolkata d’un certain Hélder Postiga.
«Ce championnat indien, l’Indian Super League (ISL), c’était vraiment une expérience incroyable. C’est un projet assez jeune (NDLR : créé en 2013) mais on sentait qu’ils y avaient mis les formes. Cela m’a permis de côtoyer quelques grands noms. J’ai affronté Diego Forlan, Mohamed Sissoko, Florent Malouda… J’ai d’ailleurs échangé mon maillot avec l’Uruguayen et le Français lors de nos rencontres. Au cours de ma carrière, j’ai aussi récolté ceux d’Éver Banega, Didier Zokora ou encore Romaric. Cela fait quelques souvenirs.»
SON ARRIVÉE À MÜHLENBACH
«Mon expérience en Inde m’avait tellement plu que j’ai voulu la renouveler», continue-t-il. «Mais vu que l’ISL n’était pas reconnue comme une vraie ligue mais juste comme un tournoi (NDLR : disputé sur deux ou trois mois), les dirigeants ne pouvaient pas offrir de contrat sur plusieurs saisons. On m’a alors demandé de trouver un club pour juste quelques mois, avant de revenir en Inde. J’ai trouvé un point de chute en Grèce…»
Sauf que le Kerala Basters FC a, dans l’intervalle, changé de direction et que l’accord qu’il avait était tombé à l’eau. C’est ainsi qu’il s’est retrouvé à jouer une saison du côté de Poissy en CFA française. C’est là que Chahir Belghazouani l’a contacté cet été pour évoquer un club de Mühlenbach où il est, alors, toujours joueur.
«Avec Chahir, on avait joué ensemble à Levadiakos en 2016. Forcément, deux Français dans la même équipe en Grèce, cela aide à créer des liens. On était restés en contact depuis. Il m’a expliqué que je pourrais m’épanouir à Mühlenbach. Et je m’y suis engagé pour trois ans.»
EN SÉLECTION EN MARS
Parallèlement à sa carrière en clubs, Azrack Mahamat a aussi joué en équipe nationale. Profitant de ses origines tchadiennes pour être repris dans cette sélection.
«Je dois compter une vingtaine de sélections, pour un but marqué», sourit l’élément à vocation défensive. «Là aussi, j’ai pas mal de beaux souvenirs. Comme cette double confrontation avec l’Égypte de Mohamed Salah ou des affrontements face à une grande équipe malienne dans laquelle jouait Frédéric Kanouté, le Barcelonais Seydou Keita ou le joueur du Real Madrid Mahamadou Diarra. Mais les moments les plus forts, cela reste toujours l’engouement populaire que nous offre le peuple tchadien à chaque fois.»
Dans quelques semaines, il devrait revivre ce genre de sensations. «Il est prévu que j’y retourne fin mars pour disputer les deux rencontres des éliminatoires de la prochaine CAN que nous disputerons face à la Guinée.» Encore de belles expériences à venir donc pour le défenseur de Mühlenbach…
Julien Carette