La Jeunesse Esch a surpris tout le monde, lundi, en officialisant le recrutement de l’ancien coach emblématique du Fola.
Celle-là, on ne l’avait pas vue venir ! Jeff Strasser, longtemps au coude-à-coude avec Jeff Saibene pour endosser le rôle de technicien du RFCU, était visiblement en route pour reprendre du service en BGL Ligue et ce n’était qu’une question de semaines ou de mois (malgré ce contretemps dans la capitale) avant que le double champion avec le Fola – en 2013 et 2015 – ne retrouve un banc de touche à sa mesure. Il aurait finalement «suffi» d’attendre qu’une place se libère, tous les grands clubs du pays étant visiblement bien verrouillés pour l’heure.
Et d’un communiqué d’une sobriété étonnante, la Vieille Dame a envoyé valdinguer toutes nos certitudes, dont l’une consistait en ceci : «Jeff Strasser à la Jeunesse ? Peu plausible.»
C’est qu’encore plus que Sébastien Grandjean, coach des Bianconeri de 2011 à 2012 puis en 2019, mais aujourd’hui passé chez l’ennemi intime qu’est le Fola, Strasser est connoté. L’ancien international a quand même passé une dizaine d’années au Galgenberg et son arrivée prouve bien à quel point les nouveaux dirigeants grecs, après une première année d’exercice comme ci comme ça, se moquent des convenances locales, ne privilégiant que la solidité de leur projet. À ceux qui s’inquiétaient de leur implication ou de la façon dont ils voulaient la mettre en œuvre, la réponse est cinglante. Strasser reste en effet l’homme qui a très grandement participé à la structuration en profondeur du Fola, qui en fait aujourd’hui une machine de guerre qui résiste aux vastes remaniements d’effectif. Or personne, pas même ses dirigeants, ne peut nier qu’aujourd’hui, la machinerie de la Jeunesse est grippée à bien des égards et que la tâche pour la remettre dans des standards acceptables au niveau de la BGL Ligue est colossale.
Manthos Poulinakis, le nouveau patron du club, s’est ainsi offert un peu plus qu’un coach : un homme capable d’agréger des énergies dans le vestiaire et de mobiliser en dehors, ce qui est tout aussi crucial pour refaire de la Jeunesse un club qui compte.
Il nous faut quelqu’un qui connaisse mieux le football local, quelqu’un qui connaisse chaque trou sur chaque terrain de DN
Il était écrit, de toute façon, que Georgios Petrakis ne pouvait être cet homme. La barrière de la langue avait déjà créé des obstacles infranchissables au sein même de son groupe mais lundi, Panos Katsaitis, le vice-président du club a joué la carte très professionnelle de la séparation non désirée : «Nous avons eu une très bonne coopération. C’est un bon coach, mais aujourd’hui, pour la suite du projet, il nous faut quelqu’un qui connaisse mieux le football local, quelqu’un qui connaisse chaque trou sur chaque terrain de DN.»
Cet homme sera Jeff Strasser et alors même qu’une conférence de presse – qui sera ouverte au public, a dévoilé le club – est annoncée pour la semaine prochaine, entre le 15 et le 17, Panos Katsaitis a tout de même convenu que cette annonce choc nécessitait quelques mots, immédiats, pour dérider tout le monde : «Tous connaissent Jeff Strasser. Chacun connaît ses succès, son palmarès. C’est quelqu’un qui connaît vraiment bien ce milieu et nous avons une totale confiance en lui.» Au point d’admettre que désormais, la ligne directrice, c’est un peu lui, l’homme providentiel que personne n’attendait là et qui endossera presque un rôle de manager. «On va soutenir son projet», a dit Petrakis, lundi. Sacrée tournure de phrase pour une sacrée annonce. On dirait que la Jeunesse, d’un coup, reprend corps.
Julien Mollereau