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[BGL Ligue] Fabrizio Bei : «Je pourrais courir deux marathons!»


(Photo : Luis Mangorrinha)

Malgré la nuit blanche qui a suivi la victoire à Niederkorn lundi soir, le président differdangeois Fabrizio Bei avait une sacrée pêche, hier, au lendemain du premier sacre du FCD03.

Les habitués du Parc des sports d’Oberkorn le savent : Fabrizio Bei bouge beaucoup, en tribunes, pendant les matches. Mais seuls les intimes du vestiaire du FCD03 savent qu’il bouge fort sur le dancefloor, aussi. Du moins, savaient : depuis lundi soir, le sacre de Differdange et la publication sur les réseaux sociaux du club d’une vidéo où on le voit imiter Claude François à la perfection sur Alexandrie, Alexandra, les suiveurs du foot luxembourgeois sont à leur tour au courant que le président differdangeois danse à peu près aussi bien qu’il dirige son club, qui vient de décrocher, après quatre Coupes nationales, le cinquième trophée de son mandat, débuté en 2009. Le plus spécial, forcément. Entretien avec un homme désormais «apaisé».

On imagine que la nuit de lundi à mardi a été courte…

Fabrizio Bei : Elle l’a été! Entre la fête et l’adrénaline du match qui ne retombait pas, je n’ai pas su fermer l’œil de la nuit (entretien réalisé hier)! Mais aujourd’hui, j’ai une énergie telle que je pourrais courir deux marathons! D’ailleurs, ce soir, j’irai au fitness après la réunion à la Ligue (lire en page 16). Les trois-quatre dernières semaines étaient stressantes : tout le monde nous félicitait alors que ce n’était pas fait, et il y avait une certaine anxiété chez les joueurs, le staff et le comité. Mais au final, on gagne un derby chez notre rival, là où on avait quitté la Coupe après un match mi-figure, mi-raisin. C’est un sacré aboutissement!

Ça valait bien une petite chorégraphie! D’où vous vient ce déhanché? 

(Il sourit) Cette chanson, c’est l’hymne de Differdange! J’ai commencé à la faire avec Philippe Lebresne et Pierre Piskor, quand on gagnait des finales de Coupe ou des matches de Coupe d’Europe, et c’est resté. La dernière fois que j’ai fait Cloclo, je crois c’était à Utrecht (qualification pour le 2e tour de la Ligue Europa en juillet 2013). Le coach, Michel Le Flochmoan (décédé en août 2021), n’en croyait pas ses yeux!

Peut-être le referez-vous cet été en Ligue des champions.

La Ligue des champions, c’est mythique! Dimanche, on a passé la musique 50 000 fois à la buvette! Je sais qu’ils ne la jouent pas lors des tours préliminaires mais moi, je me la ferai sur mon téléphone, dans les oreillettes. En tout cas, on n’ira pas en C1 pour faire de la figuration. On a une certaine expérience de la Coupe d’Europe, alors on va se préparer pour honorer le championnat luxembourgeois, et avec l’ambition de passer un tour. Même si on sait que pour ça, il faudra un brin de réussite au tirage au sort, une grosse prestation et un bon arbitrage. Ce penalty à la 121e minute à Maribor (défaite 4-3 au 2e tour retour de la Conference League en août dernier), je l’ai encore en travers de la gorge…

L’avoir remporté avec trois Differdangeois, dont votre fils Gianluca, donne-t-il à ce sacre une saveur supplémentaire?

Il ne faut pas oublier Geoffrey Franzoni, qui habite en France mais qui joue chez nous depuis ses 19 ans! Mais quand je vois un Artur Abreu, un Kevin D’Anzico, que je connais depuis tout petit, c’est beaucoup de fierté. Quant au fait de le gagner avec mon fils… c’est magique. Gamin, Gianluca me suivant partout en Coupe d’Europe, alors célébrer sur la pelouse comme ça avec lui, même dans mes rêves les plus fous, je n’y pensais pas! C’est une chance unique. J’avais déjà dit ça après la Coupe l’an dernier mais le titre, c’est encore autre chose. Cette fibre differdangeoise, ça me donne encore plus de force. Avec le bon travail effectué à l’académie, j’espère que d’ici quelques années on aura d’autres Differdangeois dans l’équipe.

En parlant de Franzoni, qui a été de tous les trophées remportés par le FCD03 : aura-t-il bientôt droit à sa statue au Parc des sports d’Oberkorn?

Je pense que oui, il faudra en parler au maire (il rit)! Ce garçon, c’est un monument à lui seul. Rien qu’hier, le match qu’il fait, à son âge… (il rectifie) à son jeune âge (34 ans), c’est énorme! C’est quelqu’un de discret, mais qui a d’énormes qualités. Il fait un grand bien à cette équipe. Mais je ne veux pas nommer un seul garçon, mais les 24 qui sont allés chercher ce titre.

«La dernière fois que j’ai fait Cloclo, c’était à Utrecht»

À quoi le devez-vous, ce titre? Qu’est-ce qui a selon vous fait pencher la balance en faveur de Differdange?

Un, à la mentalité des joueurs et leur bagage technique et physique. Deux, au staff qui les a entourés, le coach et ses adjoints. Mais surtout au noyau qui s’est formé entre eux. Après la défaite de Maribor, quelque chose s’est passé. À partir de là, ça s’est fait au fur et à mesure. Jusqu’à la trêve, on se disait que les autres allaient se réveiller mais après le Racing (7-0, 16e journée), on a commencé à se prendre au sérieux et à y croire de plus en plus avec les joueurs et entraîneurs. Et c’est ce noyau, ces 24 joueurs, qui a fait la différence : tout le monde a joué, eu beaucoup de temps de jeu, on a longtemps été épargnés par les blessures, et ce titre est le fait du groupe, de sa mentalité. Sud-Américains, Portugais, Luxembourgeois, Français : tout le monde parlait le même langage. On voulait ce titre, et on l’a mérité.

Vous êtes-vous tout de même pris à douter, ces dernières semaines?

Franchement, ça m’est arrivé. Je connais les qualités de mes joueurs, mais quand on se fait reprendre à la 90e par Rosport (2-2, 27e j.), que Dudelange gagne dans le temps additionnel là-bas (1-2, dimanche), qu’on voit cette photo en première page de votre journal, avec l’équipe qui jubile sur l’égalisation de Rosport… oui, j’ai eu peur. Wiltz et le Fola (les deux prochains adversaires de Differdange) jouent le maintien, et on a déjà perdu un championnat au Fola, avec « Caza«  (Pascal Carzaniga), en faisant match nul pendant que Dudelange gagnait* (23e journée de la saison 2016/2017). Il y a toujours un petit doute mais avant le match, hier, j’ai senti chez les joueurs que c’était différent de Rosport. Du premier au 18e, quand ils sont sortis du vestiaire, j’ai vu dans leurs yeux qu’ils allaient le faire.

On vous sent beaucoup plus calme que d’habitude. C’est le cas?

Oui. Je suis content pour mon club, pour ces gens qui ont fait cette fusion avec moi en 2003 (il était alors vice-président et directeur sportif) quand peu de gens y croyaient. Aujourd’hui, je peux le dire, la mission accomplie. Je suis apaisé.

* Le F91 avait alors rejoint Differdange en tête du classement, avant d’être sacré à la différence de buts trois journées et trois victoires chacun plus tard.